Et maintenant ?

Elites délinquantes et Impuissance d’Etat organisée.
CHAPITRE VIII 

« L’économie morale des élites repose sur trois piliers : la revendication constante d’autorégulation aussi bien en matière politique qu’économique, une capacité constante de justification de tous les débordements et, enfin, un évitement croissant des sanctions judiciaires ordinaires. »

Pierre Lascoumes[1]  

1- Déjà presque 7 années d’Expertise judiciaire, quel horizon entrevoir ?
2- Le rapport définitif de l’Expert judiciaire et ce que la Cour en fera.
3- Rapport définitif de l’Expert judiciaire rejeté, qu’en reste-t-il ? Pour quel usage ?
4- Et si l’Expert judiciaire était récusé à l’issue de la plainte dont il a fait l’objet ?
5- Les possibilités d’obtenir des mesures de contrainte pour la production des pièces essentielles.
5-1 D’une nouvelle juridiction après dessaisissement de l’actuelle.
5-2 De l’Etat belge et de son Administration fiscale.
6- Au-delà des voies judiciaires

 

1- Déjà presque 7 années d’Expertise judiciaire, quel horizon entrevoir ?

L’affaire Verbruggen est née le 12 avril 2002, jour du décès du Notaire Robert Verbruggen. La procédure de liquidation-partage de la succession a été initiée le 29 janvier 2015 [2]avec la nomination de deux Notaires judiciaires et d’un  Expert Judiciaire. Après plusieurs déboires rencontrés avec les deux premiers Experts, le troisième Expert judiciaire  -Emmanuel Sanzot nommé le 14 septembre 2017 -conduit l’Expertise en cours et s’adjoint les services de deux Sapiteurs, l’un Immobilier, Guibert de Crombrughe et l’autre Réviseur, Pascal Lambotte.

C’est la 43ème Chambre civile de la Cour d’appel de Bruxelles qui est, entre autres, chargée de garantir le bon déroulement de l’Expertise (principe du contradictoire, collaboration des parties, collaboration à l’administration de la preuve ….)

Le rapport provisoire complet [3]définitif de l’Expert judiciaire sera communiqué à la Cour et à toutes les parties pour le 22 décembre 2023. Toutes les parties feront part de leurs observations sur ce rapport provisoire complet pour le 16 février 2024. Une réunion technique générale à laquelle participeront toutes les parties (et leurs avocats et autres conseillers, techniques notamment) se tiendra le 01 mars 2024. L’Expert judiciaire déposera son rapport final le 31 mai 2024.   

La fin de l’Expertise judiciaire donnera suite à une nouvelle phase de travaux, ceux qui seront conduits par les deux Notaires judiciaires
La fin de l’Expertise judiciaire donnera suite à une nouvelle phase de travaux, ceux qui seront conduits par les deux Notaires judiciaires , dont la Cour (7ème Chambre civile) a noté, dans son arrêt du 29 janvier 2015, qu’ils seraient importants, justifiant ainsi la nécessité de recourir à deux Notaires plutôt qu’à un seul. Le rapport final de l’Expertise judiciaire est destiné  à leur servir de base pour procéder à la liquidation-partage, à charge pour eux d’intégrer ce qui doit l’être en ce qui concerne la société de droit liechstensteinien Fidelec, l’Expertise judiciaire ayant été circonscrite aux trois sociétés[4] de droit belge.

Deux inconnues subsistent
En matière de planning, deux inconnues subsistent :

– à quelle date la 43ème Chambre rendra-t-elle son arrêt résultant du dépôt  du rapport définitif de l’Expert judiciaire déposé le 31 mai 2024 ?
– quel délai l’importance de la tâche notariale engendrera-t-elle ?

Si l’on peut estimer que la Cour rendra son arrêt au plus tard le 31 juillet 2024, il est en revanche très difficile de situer l’horizon auquel les deux notaires judiciaires auront finalisé leurs travaux, sachant que ces derniers pourraient être retardés (ou plus encore) par la non communication de pièces essentielles pour mener à bien leur mission. Pour donner une perspective, situons le délai à une ou deux années ce qui conduirait à avoir terminé la liquidation-partage dans une fourchette 31 juillet 2025 à 31 juillet 2026.

