Aux gilets jaunes, à ceux qui les soutiennent, aux puissants qui les abusent et à tous les autres

Nous vous proposons une analyse économique, politique et sociale détaillée
des enjeux de société que l’action des « Gilets Jaunes »
propulse au-devant de la scène.
Elle est réalisée par Christian Savestre.

Face à un mouvement nourri par l’injustice fiscale et la baisse du pouvoir d’achat, les gouvernants et médias dominants ont d’abord tenté de circonscrire le mécontentement à la fiscalité dite écologique puis de le faire passer pour un rejet du consentement à l’impôt. Ils utilisent maintenant le ras-le-bol fiscal qu’ils ont provoqué chez ceux qu’ils massacrent allègrement pour expliquer la nécessité du « moins d’impôts » afin de mettre en œuvre un programme de privatisation de tous les services publics qui se traduira par encore plus d’inégalités et sans bien entendu s’attaquer le moins du monde aux problèmes majeurs de l’évasion fiscale et de l’injustice fiscale.

Enfin, avec le mépris qui les caractérise, ils ne craignent pas d’opposer le citoyen qui ne peut boucler ses fins des mois avec l’écolo qui serait le seul à se soucier de la survie de la planète : « citoyen, tu dois faire un choix : tu bouffes ou tu sauves la planète ». Et puisqu’il est toujours bon pour les puissants de diviser et de créer des leurres, ils tentent aussi d’opposer les « territoires » – qui certes doivent faire face à des problèmes spécifiques – aux métropoles, comme si injustice fiscale et baisse du pouvoir d’achat n’étaient pas présentes partout. L’incroyable déconnexion des puissants d’avec l’immense majorité de leurs concitoyens s’est traduite par la sidérante déclaration de E. Macron faite à Bruxelles (tout un symbole) il y a quelques jours : « Il n’y a pas de projet de société et il n’y a pas de projet politique – au niveau national et européen – si nous n’apportons pas de réponse claire à nos classes moyennes et à nos classes laborieuses (sic !) en matière économique, sociale et culturelle ». Parlant ainsi de 80 à 90% de ses concitoyens, il avoue que son projet politique est un programme pour « VIP » : les 10 à 20% restant.

Au mépris et à la propagande des puissants,
opposons en 13 points les réalités et nécessités suivantes :

 

1- L’évasion fiscale (fraude incluse) dépouille chaque citoyen actif français de 3.350 Euros par an, soit près de 3 mois de Smic (2,82), chaque ménage de 3.472 Euros par an. Rapportée aux 50% des ménages les plus pauvres, elle spolie chacun de ces ménages de près de 7000,00 Euros par an, soit près de 6 mois de Smic (5,85). En Belgique, elle dépouille chaque citoyen actif de 4.470 Euros à 7.170 Euros par an. Pour l’ensemble de l’Union Européenne, elle dépouille chaque citoyen actif de 4.030 Euros par an.

– l’évasion fiscale (fraude incluse) s’élève annuellement en France à 100 milliards d’euros, en Belgique elle se situe dans une fourchette comprise entre 22,5 et 36,1 milliards d’euros (par an) et pour l’ensemble de l’Union Européenne à 1000 milliards d’euros (par an).

– cela représente annuellement près de 3.350 euros par citoyen actif français, entre 4.466 et 7.165 euros par citoyen actif belge et 4.034 euros par « citoyen actif européen ».

– Pour la France, l’évasion fiscale (fraude incluse) représente rapportée au nombre de ménages (28,8 millions) 3.472 Euros par ménage (la taille moyenne d’un ménage est de 2,2 personnes).

