Condamné en 2017 par la justice luxembourgeoise pour avoir révélé un système d’optimisation fiscale de grande ampleur dans le cadre des LuxLeaks, Raphaël Halet avait saisi la Cour européenne des droits l’Homme. La CEDH vient de reconnaître en appel qu’une telle condamnation est une violation du principe fondamental de liberté d’expression.
Créée en 2018, la Maison des Lanceurs d’Alerte défend et accompagne les lanceurs et lanceuses d’alerte dans leur démarche. Elle fait évoluer le droit et conseille les lanceurs et lanceuses d’alerte, notamment lorsqu’ils sont victimes de représailles.
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Pour rappel des faits, en 2012, alors qu’il travaillait pour le cabinet d’audit PricewaterhouseCoopers (PwC), Raphaël Halet avait transmis des documents à un journaliste d’investigation qui enquêtait à l’époque sur des accords d’optimisation fiscale mettant en cause l’État luxembourgeois et le cabinet d’audit pour le compte de plusieurs multinationales. Raphaël Halet avait alors été condamné pour « violation du secret des affaires ». Antoine Deltour, également lanceur d’alerte de la même affaire, avait quant à lui été condamné à une peine d’un an avec sursis avant d’être finalement innocenté.
Dans la décision rendue ce jour, la CEDH revient sur les conclusions qu’elle avait rendues en 2021 dans la même affaire. Elle considérait alors que, bien que les informations révélées par le lanceur d’alerte soient d’intérêt général, son droit d’exercer sa liberté d’expression devait être concilié avec le droit d’autrui et les intérêts divers liés à la réputation et à l’activité commerciale de PwC, numéro deux mondial de prestations de services.
La décision rendue ce jour revient sur cette première interprétation : la Grande Chambre rapporte en effet que l’intérêt public de la divulgation de ces informations l’emporte sur l’ensemble des conséquences dommageables qui en résultent.
En mars 2019, la Maison des Lanceurs d’Alerte avait déposé une tierce-intervention dans cette procédure pour souligner le risque que présentait pour l’ensemble des lanceurs d’alerte le critère retenu par la justice luxembourgeoise pour condamner Raphaël Halet : le fait que l’information divulguée n’était pas « essentielle, nouvelle et inconnue ». Elle avait argué que ce critère aurait de graves répercussions sur l’effectivité de la protection des lanceurs d’alerte dans toute l’Europe et avait demandé son rejet au président de la 4ème section de la CEDH.
Si cette décision est sans nul doute une excellente nouvelle pour l’ensemble des lanceurs et des lanceuses d’alerte en Europe, et que la Maison des Lanceurs d’Alerte se félicite d’être intervenue dans cette instance, elle regrette néanmoins le parcours du combattant judiciaire que Raphaël Halet a du traverser.
Pour Raphaël Halet, le combat touche à sa fin, mais il n’a pas été sans peine. Une cagnotte a été mise en place pour permettre au lanceur d’alerte de financer son combat.