Certains politiciens plaident régulièrement pour des baisses d’impôts. D’apparence bénéfique pour les citoyens, ces baisses ont pourtant un coût important et mettent à mal la progressivité de notre système fiscal. Ce sont souvent les citoyens les plus précaires de notre société qui doivent en supporter les frais. Décryptage à l’aide du cas concret du tax shift de la dernière majorité.
Dans une récente interview donnée au journal L’Echo, Georges-Louis Bouchez, le président du MR, déclare son envie de baisser les impôts dans la droite lignée du tax shift réalisé par le précédent gouvernement : « Si c’est pour aller avec une N-VA qui veut baisser les impôts, mieux récompenser le travail et prolonger le travail de la suédoise, be my guest ! ». Cet élément est souvent répété à l’envi par la droite pour dire qu’elle aide les gens, contrairement à la gauche qui voudrait augmenter les impôts. Cependant, « vouloir baisser les impôts », cela ne veut pas dire grand-chose. Quels impôts ? A quel niveau se portera la baisse ? Quelles sont les dépenses qui diminueront en contrepartie ? On le voit bien, la question est complexe et se contenter de dire que l’on soutient la population en augmentant son « salaire poche », cela frise la démagogie.
Pour comprendre ce que le président du MR entend par « baisse des impôts », il est bon de se replonger dans la réforme tant vantée par la suédoise, le fameux tax shift. En quoi consiste-t-il ? Le tax shift consiste principalement en une baisse de l’impôt sur le revenu (IPP) compensée partiellement par une hausse de certaines taxes sur la consommation. Concrètement, la quotité de revenus exemptée d’impôt a été relevée, la tranche d’imposition de 30% de taux marginal a été supprimée et la tranche de 40% de taux marginal entre en vigueur à un montant plus élevé. Pour simplifier, une plus grande partie de vos revenus n’est pas taxée, et une partie de vos revenus qui était taxée à 30% et 40% sera désormais taxée à 25%. Automatiquement, à revenu brut équivalent, cela engendre une hausse du revenu net pour toute personne étant taxée sur son revenu. Cela engendre aussi une grosse perte de recettes pour l’État fédéral. Pour compenser, certaines taxes sur la consommation ont été augmentées, comme les accises sur l’alcool et le diesel ou encore la TVA sur l’électricité.
Un taux marginal ne s’applique que sur la tranche la plus élevée du revenu
Avant d’aller plus loin, il me semble important de revenir sur la notion souvent incomprise de « taux marginal ». Récemment, aux USA, la députée démocrate Alexandria Ocasio-Cortez a proposé un taux marginal de 70% pour les très hauts revenus. Certains se sont indignés, « c’est du vol de taxer à 70%, car on prend presque tout ». En réalité, dans sa proposition, seul le revenu au-dessus de 10 millions $ aurait été taxé à 70%. Les 10 premiers millions $ auraient été quant à eux taxés aux taux existants. Un taux marginal ne s’applique que sur la tranche la plus élevée du revenu. Dans le cadre de la Belgique, voici à quoi ressemblaient les différents taux marginaux qui étaient appliqués avant et après la suppression de la tranche de 30%, les montants mentionnés étant les revenus imposables avant impôts :
Taux marginal | Tranches 2017 | Tranches 2018 |
0% (tranche exonérée d’impôt) | 0€ – 7.270€ | 0€ – 7.730€ |
25% | 7.270€ – 11.070€ | 7.730€ – 12.990€ |
30% | 11.070€ – 12.720€ | / |
40% | 12.720€ – 21.190€ | 12.990€ – 22.290€ |
45% | 21.190€ – 38.830€ | 22.290€ – 39.660€ |
50% | 38.830€ – et plus | 39.660€ – et plus |