INTRODUCTION
Six mois après et à l’issue des auditions de l’Administration fiscale et du Ministre des Finances, qui ont suivi celle de la Cour des comptes, respectivement les 26 octobre 2022 et 09 novembre 2022, c’est un second dossier que nous vous proposons.
C’est à une véritable embrouille d’Etat, au long cours, sur les chiffres que tous les citoyens ont eu droit. C’est une véritable entrave à son audit que la Cour des comptes a dû affronter. C’est une entrave au fonctionnement du pouvoir législatif qui s’est déroulée sous nos yeux, qui se poursuit et qui devrait déclencher une commission d’enquête parlementaire.
La Cour des comptes, par son initiative, a ouvert une brèche dans laquelle il faut s’engouffrer avec force et au plus vite, ce qui semble-t-il ne correspond pas, dans les faits, à la volonté de la majorité des parlementaires. Nous avons en effet pu constater, à quelques exceptions notables près, un inexplicable désintérêt de bon nombre d’entre eux.
Ce second dossier est aussi l’occasion de voir à quel point, pour un sujet aussi déterminant pour la vie en société, l’opacité et l’art de l’esquive sont érigés en mode de gouvernance.
Alors que les 3 auditions de la Cour des comptes, de l’Administration fiscale et du Ministre des Finances constituaient 3 occasions de savoir, les lecteurs de ce second dossier concluront comme nous à 3 constats d’échec. Et pendant ce temps, des dizaines de milliards continuent à s’envoler de la Belgique vers Dubaï devenu selon le juge Van Ruymbeke « l’épicentre de l’argent sale » .
Alors faisons chacun, avec force, ce qui est en notre pouvoir pour qu’il advienne un troisième dossier dans lequel il sera expliqué que l’enterrement de première classe a été empêché.
Auquel cas nous aurons réussi à mettre un terme au mépris en politique et à ses effets dévastateurs pour la démocratie, cependant que la fin du mépris des lois aura permis d’éviter le commencement de la décadence*.
Bonne lecture,
Christian Savestre
POUR.PRESS remercie Victor Serge, pour ses précisions techniques.
* Cfr la deuxième citation, de Jean Pellerin
Jean Pellerin 24 avril 1885-09 juillet 1921. Peu connu, c’est Francis Carco qui rassemblera ses poèmes dans un recueil posthume, Le Bouquet inutile. Il disait de lui : « On n’a pas fait encore à Jean Pellerin la place qu’il méritait d’avoir et qu’il aura parmi tant de poètes où seuls, peut-être, Guillaume Apollinaire et quelques-uns de ses amis le mettaient malgré lui. »
Résumé du dossier – Introduction
C’est l’histoire d’une véritable tromperie, du fait des plus hautes autorités de l’Etat et de son Administration, consistant à justifier de la très dérangeante énormité des chiffres par des transactions qui, en fait, n’y étaient pas incluses ! L’équivalent de 83 % du PIB belge, soit 383 milliards, versés dans 30 paradis fiscaux (pour 2020) et dont on ne sait toujours rien.
Quelle vérité ? L’aveu d’un mensonge ? L’énormité des paiements vers les paradis fiscaux était principalement justifiée par des transactions qui s’avèrent ne pas y être incluses.
Déjà dans son rapport de juin 2022, la Cour des comptes avait mis en évidence d’énormes incohérences. Elle avait pu constater que le ministère des Finances avait d’abord annoncé le chiffre de 172,0 milliards pour ensuite le réviser à la hausse à hauteur de 288,1 milliards !
Une véritable embrouille d’Etat, au long cours, sur les chiffres
Le Ministre et son Administration fiscale confessent finalement aux parlementaires de la Commission Finances & Budget ce qu’ils se sont refusé à dire à la Cour des comptes.
Une loi pour faire semblant, appliquée en faisant semblant.
Des lois appliquées en faisant semblant, cela existe. Des lois conçues pour faire semblant, c’est encore autre chose.
Et pourtant !
C’était le 24 février 2021. Ce jour-là, la Cour des comptes, après avoir décidé à son initiative d’enquêter sur les paiements des entreprises belges vers des paradis fiscaux informe officiellement le Ministre des Finances, le Président du Comité de Direction du SPF Finances (…)
Un inexplicable désintérêt des parlementaires
383 milliards de paiements effectués par 760 entreprises belges vers une trentaine de paradis fiscaux : le commun des mortels pouvait s’attendre à ce que les membres de la Commission Finances & Budget de la Chambre des Représentants se soient précipités pour assister aux 3 auditions résultant du rapport de la Cour des comptes.
Opacité et art de l’esquive comme mode de gouvernance.
Les déclarations des uns et des autres au cours des 3 auditions ont été scrutées sur la base de 4 sources de données :
-les enregistrements audio-vidéos de 2 des auditions (…)
Les Emirats Arabes Unis, « Le stade Dubaï du capitalisme »
Première destination des paiements des entreprises belges vers les paradis fiscaux, Dubaï, l’un des 7 Emirats est devenu sur les 30 dernières années une place forte de la fraude fiscale.
Une future étude scientifique pour faire semblant après une loi pour faire semblant appliquée en faisant semblant ?
Qui déclare également que l’extension aux particuliers de la loi créerait une charge administrative disproportionnée pour compenser un risque plutôt limité de perte de recettes fiscales.
Un énorme scandale maintenu sous cloche
Sur la base du dossier que nous avions publié le 26 septembre 2022 intitulé « Evasion fiscale ; Impuissance d’Etat volontaire », nous avions dressé une longue liste de questions dans la perspective des 3 auditions qui font l’objet de ce nouveau dossier.
Trois auditions, trois occasions de savoir, trois constats d’échec
Synthèse des questions-réponses obtenues par les membres de la Commission Finances & Budget, tous membres confondus – par audition, par membre – par audition et l’origine, en %, par parti du nombre de questions, de réponses, de non-réponses
Les constats d’échec en détails
Questions POUR.Press et réponses obtenues par chapitre et par question.