Le Pen, les institutions, la suite

Le déchainement des soutiens de Le Pen après sa condamnation, a de quoi inquiéter ceux et celles, jusque là plutôt rassurés par la banalisation du RN. Et si celle-ci était aussi un produit des institutions de la V° République ? Leur défense ne serait-elle pas un leurre, source de grande confusion pour la suite ?

Les attaques ad nauseam contre le verdict en général et les juges qui l’ont rendu en particulier, suscitent des prises de position, le plus souvent défensives. S’y mêlent des opinions incertaines sur le FN-RN, et des convictions problématiques sur l’état des institutions de la République. Des solutions d’urgence sont avancées pour mieux les défendre, peut-être plus mauvaises que le mal à traiter. Voyons les deux faces de cette situation.

 

-Sur la nature, la trajectoire et le programme du Rassemblement National 

Les différentes manières dont ces sujets touchant aux institutions sont abordés sont toutes indexées sur l’élection présidentielle, personne ne remet en cause le dérèglement dont ce scrutin est la cause, unique en Europe. Ses règles et codes sont si familiers et partagés par tous les acteurs en compétition, qu’il est devenu impensable de le mettre en question. Il a pourtant joué un rôle majeur dans la banalisation de l’extrême-droite, spécifique à la France. Au-delà de son statut de « mère des batailles » régissant toute la vie politique du pays, il apparaît comme une possible issue conjoncturelle à l’enlisement du fonctionnement institutionnel depuis la dissolution du 9 juin 2024.

Comme si le retour à un système majoritaire était ainsi garanti grâce à un deuxième tour « magique » (selon J.L. Mélenchon), conçu comme un duel réservé à deux combattants. Tant pis si c’est au prix d’une désaffection croissante des électeurs, au ressentiment et à l’artificialité de la représentation qui en ressort. Ce dont auront profité pleinement et régulièrement les Le Pen.


By Paul Alliès

Paul Alliès, Professeur Emérite à l'Université de Montpellier. Doyen honoraire de la Faculté de Droit. Président de la Convention pour la 6eme République.