Les 10% des ménages les plus pauvres ne disposent plus que de 212 Euros par mois, une fois qu’ils ont payé les taxes directes, indirectes et les dépenses contraintes, pour tenter de subvenir à leurs besoins vitaux (nourriture, habillement, transport, chauffage, équipement du lieu de vie, culture et loisirs). C’est 7 Euros par jour pour le ménage et 3,2 Euros par jour et par personne constituant le ménage. L’Etat qui se laisse braquer volontairement par les évadés fiscaux les empêche de pouvoir bénéficier de 3.472 Euros par an (289,33 Euros par mois) et de faire passer « leur budget de vie » à 501,33 Euros par mois, soit 16,71 Euros par jour et par ménage / 7,60 Euros par jour et par personne constituant le ménage (au lieu de 3,2 Euros).

Les 50% des ménages les plus pauvres ne disposent plus que de 963 Euros par mois, une fois qu’ils ont payé les taxes directes, indirectes et les dépenses contraintes, pour tenter de subvenir à leurs besoins vitaux (nourriture, habillement, transport, chauffage, équipement du lieu de vie, culture et loisirs). C’est 32,10 Euros par jour pour le ménage et 14,59 Euros par jour et par personne constituant le ménage. L’Etat qui se laisse braquer volontairement par les évadés fiscaux les empêche de pouvoir bénéficier de 3.472 Euros par an (289,33 Euros par mois) et de faire passer « leur budget de vie » à 1.252,33 Euros par mois, soit 41,74 Euros par jour et par ménage / 18,97 Euros par jour et par personne constituant le ménage (au lieu de 14,59 Euros).

31,68 millions de personnes voient leur vie quotidienne, dans leurs besoins les plus élémentaires à satisfaire, très sérieusement affectée dans des proportions considérables à cause de puissants qui ont décidé de tirer un trait sur le principe de « faire société » avec la complicité de celui qui a en charge de veiller à son respect absolu : E. Macron.

Et la révolte serait illégitime ? Non, triplement légitime : parce qu’il est impossible de vivre dans ces conditions, parce que l’évasion fiscale contribue fortement à générer ces conditions, parce que les gouvernants et le premier d’entre eux sont activement complices de cette évasion.

2- Ce sont les plus riches (particuliers et grandes entreprises) qui, en pratiquant l’évasion fiscale, remettent en cause le consentement à l’impôt. Celui des classes populaires et moyennes est très élevé, malgré des inégalités sans cesse croissantes et toujours plus insupportables.

-Les taxes indirectes (tva, taxes sur les produits pétroliers, l’alcool, le tabac, les assurances) payées par les 10% des ménages les moins aisés représentent près de 17% de leur revenu disponible. Ce pourcentage est de 13% pour les 50% des ménages les moins aisés et passe à 7,60% pour les 10% des ménages les plus aisés. Le plus pauvre n’échappera pas à la Tva sur la baguette de pain. Le plus riche va pouvoir échapper à la Tva sur son jet privé et sur son yacht !

– Aux taxes indirectes s’appliquant de manière identique quel que soit le revenu des personnes concernées, s’ajoutent les taxes directes : pour les particuliers, l’impôt sur le revenu, la contribution sociale de solidarité (CSG), la contribution au remboursement de la dette (CRD), la taxe d’habitation, la taxe foncière, la taxe audiovisuelle, la taxe sur les ordures ménagères etc…; pour les entreprises, l’impôt société principalement, la taxe d’apprentissage…

– Le dépenses contraintes (loyers et charges, prêts immobiliers, assurance-santé, autres assurances et frais bancaires, abonnements téléphonique et télévisuel, cantine scolaire) représentent en % du revenu disponible : 61% pour les ménages pauvres, 39% pour les ménages modestes, 32% pour les ménages de la classe moyenne et 24% pour les ménages de la classe aisée

– Le revenu disponible des ménages est la différence entre d’une part tous les revenus (salaires, revenus du patrimoine tels que loyers et dividendes perçus, prestations de retraites et allocations familiales) et d’autre part les impôts directs et cotisations sociales de toute nature (maladie, chômage, retraite). A ce stade, les impôts indirects et les dépenses contraintes restent à payer, ainsi que tous les « frais de vie » récurrents et exceptionnels.