Dans l’hypothèse où les choses se déroulent ainsi, c’est-à-dire que le rapport final de l’Expert judiciaire est avalisé par la Cour, la liquidation-partage serait donc finalisée plus de 10 années (voire plus de 11 années) après qu’il ait été décidé de son organisation et plus de 23 années (voire 24 années) après le décès de Robert Verbruggen.

C’est alors que l’héritier rebelle pourra hériter et l’Etat belge recouvrer pour le compte de la Région Bruxelles Capitale la centaine de millions de droits de succession.

 

2- Le rapport définitif de l’Expert judiciaire et ce que la Cour en fera.

La Cour n’est pas tenue de retenir les conclusions de l’Expert judiciaire
La Cour n’est pas tenue[5] de retenir les conclusions de l’Expert judiciaire. Elle peut parfaitement les écarter. Le Code judiciaire précise même que le Tribunal  « n’est point tenu de suivre l’avis des experts si sa conviction s’y oppose ». Si tel devait être le cas, il devrait motiver sa décision et expliquer notamment pourquoi  il se départit des conclusions de l’Expert (en effet, s’il rejette le rapport, le juge considère que le rapport ne fournit selon lui aucun élément de conviction).

Le rejet du rapport d’Expertise est exceptionnel
La consultation de différentes sources permet de dire que le rejet du rapport d’Expertise est exceptionnel. Il existe par ailleurs des expertises qui touchent à des domaines plus complexes que celui, financier, de la succession Verbruggen pour laquelle il s’agit d’abord de déterminer si les comptes des sociétés, objet de la succession, sont sincères et véritables, puis sur ces bases de les valoriser.

On ne va pas s’étendre ici sur ce que les Experts qualifient d’entérinement ou de rejet du rapport d’Expertise par le juge[6].

Sauf revirement impossible à prévoir, il est probable que la Cour rejettera le rapport de l’Expert
Les chapitres qui précèdent démontrent que la Cour a jusqu’à présent joué un rôle consistant à saboter l’Expertise. Dans cette mesure, sauf revirement impossible à prévoir, il est probable que la Cour  rejettera le rapport de l’Expert.

La Cour , pas avare d’une dernière turpitude, pourrait très bien invoquer l’incomplétude du rapport, résultant de l’absence de pièces considérées comme essentielles par l’Expert lui-même ! En précisant par exemple, ultime turpitude, qu’il ne servait à rien  de prendre des mesures de contrainte pour les faire produire puisqu’elles auraient disparu selon les héritiers fraudeurs !! En cela, elle ne ferait que reproduire à l’identique ce que les consorts Verbruggen font vis-à-vis de l’Expert : lui reprocher la longueur et le coût de l’Expertise dont ils sont responsables !

 

3- Rapport définitif de l’Expert judiciaire rejeté, qu’en reste-t-il ? Pour quel usage ?

On l’a évoqué dans le Chapitre VI intitulé « Il faut empêcher les Notaires judiciaires de conclure », la Cour en ne décidant pas des mesures de contrainte demandées par l’Expert crée la situation de ne pouvoir utiliser des pièces importantes, voire essentielles à la mission de l’Expert qui, dans ces conditions , est nécessairement conduit à rendre un rapport définitif comme la Cour l’a exigé, mais définitif ne veut pas dire complet dans le cas précis.

La littérature spécialisée[7] nous apprend : « qu’il existe de nombreux arrêts de la Cour de cassation qui cassent une décision pour avoir violé la foi due à un rapport d’expertise». La foi due à un rapport d’expertise est à distinguer de sa validité ou de sa force probante qui, elles, sont abandonnées à l’appréciation du juge, mais pour autant que celui-ci respecte la foi due au rapport et ne prête pas à l’Expert une opinion que celui-ci n’a pas exprimée, ou des constatations qu’il n’a pas faites… Le juge ne peut dénaturer, ne peut faire mentir le rapport d’expertise puis motiver le jugement à partir d’erreurs de lecture. Il découle évidemment de là que, lorsque l’Expert a constaté un fait, le juge ne peut affirmer qu’il ne l’a pas constaté ou a constaté autre chose ».

