Corona carnets – Jour 10 – La bassesse

POUR participe à l’élaboration collective d’un monde meilleur

La crise sanitaire que nous devons tous affronter par la grâce du coronavirus nous pousse tous à réfléchir à quelle devra être, demain, l’organisation de nos sociétés pour ne pas poursuivre comme des moutons l’actuelle logique suicidaire. Dans cette perspective, POUR souhaite publier des textes et vidéos qui illustrent quelles seront les leçons que nous devrons retenir collectivement pour que « le jour d’après » ne ressemble pas aux « jours d’avant ». Ainsi, ici déjà le jour 10 des Corona carnets, billets que Paul Hermant, actif dans le collectif des Actrices et acteurs des temps présents[1], nous propose quotidiennement.

A.A.

Jour 10 – La bassesse

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Ce lundi reprend le télétravail qui n’avait pas été abandonné pendant le week-end. C’est tout le temps l’établi, il n’y a plus aucune césure, rien qui sépare. Rien qui sépare des gens tous dispersés, tous rendus à une singularité qui dissout les individus.

En relisant mon dernier paragraphe d’hier, je me dis qu’il faudra tout de même applaudir beaucoup pour qu’advienne cette régularisation des sans-papiers. Je pense à ces 300 personnes détenues dans les centres fermés que l’Office des Étrangers a relâchées dans la nature – juste avant de mettre elle-même la clé sous le paillasson – avec ordre de quitter le territoire dans les trente jours. Un collectif d’avocats avait effectivement plaidé pour ces libérations, arguant que si « l’éloignement devient hypothétique voire impossible, la détention n’est plus légale » mais je suppose qu’il n’était venu à l’idée de personne que cette libération se transformerait en expulsion, ça a été le cas, et qu’on avait plutôt pensé que des précautions seraient prises, mais que nenni. Le propriétaire d’un hôtel proche du parc Maximilien où les jetés à la rue se rassemblaient au défi de toute la distanciation sociale requise par les autorités a finalement offert le gîte. Retenons ceci aussi, lorsque l’hubris aura repris. La banalité du mal ne s’exerce pas seulement en faisant partir et arriver des trains à l’heure. Elle envoie des gens démunis de tout à la rue quand il n’y a plus personne en leur donnant un ordre impossible à exécuter. Cet Office s’est habitué à l’inhumanité, ce n’est même plus étrange pour lui d’envoyer des gens vers l’épidémie. Les ambulances, ça change des bateaux.