– Impôts indirects et dépenses contraintes payées, les ménages doivent faire face à d’autres dépenses non qualifiées de contraintes mais pourtant vitales (« frais de vie »): dépenses alimentaires, d’habillement, d’hygiène, d’équipement de la maison, d’équipements divers, de transport, de loisirs, de culture…

3- Les gouvernants et leurs relais médiatiques sont de véritables démolisseurs du consentement à l’impôt.

Les tenants de l’idéologie néolibérale martèlent sans cesse l’absolue nécessité de diminuer ce que l’on appelle les prélèvements obligatoires en mélangeant confusément mais à dessein ce qui résulte d’ impôts proprement dits (directs et indirects) et ce qui résulte de cotisations sociales (maladie, vieillesse, chômage, retraite) en présentant leur volonté comme un choix de bonne gestion et ils prétendent ensuite s’inquiéter du délitement du consentement à l’impôt : le pyromane s’indigne de l’incendie qu’il a provoqué…et trompe le citoyen lambda en comparant la France avec des pays où les caisses de retraite et les mutuelles santé sont largement privatisées.

Il s’agit en fait pour eux d’une véritable stratégie : stigmatiser le niveau des prélèvements obligatoires pour ainsi provoquer un rejet de l’impôt (d’autant plus facilement qu’il est volontairement établi de manière injuste) et décider de le diminuer (en le gardant injuste) pour justifier d’une diminution des services publics et de la privatisation d’un maximum d’entre eux.

4- Emmanuel Macron symbolise l’abdication et l’active complicité des gouvernants face au pouvoir absolu de l’oligarchie financière qui a financé sa campagne. Il connaît parfaitement les grands organisateurs de l’évasion fiscale et leur passe des dizaines de millions d’euros de commandes.

S’il est un chef d’Etat qui connaît sur le bout des doigts cette oligarchie-là, c’est bien lui : il a été banquier et pas n’importe quel banquier ! Banquier d’affaires à la banque Rothschild, l’une des plus prestigieuses dans le domaine, pas à n’importe quel poste de cadre supérieur dirigeant mais bien comme associé, donc au plus haut niveau de la hiérarchie. Dans ses fonctions, il a conduit des « deals » de plusieurs dizaines de milliards d’euros impliquant plusieurs multinationales de plusieurs pays (Suisse et Etats Unis, notamment) et il a nécessairement rencontré ces grands Cabinets d’audit et de conseil (« les Big Four principalement ») pour des missions d’audit d’acquisition, de conseils fiscaux…  qui sont les industriels de l’évasion fiscale et les auteurs des ravages décrits ci-avant en quelques chiffres. Il a en outre nécessairement connu celui qui est par ailleurs commissaire aux comptes de la Banque ! S’il en est un qui est en mesure de mettre un terme à ce scandale absolu de l’évasion fiscale, c’est bien lui, de par la connaissance intime qu’il a de ces Big Four, au lieu de quoi il fait passer par son gouvernement des dizaines de millions d’euros de commandes à ces grands Cabinets qui ruinent l’Etat.

Emmanuel Macron appartient à l’oligarchie financière et c’est cette dernière qui a financé sa campagne. 913 personnes seulement en ont financé près de la moitié (6,3 millions d’euros de dons). La géographie de ces dons est saisissante : la région parisienne est certes la principale donatrice (56% du total), mais c’est Londres et le Royaume Uni (paradis fiscal par excellence, puissance financière emblématique) qui se montrent les plus macronistes après Paris ! (plus que l’ensemble des dix plus grandes villes françaises de province). Les dons en provenance de Suisse sont de 22% supérieurs à ceux de Marseille, deuxième ville de France. Quant au Liban, il contribue plus que Bordeaux et Lille réunis.

5- Les citoyens ne sont plus égaux devant l’impôt : la concurrence fiscale érigée en dogme par l’Union Européenne et résultant des Traités a créé au sein de chaque pays deux natures de contribuables : les contribuables captifs et ceux qui s’évadent. Le principe constitutionnel d’égalité devant l’impôt est bafoué.