Dans le cas d’espèce, les comptabilités ne sont pas probantes, c’est établi  et foi doit être donnée à ce fait. Mais que vont bien pouvoir faire les Notaires judiciaires avec ce fait établi d’une part et le fait que des pièces essentielles à la méthode de valorisation choisie (pour cause de comptabilités non probantes) se révèlent indisponibles sans que des mesures de contraintes aient été décidées par les juges ? A noter que cette question se serait posée de manière identique si l’Expertise judiciaire avait été arrêtée en l’état pour cause de non-paiement des honoraires.

On ne voit donc pas comment les Notaires judiciaires pourront travailler dans ces conditions, ni les décisions que pourraient prendre la Cour dans son futur arrêt
On ne voit donc pas comment les Notaires judiciaires pourront travailler dans ces conditions, ni les décisions que pourraient prendre la Cour dans son futur arrêt. Sauf à considérer qu’une demande de production des pièces manquantes soit faite par les Notaires judiciaires (dans ce cas avant la remise du rapport provisoire complet de l’expert, le 22 décembre 2023) auprès de la Cour et que cette dernière décide de mesures de contrainte qu’elle a refusées à l’Expert.

La Cour pourrait aussi décider, après avoir écarté le rapport de l’Expert , de nommer un autre Expert, dont on ne sait, s’il était possible d’en trouver un, à quoi il pourrait bien servir si des pièces essentielles continuent à être recelées par les 5 fraudeurs.

C’est la situation de l’impasse qui prévaut alors
On rappellera que la Cour a déjà porté atteinte à la foi due à un fait établi par un Expert judiciaire :  le caractère non sincère et non véritable des comptes des 3 sociétés, caractère établi avec son Sapiteur Réviseur dans le cadre du rapport du 23 août 2021 . C’est d’ailleurs ce fait établi qui a obligé l’Expert à user d’une nouvelle voie pour tenter de procéder à la valorisation des actions des 3 sociétés, nouvelle voie acceptée par les parties et la Cour. En accédant à la demande des 5 fraudeurs de remplacer la tentative de conciliation par une réunion technique (qui se transformera en plusieurs réunions techniques) au cours de laquelle les observations faites par les parties ne se limiteront pas aux seuls aspects de la valorisation des actions, elle ouvre de facto la possibilité de revenir sur un fait établi qui a obligé l’Expert à user d’une autre méthode de valorisation. On est donc bien dans la non reconnaissance d’un fait établi par l’Expert- comptable et le Sapiteur Réviseur.

Sauf élément bien improbable, c’est la situation de l’impasse qui prévaut alors.

 

4-Et si l’Expert judiciaire était récusé à l’issue de la plainte dont il a fait l’objet ?

L’Expert a informé la Cour qu’il faisait l’objet d’une plainte au pénal
L’Expert a informé la Cour, dans le cadre d’une requête déposée le 15 mai 2023, qu’il faisait l’objet d’une plainte au pénal avec constitution de partie civile, pour des motifs non connus de sa part.

Son instruction n’interrompra-t-elle pas, à un moment donné, le cours de l’expertise au nom du principe « le pénal tient le civil en l’état»
Dans l’hypothèse où la plainte n’aurait pas été classée à ce jour, son instruction n’ interrompra-t-elle pas, à un moment donné, le cours de l’expertise au nom du principe « le pénal tient le civil en l’état» ? Avec pour premier effet de la geler pendant 1 à 2 années jusqu’au prononcé du jugement qui en résultera ouvrant deux possibilités, la récusation de l’Expert ou non. Dans le cas de la récusation, un nouvel Expert devrait être nommé, sachant que les faits déjà établis par l’Expertise (comptabilités non probantes etc.) seront sans doute écartés. On repartirait alors de zéro, avec de toute façon la question des pièces essentielles non produites. Dans le cas de la non-récusation, on se retrouve dans la situation qui existait avant que le pénal ne suspende le civil.

Une nouvelle impasse.

 

5- Les possibilités d’obtenir des mesures de contrainte pour la production des pièces essentielles.

Elles ne viendront pas de la juridiction actuelle. De qui pourraient-elles advenir ?

