Stop à la criminalisation des militant∙e∙s contre les violences policières

Carte blanche

La Tribune libre que nous publions ci-dessous proteste contre l’interdiction par le bourgmestre de Bruxelles du rassemblement contre la justice raciste et de classe prévu le 5 décembre 2020 place Poelaert à Bruxelles par une vingtaine d’organisations. Il s’insurge aussi et surtout contre les motivations de cette interdiction ainsi que contre la méthode consistant à placarder dans le centre-ville un texte diffamant les organisateurs en général, et la personne chargée des contacts avec la police en particulier. Portée par plus de 40 associations et organisations et signée par plus de 110 personnalités de divers horizons*, cette tribune traduit une volonté commune de défendre le droit de manifestation contre les tendances autoritaires et policières qui criminalisent les mouvements sociaux, prennent la crise sanitaire pour prétexte, visent en premier lieu les communautés racisées mais s’attaquent désormais aussi aux syndicats. Les initiateurs de cette tribune libre l’ont proposée à de grands médias qui n’ont pas jugé bon de la publier. Fidèle à sa tradition de défense des libertés démocratiques, POUR prend le relais, en espérant contribuer à la diffusion la plus large possible de cette protestation légitime.

 

 Stop à la criminalisation des militant∙e∙s contre les violences policières

 

Le contenu de cet arrêté est tout bonnement inacceptable du point de vue démocratique
Nous avons pris connaissance d’un arrêté du bourgmestre de la Ville de Bruxelles, Philippe Close, contenant l’ordonnance d’interdiction de manifester le 5 décembre à l’égard du rassemblement « Stop à la justice de classe, stop à la justice raciste ». Cet arrêté ne nous a pas été transmis, mais publié en ligne et affiché sur la place Poelaert. Le contenu de cet arrêté est tout bonnement inacceptable du point de vue démocratique. Nous dénonçons les allégations mensongères, les amalgames et les calomnies utilisés dans cet arrêté et qui constituent le signe d’un glissement dangereux de l’approche policière sous l’influence d’une vision du monde et de pratiques d’extrême droite, le tout cautionné par le bourgmestre de la Ville de Bruxelles.

L’arrêté dénote une méconnaissance flagrante quant à l’organisation de la manifestation. Comme s’il n’y avait pas 25 organisations et associations regroupées autour de l’appel, l’arrêté s’en prend tout particulièrement à Axel Farkas, militant chargé par les signataires de contacter la police en le décrivant, sans aucune preuve, comme un « activiste bien connu [sic] pour chercher la confrontation avec la police ». Il est ensuite ajouté que « celui-ci refuse de façon catégorique le dialogue avec la police». La Gauche anticapitaliste, avec laquelle il milite, y est décrite comme un « groupe d’extrême gauche qui a souvent participé à des manifestations émaillées d’incidents », dans un mécanisme de suggestion qui vise à faire porter la responsabilité d’éventuels incidents sur les coupables idéaux.

Ce texte dénote une vision policière conspirationniste des mouvements sociaux, qui n’existeraient non pas comme expression de contradictions sociales et politiques, mais simplement comme pur produit de petits groupes manipulateurs
Ce texte dénote une vision policière conspirationniste des mouvements sociaux, qui n’existeraient non pas comme expression de contradictions sociales et politiques, mais simplement comme pur produit de petits groupes manipulateurs. La police de Bruxelles-ville sait pourtant très bien que nous avons fait, par l’intermédiaire d’Axel, une série de contre-propositions constructives afin de maintenir le rassemblement et l’expression démocratique de nos revendications, tout en veillant aux règles sanitaires, mais que toutes les contre-propositions des organisat.eur.rice.s ont été rejetées.

