Ce 22 janvier 2021, le Traité d’Interdiction des Armes Nucléaires entre en vigueur !

Le Traité d’interdiction des armes nucléaires (TIAN) a été voté le 7 juillet 2017 par l’Assemblée générale des Nations Unies. Souvenez-vous : cette année-là, le prix Nobel de la Paix avait été décerné à l’ICAN (Campagne Internationale pour l’Abolition des Armes Nucléaires), une coalition mondiale d’ONG « pour ses efforts visant à attirer l’attention sur les conséquences humanitaires catastrophiques de tout emploi d’armes nucléaires » et aussi pour « ses efforts novateurs » afin de parvenir à une interdiction de ces armes fondée sur des traités.

Ce Traité interdit de développer, tester, produire, stocker ou utiliser des armes nucléaires. En outre, il défend aussi de menacer d’utiliser des armes nucléaires et de les déployer sur son territoire. Il proscrit également l’aide, l’encouragement ou l’incitation à quiconque de s’engager dans l’une de ces activités.

Actuellement, il y a plus de 14.000 armes nucléaires réparties dans des dizaines de sites dans le monde et dans des sous-marins qui patrouillent les océans en permanence.
Le TIAN se situe dans la droite ligne du Traité de non-prolifération des armes nucléaires. Le TNP fut signé en 1968 pour réduire le risque de propagation des armes nucléaires dans le monde. Son application est garantie par l’Agence Internationale de l’Énergie Atomique (AIEA). Le TNP contient dans son article VI une clause indiquant que chacune des parties « s’engage à poursuivre de bonne foi des négociations sur des mesures efficaces relatives à la cessation de la course aux armements nucléaires à une date rapprochée et au désarmement nucléaire, et sur un traité de désarmement général et complet sous un contrôle international strict et efficace ». Le TNP a relativement réussi à freiner la prolifération des armes nucléaires dans le monde.

Mais en ce qui concerne le désarmement nucléaire, très peu de progrès ont été réalisés et l’inquiétude générale grandit. D’après un rapport du SIPRI(1), les États détenteurs comme les États-Unis, continuent à moderniser leur arsenal et accordent « plus d’importance » à l’arme atomique dans leur doctrine stratégique. Actuellement, il y a plus de 14.000 armes nucléaires réparties dans des dizaines de sites dans le monde et dans des sous-marins qui patrouillent les océans en permanence. Cette capacité de destruction est inimaginable !

Si le TIAN a été voté par une énorme majorité de pays (122 pays sur 192), les puissances nucléaires et leurs alliés ainsi que l’Australie et le Japon n’ont pas cru bon de participer au vote (68 pays).

En vertu du droit international, les armes nucléaires seront donc officiellement illégales ! Les États non signataires du TIAN ne pourront plus prétendre respecter le droit international ou encore être un État responsable.
À l’heure actuelle, 86 pays ont officiellement signé le traité et 51 pays l’ont déjà ratifié (à noter que l’Afrique du Sud et le Kazakhstan qui ont possédé l’arme nucléaire et y ont renoncé, ont signé et ratifié le TIAN, c’est donc possible !). Le seuil des 50 ratifications est franchi le 24 octobre 2020, lorsque le Honduras ratifie le TIAN. Cela veut dire que le traité entre en vigueur 90 jours plus tard, soit le 22 janvier 2021. En vertu du droit international, les armes nucléaires seront donc officiellement illégales ! Les États non signataires du TIAN ne pourront plus prétendre respecter le droit international ou encore être un État responsable.

 

Quelle est la position de la Belgique dans tout cela ?

La Belgique n’a pas voté pour le TIAN et est restée alignée sur la position des États-Unis en tant que membre de l’OTAN.
Comme une majorité de pays, la Belgique a signé et ratifié le TNP ainsi que la Convention sur l’interdiction des armes biologiques et celle sur l’interdiction des armes chimiques. On se souvient aussi que notre pays a joué un rôle moteur dans l’adoption du Traité sur l’Interdiction des mines antipersonnel en 1997. Pourtant en 2017, la Belgique n’a pas voté pour le TIAN et est restée alignée sur la position des États-Unis en tant que membre de l’OTAN. Il faut rappeler que notre pays héberge des armes nucléaires sur son territoire(2), or cela n’a jamais été admis officiellement. Cette signature obligerait la Belgique à terme à démanteler ces armes nucléaires.