 

5-1 D’une nouvelle juridiction après dessaisissement de l’actuelle.  

S’agissant d‘écarter les 3 magistrates mais pas une seule (auquel cas, c’est une procédure de récusation qui devrait être entreprise), il faut entreprendre une procédure de dessaisissement[8] devant la Cour de cassation.

La demande en dessaisissement pourrait procéder de ceux qui ne font pas cause commune, sur le papier, avec les 5 fraudeurs , l’Etat belge, et Jack Verbruggen défendu par Me Masset. Et bien sûr, en outre, Luc Verbruggen, seul ou associé à l’Etat belge et/ou Jack Verbruggen.

Pourquoi pas une autre première, celle consistant de la part de l’Etat belge à effectuer une demande en dessaisissement de la 13ème Chambre ayant jusqu’à présent traité de l’Expertise judiciaire ?
Il se trouve qu’une  célèbre affaire, que nous avons traitée dans le cadre des Dubaï Papers, a donné lieu de la part de l’Etat belge à une demande en récusation qui concernait la Présidente de la 11ème Chambre [9] (la fameuse 11ème Chambre) de la Cour d’appel de Bruxelles, Isabelle De Saedeleer, laquelle traitait de la non moins fameuse affaire dite des Sociétés de Liquidités, dans laquelle le Prince Henry de Croÿ, déjà, tenait le premier rôle ; comme dans les Dubaï Papers.  Cela se passait[10] le 24mai 2013  et il s’agissait d’une première, semble-t-il, dans les annales de la justice (la demande en récusation avait finalement échoué) .

Alors, pourquoi pas une autre première, celle consistant de la part de l’Etat belge à effectuer une demande en dessaisissement de la 13ème Chambre ayant jusqu’à présent traité de l’Expertise judiciaire ?  Il faudrait qu’une telle demande soit effectuée rapidement, vraisemblablement avant la remise du rapport provisoire complet du 22 décembre prochain.

Les délais à mettre en face d’un telle procédure ne sont pas maîtrisables. Si elle avait succès, une nouvelle juridiction (il faudrait qu’elle ne soit pas dans l’arrondissement de Bruxelles) serait désignée, avec le risque éventuel que soit désigné un nouvel expert, pour garantir la « sérénité des débats ». Si elle avait échec, les choses reviendraient à leur état avant la demande en dessaisissement.

Si l’action en dessaisissement aboutit (qu’elle soit le fait d’une partie ou de plusieurs parties conjointement), un espoir existe quant à  la possibilité de voir des mesures de contrainte imposées par la nouvelle juridiction désignée, mais cependant sans aucune certitude et dans des délais non prévisibles.

La demande en dessaisissement aurait bien entendu plus de poids si elle advenait d’un groupe uni face aux fraudeurs
On notera que l’Etat belge, l’Héritier rebelle et Jack Verbruggen ont adopté une position commune  sur des points importants contestés ou alimentés par les héritiers fraudeurs : l’inclusion du Jolly hôtel dans le périmètre de l’Expertise immobilière, la récusation de l’Expert judiciaire tentée par les 5 fraudeurs et la dénonciation  de leurs multiples entraves au déroulement de l’Expertise judiciaire. La demande en dessaisissement aurait bien entendu plus de poids si elle advenait d’un groupe uni face aux fraudeurs.  Elle serait cohérente par rapport à des positions communes factuellement prises et démontrerait, pour la première fois, une volonté non ambigüe de sortir de l’impasse, dont on s’étonne qu’elle ne se soit pas manifestée plus tôt, tant du côté de l’Etat que de Jack Verbruggen, ayant pour conseil Me Masset. On sait de quoi résulte l’ambiguïté de Jack Verbruggen (différents épisodes de la saga en parlent). Quant à celle de l’Etat, le chapitre I « L’Etat  belge responsable et coupable » en traite abondamment.  L’action commune de ces 3 parties en dessaisissement de la juridiction actuelle constituerait un véritable « révélateur d’ambiguïtés »  qui permettrait alors de savoir à quoi s’en tenir quant à leur persistance.