Faut-il en conclure que pour le bourgmestre socialiste de la Ville, les profits du commerce, où s’entassent les gens dans des conditions sanitaires bien moins sécures qu’un rassemblement à l’extérieur avec distanciation, passent avant les droits démocratiques ?
La suite du texte renforce la vision conspirationniste du rapport de police, amalgamant pêle-mêle les collectifs de soutien aux victimes, la Gauche anticapitaliste, « les anarchistes » (sic), les « jeunes de quartiers sensibles » (sic). Ces différentes organisations et groupes d’individus y sont accusés de façon grossière, collectivement et sans preuve, d’« incidents » dont on ne connaît pas la teneur exacte mais dont tout laisse à penser que la police n’y inclut pas la gestion lamentable et la répression zélée et violente qu’elle a à chaque fois exercée sur les mouvements cités (Black Lives Matter, La Santé en lutte, et les protestations qui ont eu lieu suite aux décisions judiciaires récentes). La mise à l’écart du commissaire Vandersmissen à la suite des « incidents » autour de la manifestation de la Santé en lutte devrait inciter la police de Bruxelles à plus de retenue dans ses allégations et à faire le ménage dans ses rangs avant de tenter de calomnier des manifestant.e.s. Enfin, le texte invoque comme l’on pouvait s’y attendre, le risque sanitaire comme prétexte pour interdire notre rassemblement, alors que lors des échanges de mails avec la police nous avions clairement et explicitement démontré que nous prenions les mesures nécessaires à ce sujet, tandis que des milliers de personnes envahissaient les commerces de la capitale. Faut-il en conclure que pour le bourgmestre socialiste de la Ville, les profits du commerce, où s’entassent les gens dans des conditions sanitaires bien moins sécures qu’un rassemblement à l’extérieur avec distanciation, passent avant les droits démocratiques ? Poser la question c’est y répondre.

Ce qui nous indigne aussi et nous révolte dans cette attitude et ces mensonges affichés publiquement par cet arrêté, c’est que cela ressemble fort à une menace et à un règlement de comptes. Pire encore, la manière dont cet arrêté est libellé, le sous-entendu de tout le texte, semblait faite entièrement pour justifier a priori des violences policières pour le cas où nous aurions maintenu le rassemblement.

La rhétorique du texte et les amalgames d’extrême

droite qu’il contient ne peut que confirmer notre préoccupation grave quant à l’évolution des forces de police en Belgique et à Bruxelles en particulier, dans un contexte de durcissement autoritaire global, jusque et y compris chez nos voisin.e.s de France, et d’une instrumentalisation de la pandémie de Covid-19 pour opérer un tournant répressif afin de multiplier les interdictions de l’expression démocratique citoyenne.

Cet arrêté indigne et honteux témoigne pour nous de la volonté politique de casser l’unité des collectifs, des familles de victimes de violences policières, avec des organisations de gauche, féministes, syndicales, antiracistes et de donner la priorité aux profits du commerce sur la défense des droits fondamentaux des habitant.e.s. Cette énième provocation démontre une nouvelle fois la nécessité de nos mobilisations et la justesse de nos revendications. Cela constitue donc un nouvel encouragement à nous mobiliser dans le futur pour nos droits démocratiques et sociaux, contre l’arbitraire.

  • Nous interpellons les élu.e.s des partis démocratiques au conseil communal, afin qu’iels condamnent cette manoeuvre d’intimidation et de calomnies de la part de la police bruxelloise.
  • Nous interpellons le bourgmestre Philippe Close, politiquement responsable de la « main lourde » de sa police à de multiples reprises ces dernières années, chaque fois que nous avons été dans la rue, avec nos différences, pour défendre nos droits.
  • Nous interpellons les militant.e.s, avec ou sans papiers, les syndicalistes et citoyen.ne.s soucieu.x.ses de leurs droits fondamentaux pour qu’iels refusent l’intimidation et la criminalisation envers les classes populaires et les mouvements sociaux.

Nous sommes indigné.e.s et nous continuerons, uni.e.s et vigilant.e.s, à nous défendre contre les violences policières.

Nous défendrons les militant.e.s calomnié.e.s, violenté.e.s et harcelé.e.s… comme nous soutenons les militant.e.s syndicaux condamné.e.s à de la prison avec sursis alors qu’ils agissaient dans le cadre d’une action de grève.

