L’évitement fiscal nuit à la bifurcation écologique et sociale

Le premier lien, ce sont bien sûr les sommes perdues pour les finances publiques et qui permettraient de faire face au besoin de financement de la transition écologique. Le rapport du Giec d’avril 2022 confirme que la question du financement est déterminante. Pour l’heure, les sommes engagées sont insuffisantes pour atteindre les objectifs fixés.
Le Giec estime que, pour limiter le réchauffement à moins de 2°C, les investissements annuels doivent être, entre 2020 et 2030, trois à six fois supérieurs à ce qu’ils sont actuellement. Or les experts estiment qu’«  il y a suffisamment de capitaux et de liquidités mondiales pour combler ces déficits d’investissement. » C’est d’autant plus vrai si l’on s’attaque aux paradis fiscaux et à l’évasion fiscale internationale.

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Pour la France, les estimations des besoins annuels de financement supplémentaire vont de 14 milliards d’euros (Institut pour le climat) à 66 milliards (rapport Pisani-Mahfouz pour France stratégie) voire 100 milliards (Ademe). Certes, ces estimations ne concernent pas les seules finances publiques, mais tous les travaux s’accordent pour dire que les politiques publiques doivent jouer un rôle majeur face à la recherche du profit à court terme des acteurs privés.
Autrement dit, la fraude fiscale empêche le financement de la transition écologique. Pour rappel, elle est estimée entre 80 et 100 milliards d’euros en France. Au niveau de l’Union européenne à 28, Richard Murphy, de l’Université de Londres, estimait la fraude aux recettes publiques, impôts et recettes sociales comprises entre 800 à 1 000 milliards d’euros.
Au-delà de ce lien évident, d’autres doivent être soulignés. Une étude de l’académie de Suède publiée le 13 août 2018 dans la revue Nature Ecology & Evolution montre ainsi le rôle des paradis fiscaux dans la dégradation de l’environnement et en particulier dans la déforestation de l’Amazonie et la pêche illicite.

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Refuges pour activités climaticides

L’étude précise ainsi qu’«  entre octobre 2000 et août 2011, 68 % de tous les capitaux étrangers ayant fait l’objet d’une enquête sur neuf sociétés spécialisées dans les secteurs du soja et du bœuf en Amazonie brésilienne [NDLR : soit 18,4 milliards de dollars] ont été transférés par l’intermédiaire d’un ou de plusieurs paradis fiscaux connus. Cela représente jusqu’à 90 voire 100 % des capitaux étrangers pour certaines entreprises faisant l’objet d’une enquête ». Les territoires concernés sont principalement les îles Caïmans (Royaume-Uni), les Bahamas et les Antilles néerlandaises.