Si l’action en dessaisissement n’aboutit pas, on retourne  à la situation d’origine avec tous les problèmes qui avaient justifié la demande en dessaisissement.

Conclusion :

La demande en dessaisissement rebat les cartes et ouvre la voie à la possibilité d’une décision judiciaire imposant des mesures contraignantes pour la délivrance de pièces essentielles
La demande en dessaisissement rebat les cartes et ouvre la voie à la possibilité d’une décision judiciaire imposant des mesures contraignantes pour la délivrance de pièces essentielles. Elle entraîne quelques mois de nouveaux délais dans le processus de l’Expertise et devrait intervenir rapidement, avant le dépôt du « rapport provisoire complet» du 22 décembre 2023. Elle ne semble avoir de chance d’aboutir que si elle est commune aux trois parties citées plus avant ou à au moins deux d’entre elles.

Une chance sur deux (ou moins) pour que cela aboutisse, sans certitude que la nouvelle juridiction prononcera des mesures de contrainte, sans mésestimer la résistance de ceux qui recèlent les pièces depuis tant d’années (Cf Chapitre VI Il faut empêcher les Notaires judiciaires de conclure, affaire Socfin). L’attribution de l’Affaire à une juridiction ne se trouvant pas dans l’arrondissement de Bruxelles augmenterait considérablement les chances d’aboutissement.

Une chance sur deux (ou plus) pour que la Cour de cassation ne prononce pas le dessaisissement et alors, nouvelle impasse.

 

5-2 De l’Etat belge et de son Administration fiscale.

L’Etat belge est le premier concerné dans cette affaire, avec évidemment l’héritier rebelle auquel le droit d’hériter est dans les faits dénié depuis plus de 21 ans.

L’Etat n’est pas démuni de moyens pour agir
Dans sa stricte fonction d’administration de la fiscalité, L’Etat n’est pas démuni de moyens pour agir au niveau des 3 sociétés de droit belge dont l’Expert judiciaire l’a informé que les comptabilités étaient fausses et qu’elle le sont toujours. Son travail d’investigation sera considérablement allégé des démonstrations déjà faites par l’Expert judiciaire.

L’Etat belge n’a pas jugé bon de demander les pièces manquantes essentielles à la Cour. Avec les moyens d’enquête dont il dispose au plan fiscal, ne peut-il pas  apporter à l’Expert judiciaire et aux notaires judiciaires ce que la Cour n’a pas voulu leur apporter ? Sans compter que l’Etat pourrait étendre son champ d’analyse à d’autres natures d’impôts que celle des droits de succession (impôts sur les bénéfices, tva, précompte mobilier, impôt sur le revenu des administrateurs, droits d’enregistrement etc.) et ce d’autant plus que les comptabilités des 3 sociétés de droit belge sont fausses à ce jour, continûment fausses depuis au moins 2001 (année la plus ancienne à laquelle l’Expert judiciaire a dû s’intéresser suite à l’arrêt du 29 janvier 2015). Il y a tout lieu de penser que les comptabilités étaient fausses également avant.

Conclusion :

Cela se passerait donc dans le cadre d’un contrôle fiscal étendu dont on ne voit pas en quoi il ne serait pas possible et dont on s’étonne qu’il n’ait pas été déclenché dès la naissance de l’Affaire
C’est la voie qui semble devoir être privilégiée pour sortir de l’impasse dans laquelle la Cour actuelle va conduire l’Expertise judiciaire. Elle permettrait en outre de ne pas limiter les enjeux pour l’Etat belge à l’évasion fiscale aux droits de succession mais de l’étendre à l’évasion fiscale et fraude à d’autres impôts.  Cela se passerait donc dans le cadre d’un contrôle fiscal étendu dont on ne voit pas en quoi il ne serait pas possible, procédure d’Expertise judiciaire en cours ou pas et dont on s’étonne qu’il n’ait pas été déclenché dès la naissance de l’Affaire.    