Nous continuerons à exercer notre droit démocratique à manifester dans l’espace public pour défendre les droits fondamentaux face aux violences et à l’arbitraire policier.

Stop à la justice de classe, stop à la justice raciste, stop aux violences policières.

 

 * Organisations signataires 

 

Actrices et acteurs des temps présents

Le réseau ADES

ATTAC Bruxelles

ATTAC Liège

La Brigade de solidarité populaire WB

Carta Academica

Collectif Kahina

Communistes de Wallonie-Bruxelles

Les Dodos

Entre-murs, Entre-mondes

Ernest Mandel Fonds

Extinction Rebellion Mons/Borinage

Formation Léon Lesoil asbl

Gauche anticapitaliste / SAP – Antikapitalisten

Le George asbl

Groupe Ici et Maintenant de la Fédération Anarchiste

Groupe montois de Soutien aux Sans-Papiers

La coalition Faire Front

La Coalition KAYA

Jeunes organisés et combatifs (JOC)

Labo VZW

LEF-FGE

LSP / PSL Linkse Socialistische Partij / Parti Socialiste de Lutte

Legal team collective

Marche des Migrant-e-s de la Région du Centre

METAL (Mouvement des Etudiantes Travailleureuses des Arts en Lutte)

Mons se bouge pour le climat

Mouvement Demain

Le Mouvement politique des objecteurs de croissance (mpOC)

Les NouvELLES Antigone

Obspol

Pour, pour écrire la liberté

Le RJF (Réseau pour la justice fiscale)

Quinoa asbl

Rencontre des Continents asbl

Révolution / Vonk

La Santé en Lutte

Sororidad sin fronteras

Stand Up tegen racisme en fascisme

Union Syndicale Étudiante (USE)

Vrede VZW

 

 Signataires individuel.le.s : 

 

Mateo Alaluf, sociologue

Serge Alvarez-Fernandez, délégué syndical CSC-Transcom Poste Bruxelles

Anne-Marie Andrusyszyn, directrice CEPAG

France Arets, militante active dans le soutien aux sans-papiers et militante syndicale FGTB

Fernando Antenucci, retraité, ancien délégué FGTB Sonaca

David Baele, secretaris Algemene Centrale ABVV Oost-Vlaanderen

Aurore Belot

Gilles Blondiau, enseignant, délégué CGSP

Francine Bolle, historienne, ULB

Jalil Bourhidane permanent CNE Commerce

Anne-Sophie Bouvy, assistante Faculté de droit et de criminologie, Centre de Recherche sur l’Etat et la Constitution, UCLouvain

