Corona carnets : Jour 3 – Pouvoirs spéciaux

POUR participe à l’élaboration collective d’un monde meilleur

La crise sanitaire que nous devons tous affronter par la grâce du coronavirus nous pousse tous à réfléchir à quelle devra être, demain, l’organisation de nos sociétés pour ne pas poursuivre comme des moutons l’actuelle logique suicidaire. Dans cette perspective, POUR souhaite publier des textes et vidéos qui inaugurent cette réflexion à la suite de notre texte sur les leçons que nous devrons retenir collectivement. Nous allons, par exemple, vous proposer quotidiennement les billets que Paul Hermant, actif dans le collectif des Actrices et acteurs des temps présents[1], entend écrire régulièrement. Ici le second acte de ce qu’il a appelé « Corona carnets ».

A.A.

Jour 3 – Pouvoirs spéciaux

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Au réveil, un gouvernement. Le même, minoritaire, rebaptisé. Pouvoirs spéciaux. Deux fois 3 mois. Depuis hier en Espagne, l’armée surveille les déplacements. Il est désormais interdit de circuler dans les rues sauf pour aller au travail ou acheter de quoi manger (chair à production, bouche à consommation, air désormais connu). Toucherions-nous déjà du doigt, si vite, l’exception qui sera la règle ? Hier encore, les radios nous parlaient de ce ralentissement non choisi et de la nouvelle donne que cela représentait pour une société routinée à l’urgence, mais c’est du contraire qu’il s’agit : d’une accélération foudroyante, tellement foudroyante que l’on s’habitue pour la deuxième fois en 10 jours à entendre ce terme « pouvoirs spéciaux » dans deux pays différents, la France sous la forme du 49.3 pour faire passer ses retraites, la Belgique pour faire passer on ne sait quoi encore et c’est presque encore pire. Et on s’aperçoit que nos oreilles en ont déjà accepté le rythme. Pouvoirs spéciaux, ça se dit vite, c’est vite dit.

Pour le reste, j’ai vu les nettoyeurs de Fukushima dont je parlais hier et ce sont des ouvriers de la construction, ils discutent sur le trottoir et ouvrent leur boite à tartines. Ils parlent fort et près. Les murs seront montés, les locataires à qui l’on vend à l’avance un « espace exclusif tout inclusif » viendront plus tard y ranger leurs mouchoirs dans la commode Ikea.