 

6- Au-delà des voies judiciaires

La judiciarisation de l’Expertise[11] (procès à l’intérieur du procès) est la voie qu’ont choisie les 5 héritiers fraudeurs pour la faire échouer. Ils n’avaient pas d’autre moyen dès lors qu’ils se sont retrouvés face à un Expert judiciaire qui ne se contentait pas de rentrer quelques données de bilan BNB dans un tableur Excel sans chercher à comprendre de quoi ces soldes étaient le résultat. Le fait que l’Expert soit en outre un spécialiste dans certains domaines, qui lui ont facilité la compréhension de l’opération financière complexe mise au point pour la cession du « Jolly Hôlel » et des droits y associés, n’a fait que nécessiter encore plus cette judiciarisation de l’Expertise judiciaire. On rappellera ici son livre, publié en juillet 2008[12] : « Les droits réels démembrés. Aspects civils, fiscaux, comptables et financiers ». Chez les spécialistes, c’est un livre qui fait autorité, l’originalité de l’ouvrage, pour reprendre l’argumentaire des sites qui le vendent, consistant en son approche transversale de la matière résumée comme suit : « outre les aspects de droit civil, lesquels constituent les fondations de toute opération de démembrement, l’auteur analyse avec rigueur les aspects en droit d’enregistrement, la législation en matière de TVA, les règles en matière d’impôts directs (impôt des personnes physiques et impôt des sociétés), mais aussi le cadre comptable ». Et il n’est point la peine d’aller chercher ailleurs l’incroyable guérilla menée par les avocats des héritiers fraudeurs pour exclure le Jolly Hôtel du périmètre de l’Expertise judiciaire.

L’Etat est en première ligne. C’est lui qui a clé de cette affaire.
L’Etat est en première ligne. C’est lui qui a clé de cette affaire. Et que lui et tous les autres jouent le rôle qui leur revient :

-l’Etat qui ne l’a pas joué jusqu’à présent, bien au contraire. Son extrême passivité -alors qu’il se trouve en face d’un héritier qui lui permet de mettre la main sur le dossier d’une très grosse succession, alors que, sans lui, le dossier en question aurait échappé au traitement passif qui préside (Cf rapport de la Cour des comptes dont nous parlons au Chapitre I) à la gestion des droits de succession- est injustifiable. De quoi désespérer l’héritier d’une grosse fortune de refuser la fraude et l’évasion fiscale aux droits de succession. Bien sûr ! Cela pourrait bien lui valoir plus de 20 années « d’emmerdements ».

-les Magistrats et les organes qui sont censés contrôler le bon fonctionnement de la machine judiciaire (Cf Chapitre IV) et dont nous montrons que dans le cas d‘espèce, elle est en complet dysfonctionnement. Pire d’une capacité à s’accommoder des conflits d’intérêts les plus flagrants au sein de leur corporation, eux qui ont la responsabilité de les condamner dans les affaires qu’il sont à traiter.

-Parmi les Magistrats, ceux du Parquet qui devrait intervenir dans cette affaire d’expertise judiciaire puisque les intérêts de la société y sont gravement mis en cause, y compris par certains de leur confrères du siège. Tout cela, se passant à huis-clos.

-Les parties à l’Expertise judiciaire qui ont l’obligation de collaborer à l’Expertise et à l’administration de la preuve. On n’attendra rien des 5 héritiers arcboutés sur leurs mensonges, mais la collaboration de Jack Verbruggen à l’Expertise pose problème. Il ne peut rien attendre de cette Cour, mais s’en accommode ce qui pose un vrai problème de crédibilité (comme pour l’Etat) quant à la réelle volonté de voir l’Expertise aboutir.

-Les gouvernants du Fédéral et de la Région Bruxelles-Capitale qui connaissent l’Affaire depuis son origine , qui ont été saisis 8 fois du comportement des magistrates de la 43ème Chambre, qui n’ont à ce jour pas levé le petit doigt  pour protéger la collectivité et qui semblent en outre, et au-delà du cas de l’Affaire Verbruggen, se satisfaire d’une situation désastreuse dans laquelle la Région Bruxelles Capital attend d’encaisser des droits de succession totalement gérés par le Fédéral qui considère, lui, qu’il ne s’agit plus d’une tâche fondamentale. De quoi désespérer tout contribuable captif qui ne pourra alors pas croire une seconde qu’il existe une quelconque volonté de lutter contre l’évasion fiscale aux droits de succession.

