Emeline De Bouver nous propose régulièrement des chroniques relatives à l’engagement militant et notamment sur les modes d’action au sein des initiatives de transition. Aujourd’hui, elle nous transmet une analyse qu’elle a réalisée avec la philosophe, spécialiste de l’écoféminisme, Charlotte Luyckx pour L’institut d’éco-pédagogie. Elles y ont relevé les multiples stratégies que des groupes développent pour répondre au constat des urgences écologiques. Nous publierons cette intéressante étude en deux parties, avec ici un premier volet décrivant 3 des 6 modes d’engagement qu’elles ont recensés.
Écosystème de la transition : la diversité des engagements pour répondre à l’urgence écologique1
Sixième extinction massive d’espèces, accélération du changement climatique, pollution des sols, des sous-sols et des mers, réfugiés climatiques, désertification, sur-extraction de métaux rares, inégalités sociales grandissantes, risques sanitaires dus aux pesticides… Les constats effrayants sur l’état du monde sont nombreux d’où l’usage de plus en plus fréquent de « gros mots » comme « urgence, désastre, crise, fin du monde, catastrophe et effondrement » pour décrire l’énormité de ce que nous vivons. Même si nous pensons qu’il est indispensable de regarder en face la dégradation de nos écosystèmes et d’exiger une réaction à la hauteur des défis, nous voudrions insister sur l’importance de ne pas confondre urgence et recette unique. Lorsque les enjeux sont importants, la tentation peut être grande de sacrifier la pluralité des actions mises en œuvre au nom d’impératifs liés à l’urgence qui ne s’embarrassent pas d’une analyse complexe ou nuancée. Et pourtant, penser une sortie de la crise écologique demande de prendre en compte la complexité de ses causes et donc la pluralité des modes d’engagements « valables » pour y répondre. Cette analyse présente différentes figures qui incarnent chacune à leur manière la transition. L’ensemble de ces figures forme une sorte d’écosystème. Pour rendre compte de la multiplicité des engagements nécessaires pour répondre à la crise, nous circonscrivons artificiellement six ensembles de pratiques et discours. Chacun reprend une lecture de la crise écologique et les formes d’actions écologiques envisagées pour y répondre. Comme toute catégorisation, cette vision est schématique. En réalité, il existe une pluralité de profils à l’intérieur de chaque ensemble et les frontières sont évidemment poreuses entre les profils type identifiés : beaucoup de convivialistes sont également des éco-activistes, par exemple. La distinction entre les profils d’act∙eur·rice∙s répond à des besoins de clarification théorique mais ne doit bien évidemment pas être comprise comme une séparation hermétique. L’analyse se veut un outil pour nous aider dans nos animations, formations ou communications, à véhiculer une vision plurielle de la transition à laquelle la crise écologique et sociale nous appelle.