Les gouvernements régionaux, nationaux et les  organisations internationales (Union Européenne, Commission Européenne, OCDE, FMI)  nous expliquent  qu’ils luttent contre l’évasion fiscale, mais elles ne font quasiment rien et s’en tiennent en fait le plus souvent à des opérations de communication destinées à endormir le citoyen en prétendant par exemple que les paradis fiscaux n’existent plus au sein de l’Union Européenne alors qu’elle en est truffée (pour les plus connus : Luxembourg, Pays Bas, Irlande, Belgique, Malte, Chypre, Royaume Uni…). C’est bien entendu totalement faux, comme en témoigne la santé particulièrement florissante des organisateurs de l’évasion fiscale (les Big Four) au sein de ces paradis : des dizaines de milliers de personnes dont la présence n’est pas justifiée par l’activité économique réelle de ces pays, loin de là, très loin de là !

Pour justifier les gigantesques faveurs faites aux ultra-riches et riches avec l’abolition de l’impôt sur la fortune, E. Macron nous raconte qu’il faut faire revenir les riches évadés (particuliers, multinationales et grandes entreprises). Mais pourquoi diable reviendraient-ils ? L’Union Européenne leur permet de faire leur « marché fiscal » en son sein et à l’extérieur. La Belgique illustre à merveille cette réalité : elle est un paradis fiscal et elle est pourtant victime d’une évasion fiscale importante ; tout simplement parce que, après avoir goûté aux charmes du paradis belge, les grandes entreprises et les riches particuliers, non rassasiés, vont profiter ailleurs d’autres opportunités pour diminuer davantage encore leur impôt, voire pour carrément l’annuler. L’évadé fiscal est un nomade permanent qui localise ses différentes activités et avoirs là où la fiscalité est la plus avantageuse ce qui ne l’empêche pas de garder des activités dans un pays qui n’est pas un paradis fiscal à la condition qu’elles ne génèrent que peu (ou pas) de profits afin de ne pas payer d’impôts ou le moins possible (et l’on sait que le système des prix de transfert, par exemple, permet de ne pas faire de profits là où l’on ne veut pas en faire, pour cause de taxation jugée trop importante).

Pas besoin de frauder quand on peut s’évader fiscalement. La lutte contre la fraude fiscale déclarée par les gouvernants ne concerne que les contribuables captifs (particuliers non riches et PME) et les dizaines de milliards de l’évasion fiscale des multinationales, des plus grandes entreprises, et des riches particuliers continuent eux à s’envoler sous l’œil complice de ces gouvernants pourtant en charge de faire vivre en société l’ensemble de leurs concitoyens. « There is no society » disait Margaret Thatcher.  E. Macron et les oligarques qu’il protège sont encore pire qu’elle : ils ne le disent pas, mais exécutent froidement la sentence de M. Thatcher.

6- Les traités actuels de l’Union Européenne sont incompatibles avec les actions à mettre en œuvre pour répondre à l’appel des classes populaires et moyennes et avec la guerre à conduire pour sauver la planète et éviter la guerre tout court.  

L’Europe a inscrit dans les Traités des normes extrêmement contraignantes, telles que la limite de 3% de déficit budgétaire par rapport au PIB, la surveillance au plus près de la dette…. assorties de pénalités importantes en cas de non-respect. Mais elle s’est délibérément bien gardée de fixer la moindre norme en matière fiscale (pas même la moindre recommandation), tout simplement parce que cela lui permet d’appliquer avec acharnement ses préceptes néolibéraux consistant à étrangler les services publics de toute nature.