-Plus spécifiquement les Ministres des Finances de  l’Etat fédéral et de la Région Bruxelles Capitale qui vient de décider d’un nouveau système de taxation des droits de donation aboutissant à des recettes fiscales additionnelles de 5 millions d’euros par an alors que l’enjeu de 100  millions en droits de succession de l’Affaire Verbruggen finance 20 années de cette mesure qui touchera les donations indifféremment quels que soient leurs montants.

-Les élus de la Chambre des Représentants et du Parlement Bruxellois, eux-aussi saisis à huit reprises de cette Affaire.

-La presse traditionnelle dont on ne comprend pas qu’elle puisse continuer à considérer cette Affaire comme une affaire de famille.

-La société civile (associations, syndicats, simples citoyens) à l’heure où le citoyen contribuable captif lambda, bien que devant faire face à l’inflation, à des services publics en constante dégradation, honore ses obligations fiscales  alors que d’autres, mobiles, y échappent .

L’évasion fiscale n’est pas un sujet auquel il suffirait de s’intéresser en période électorale
Pour notre part, nous continuerons à vous demander, sans relâche, d’agir et de démontrer, pour ceux qui sont candidats à représenter leurs pairs dans le cadre des prochaines élections fédérales et régionales ,

que l’évasion fiscale n’est pas un sujet auquel il suffirait de s’intéresser en période électorale pour prendre des voix, puis à abandonner l’essentiel de ce qui avait été programmé au nom de coalitions gouvernementales impliquant des renoncements qui auraient dû être pré déclarés avant de se faire élire. La résolution de l’Affaire Verbruggen dans les meilleurs délais devrait faire partie pleine et entière des programmes des parties, faute de quoi les élites délinquantes et l’impuissance d’Etat organisée auront raison d’un principe aussi essentiel que celui de la citoyenneté.

L’affaire Verbruggen est très simple, sans ces élites délinquantes et l’impuissance d’Etat organisée  sur laquelle elle prospèrent.

Christian Savestre

SOMMAIRE

DOSSIER et Préface – Elites délinquantes et Impuissance d’Etat organisée
Chapitre IL’Etat belge, responsable et coupable
Chapitre IILa Cour et ses magistrates devraient mourir de honte.
Chapitre IIITout le monde se défile
Chapitre IVL’absence factuelle de contrôle du système judiciaire, pour cause de conflit d’intérêts, mais pas seulement.
Chapitre VLa C.T.I.F. (Cellule de Traitement des Informations Financières) saisie ou pas ?
Chapitre VIIl faut empêcher les Notaires judiciaires de conclure
Chapitre VIILa mystérieuse société Gérance de Biens
Chapitre VIII – Et maintenant ?


[1] « L’Economie morale des Elites dirigeantes » . Paru en 2022, aux Editions Presses de la Fondation Nationale des Sciences Politiques

[2] Arrêt du 29 janvier 2015 rendu par la 7ème Chambre civile de la Cour d’appel de Bruxelles

[3] Le rapport est qualifié de complet car établi après le rapport du Sapiteur immobilier et de provisoire car établi avant la réunion technique décidée par la Cour

[4] Saprotel, Gespafina et Gérance de Biens

[5] Article 962 du Code judiciaire

[6] https://bib.kuleuven.be/rbib/collectie/archieven/boeken/lurquin-traiteexpertise-1-civile-1985.pdf

[7] https://bib.kuleuven.be/rbib/collectie/archieven/boeken/lurquin-traiteexpertise-1-civile-1985.pdf

[8] https://www.justice-en-ligne.be/Impartialite-recusation

[9] Nous reviendrons bientôt dans un prochain article sur cette 11ème Chambre

[10] https://www.apache.be/fr/2013/05/25/letat-belge-veut-recuser-la-juge-du-proces-de-henry-de-croy-le-prince-fraudeur ; https://www.apache.be/fr/2013/05/27/quand-letat-belge-recuse-une-juge-le-nouveau-choc-des-pouvoirs-a-bruxelles

[11] https://www.cae-stricklesse.be/medias/fichiers/publications/les-embuches-de-la-procedure-belge.pdf

[12] https://pour.press/taire-la-verite/