D’après un sondage réalisé le 2 décembre dernier, 77% de la population belge se prononce pour la signature du TIAN. Le 21 septembre, lors de la journée internationale de la Paix, plusieurs actions ont été menées dans 159 villes belges et communes belges pour appeler au désarmement nucléaire. 52 bourgmestres ont rédigé une lettre ouverte appelant notre gouvernement à « reconnaître officiellement la présence d’ogives nucléaires sur notre territoire » afin de pouvoir entamer un débat public sur cette question.(3)

Fin septembre 2020, 56 anciens ministres des Affaires étrangères et ministres de la Défense de 22 pays non signataires du TIAN (pour la Belgique : Willy Claes, Yves Leterme, Éric Derijcke et Guy Verhofstadt) ont publié une Lettre ouverte de soutien au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires. Selon eux, les armes atomiques ne renforcent pas notre sécurité, au contraire ! Elles sont une menace existentielle pour l’humanité.(4)

Le risque de détonation d’une arme nucléaire aujourd’hui – que ce soit par accident, par erreur de calcul ou de conception – semble s’accroître avec le déploiement récent de nouveaux types d’armes, l’abandon d’accords de contrôle des armements mis en place depuis de nombreuses années et le danger bien réel de cyberattaques sur des infrastructures nucléaires. Nous devons tenir compte des avertissements des scientifiques, des médecins et des nombreux experts. (…) Il n’est pas difficile d’imaginer qu’une rhétorique belliqueuse et un mauvais jugement de dirigeants d’un État disposant d’armes nucléaires pourraient aboutir à une calamité affectant toutes les nations et tous les peuples.  Ces 56 ex-ministres ainsi que l’ancien secrétaire général des Nations Unies Ban-Ki Moon exhortent les gouvernements à faire preuve de courage et à adhérer au Traité car « Tôt ou tard, notre chance s’épuisera – sauf si nous agissons. » et « Il n’y a pas de remède à une guerre nucléaire. La prévention est notre seule option.

 

Que peut-on faire ?

Malgré l’ouverture que laisse entrevoir l’accord de gouvernement Vivaldi, il faudra une  pression populaire forte pour que nos dirigeants entendent la voix de la raison.

La coalition belge contre les armes nucléaires Nonukes.be organise ce vendredi 22 janvier une manifestation devant le ministère des Affaires étrangères, 15 rue des Petits Carmes à 1000 Bruxelles. C’est l’occasion de demander à Sophie Wilmès et à notre gouvernement de suivre l’exemple des pays qui ont signé et ratifié le Traité d’Interdiction des Armes Nucléaires(5).

Anne De Muelenaere 

(1) https://www.lemonde.fr/international/article/2019/06/17/le-nombre-d-armes-nucleaires-dans-le-monde-en-baisse-selon-un-rapport-du-sipri_5477105_3210.html.

(2) Pour consulter les preuves de la présence d’armes nucléaires en Belgique, suivez ce lien : https://nonukes.be/fr/info-2/en-belgique/ .

(3) https://plus.lesoir.be/333921/article/2020-10-26/carte-blanche-sur-linterdiction-des-armes-nucleaires-la-belgique-persistera-t.

(4) https://www.lalibre.be/debats/opinions/nous-vivons-sous-la-menace-d-une-guerre-nucleaire-nos-dirigeants-doivent-agir-au-plus-vite-5f68ba069978e2322f34ad06.

https://blogs.mediapart.fr/les-invites-de-mediapart/blog/220920/lettre-ouverte-de-soutien-au-traite-sur-l-interdiction-des-armes-nucleaires.

(5) https://nonukes.be/fr/participez-aux-actionsdu-22-01-2021/ – Les actions respectent les mesures Covid et leurs limites. Vu les mesures sanitaires, il est important de pouvoir estimer le nombre de participant∙e∙s afin d’organiser l’action en conséquence. Merci de bien vouloir vous inscrire en utilisant le formulaire sur le site.