Didier Brissa, Formateur en Education Populaire

Anaïs Carton

Bastien Castiaux, economiste et militant anticapitaliste

Céline Caudron, déléguée CNE et militante féministe

César Chantraine, CADTM Belgique

Roxanne Chinikar, féministe

Marijke Colle, ecofeministe, SAP-Antikapitalisten

Dirk Cosyns

Esméralda Cue, retraitée, ancienne déléguée Polypal MWB-FGTB

Kristel Cuvelier

Anatole Damien, membre du George Collectif

Simon Darimont, secrétaire général Jeunes FGTB

Gregory Dascotte, secrétaire section de Bxl MWB-FGTB

Filip De Bodt

Ludo De Brabander, woordvoerder Vrede VZW

Rik De Coninck

Lucie Derauw, travailleuse sociale

Anne-Marie Delsaut, Formation MWB-FGTB

Christophe De Mos, Président de la Ligue des Droits Humains, section Namur

Ida Dequeecker, feministe

Lucie Derauw, infirmière

Bruno De Wit, vakbondsafgevaardigde BBTK-Mechelen Social profit

Josy Dubié, sénateur Honoraire

Aurélien Dubray, militant

Bernard Duterme, directeur du CETRI

Evie Embrechts, schrijfster

Olivier Fagel

Corinne Gobin, politologue, ULB

Fernand Fyon, retraité, ancien délégué FGTB Clabecq

Corinne Gobin, politiek wetenschapster, ULB

Marc Goblet, pour le droit de manifester

Jeanine Godtbil, retraitée, ancienne déléguée MWB- FGTB

Vincent Godderis

Luk Groffy

Martin Guerard, membre des JOC

Natalia Hirtz, chercheuse au Gresea ASBL

Denis Horman, militant Gauche anticapitaliste

Claire Houart, psychologue, psychothérapeute

François Houart, comédien

Winfried Huba

Eva M. Jiménez Lamas, féministe antiraciste

Gery Jacquet, vorming MWB-FGTB

Amaury Jonkers

Hafid Kaddouri, activist, Weerwerk

Ufuk Karaoglan, militant antiraciste

Sidi Katumwa, animateur CEPAG

Freja Korsbaek, militant à la Gauche anticapitaliste

Orhan Kilic, actief bij NavBel

Slahedinne Lachaal, retraité, ancien délégué MWB-FGTB

Najar Lahouari, Président FGTB-MWB Brabant

Marc Lancharro Rodriguez permanent syndical CGSP-ALR CHU Saint Pierre et Bordet

Romane Leidinger, enseignante

Hugues Le Paige, journaliste-réalisateur

Arnaud Levêque, secrétaire fédéral à la Centrale Générale FGTB

Jean-François Libotte, syndicaliste

Isabelle Loodts, journaliste et réalisatrice

Renaud Maes, professeur Université Saint-Louis/ULB, rédacteur en chef de La Revue nouvelle

Afroditi Maravelaki

Freddy Mathieu, ancien secrétaire régional de la FGTB Mons-Borinage

Mariam Mathieu

Jacinthe Mazzocchetti, professeure UCLouvain

Herman Michiel, actief in Ander Europa

Christine Pagnoulle, chargé de cours honoraire à l’Université de Liège

Brigitte Ponet, militante CADTM

Hamel Puissant, formateur, délégué syndical SETCA-NM

Jean-François Ramquet, secrétaire régional interprofessionnel, FGTB Liège-Huy-Waremme

Milady Renoir, poétesse solidaire de la lutte des Sans Papiers.

Daniel Richard, secrétaire régional FGTB Verviers

Milan Rivié, membre du CADTM

Florence Ronveaux – Responsable en Education Permanente

Oliver Rittweger De Moor, délégué CSC

Joelle Sambi Nzeba – actrice, poétesse & lesbienne féministe

Clara Seynaeve

Johan Seynaeve

Michel Staszewski, enseignant retraité

Isabelle Stengers, philosophe, ULB

Daniel Tanuro, auteur écosocialiste, membre de la Gauche anticapitaliste

Agnès Titaux, retraitée

Eric Toussaint, docteur en sciences politiques des universités de Liege et de Paris 8 et porte parole du CADTM

Jacqueline Trouillez, retraitée

Julien Truddaïu, citoyen solidaire

Leo Tubbax, Nucléaire Stop Kernenergie

Miguel Urban, député européen Anticapitalistas (Espagne)

Flor Vandekerckhove, blogger, dichter

Isabelle Vandenberghe, citoyenne

Christine Vanden Daelen, permanente au CADTM, militante féministe

Goto Van Kern, militant chez les JAC (Jeunes Anticapitalistes)

Herman Van Laer

Bart Vandersteene, woordvoerder LSP / PSL

Laurette Vankeerberghen, actrice et citoyenne

Jean-Claude Vannieuwenhuyze, vice-président Comité séniors CSC Bruxelles

Sixtine van Outryve, juriste

Peter Veltmans, délégué syndical CGSP chez SPF Finances

Raf Verbeke, grondrechtenactivist

Steven Vermeulen

Grégoire Wallenborn

Dominique Waroquiez, retraitée

Elisabeth Wendelen, retraitée…

Thomas Weyts, SAP-Antikapitalisten, Stand Up tegen racisme en fascisme

Irene Zeilinger, féministe