Transition énergétique. Plus d’extractivisme en Amérique latine : le Nord fixe l’agenda du Sud

« Il n’y a pas de transition anti-extractiviste si le pillage de l’Amérique latine et de l’Afrique continue d’être entériné », affirme l’auteur. Contrairement à certains secteurs académiques et politiques qui promeuvent ce soi-disant drapeau vert, il souligne que la proposition laisse de côté le protagonisme nécessaire des communautés locales et, en fin de compte, constitue un pas de plus vers le pouvoir corporatif et gouvernemental sur les territoires et les corps.

La transition énergétique, telle qu’elle est présentée aujourd’hui, est loin de ce qui est compris et recherché lorsque les communautés et les personnes parlent de justice sociale et environnementale dans nos territoires, tant en Amérique latine qu’en Afrique. Dans cet article, je me concentrerai sur cinq aspects que je considère comme pertinents lorsque l’on réfléchit à des solutions à la crise climatique. J’anticipe en ce sens qu’aucune transition ne sera juste si elle approfondit l’extractivisme et, encore moins, si elle propose de nouvelles manières de sacrifier les corps et les territoires.

1- Le réductionnisme. La manière dont la crise climatique est configurée et dont sa supposée solution est présentée procède d’une première réduction. L’idée d’une crise climatique limitée à l’émission de gaz à effet de serre (GES) est promue par différents secteurs. Je reconnais bien sûr le rôle fondamental que jouent ces gaz dans le problème, et que leur augmentation dans l’atmosphère a des conséquences graves, comme l’augmentation de la température moyenne, l’acidification des mers ou la modification des régimes de précipitations, entre autres. Cependant, le réductionnisme implique de limiter les problèmes environnementaux à ce seul facteur. Ainsi, les scénarios de désertification, de pollution, d’incendies, d’augmentation des maladies ou d’expulsion des communautés locales, pour ne citer que les plus répandus, sont souvent négligés ou ignorés. Dans le même temps, des activités associées à de plus faibles émissions de GES, mais qui causent des dommages irréparables, sont développées et encouragées. Par exemple, l’énergie nucléaire est encouragée, les centrales hydroélectriques sont rendues viables, ou l’expansion des plantations forestières est proposée. Dans les trois cas, les dommages locaux et régionaux causés par l’extraction d’uranium, les barrages avec leurs réservoirs et leurs inondations, ou les plantations d’arbres en monoculture qui remplacent les forêts ou les terres boisées, sont omis. On occulte ainsi les graves conséquences subies par les communautés, aujourd’hui et dans le futur, à travers la transformation des territoires, la pollution, la difficulté d’accès à l’eau ou la perte de productions locales. Il n’est pas possible de promouvoir une transition juste qui augmente la destruction de l’environnement.