L’Europe aurait très bien pu fixer des taux minimums d’imposition qui s’ils n’étaient pas respectés donneraient lieu à de fortes pénalités. Des taux d’imposition trop faibles, non progressifs, insuffisamment redistributeurs ; des taxes indirectes régressives constituent des alertes, au plan social mais aussi économique que l’Europe actuelle a décidé d’ignorer purement et simplement, montrant ainsi avec un cynisme sans égal que ce qui est essentiel pour maintenir le minimum de cohésion sociale lui est totalement indifférent. La Commission Européenne et chacun des chefs des Etats de l’Union participant au Conseil de l’Europe portent une gigantesque responsabilité : ils sont les premiers responsables du rejet de l’Europe actuelle auprès de nombreux citoyens.

7- Les puissants ne renoncent jamais et installent leurs pièges : moins d’impôts, moins de taxes, moins de services publics, privatisation généralisée à l’horizon (mais surtout pas de lutte contre l’injustice fiscale, ni contre l’évasion fiscale).

La conséquence inéluctable sera un accès plus coûteux aux services privatisés et un accroissement supplémentaire des inégalités.

La chronique du journaliste Jean-Michel Bezat, intitulée « Mécomptes et mécontents » et titrée « Et si le populisme prospérait aussi sur le terreau de l’inculture économique » (Le Monde du 26/11/2018) illustre jusqu’à la caricature ce que la pensée dominante promeut. Egrenant une longue litanie de points censés prouver l’inculture économique des Français, il regrette « l’absence de fonds de pension qui réduit l’incitation des salariés au succès des entreprises et fait de la France un pays capitaliste sans capital ». Penser le contraire témoignerait visiblement d’une grave inculture.

8- La propagande des gouvernants et des médias à leur botte martèle, pour calmer les revendications, que le pouvoir d’achat augmente en utilisant des statistiques d’évolution du coût de la vie  mensongères.

Le pouvoir d’achat augmente nous serinent les puissants qui font assaut de pédagogie (mot sans cesse utilisé qui témoigne d’une autre forme de mépris du citoyen lambda qui ne serait pas apte à comprendre) pour tenter de vendre une donnée statistique calculée sur une moyenne et prenant en compte des critères qui ne sont pas révélés.  S’ils avaient un peu d’humour, au moins pourraient-ils expliquer qu’un statisticien ayant la tête dans un congélateur et les pieds dans un four va conclure que la température est agréable. Oui, les riches et ultra riches qui ont, eux, le corps tout entier dans la soie voient leur pouvoir d’achat augmenter : eux et eux seuls.

Quant aux critères utilisés et non révélés, les deux exemples suivants (parmi beaucoup d’autres) montrent à quel point l’évolution de l’indice des prix est calculée de manière trompeuse:

– la part des loyers dans l’indice des prix est de 6% alors qu’elle est en réalité de plus de 30%

– la prise en compte d’un « effet qualité » pour un certain nombre de produits conduisant les organismes officiels de statistiques à calculer des prix artificiellement en baisse par rapport au prix réel ; c’est notamment le cas des biens technologiques : vous changez votre ordinateur mais celui-ci n’existe plus sur le marché, vous n’avez pas d’autre option que d’en choisir un autre plus puissant qui va  vous coûter plus cher, mais dont le statisticien officiel calculera qu’il vous coûte théoriquement moins cher compte tenu de sa puissance plus grande, sans vous expliquer comment il calcule cet effet qualité.

D’octobre 2017 à Octobre 2018, les prix ont augmenté de la manière suivante :

– Alimentation : beurre +10,9%, fruits frais +5%, légumes frais : +9%, pommes de terre : +11,2%

– Alcool et tabac : cigarettes +16,1%, vin + 2,9%,

– Energie : fioul domestique +30,4%, gazole + 22,6%, gaz +21%, essence +14,6%

– Services : cantines +1,9%, centres de vacances +3,8%, maisons de retraite +3,1%, assurances habitation +1,8%, assurances transport +3,7%

– Seuls les biens d’équipement électronique et électroménager qui ne constituent pas des biens de consommation courante évoluent à la baisse sans que le calcul de l’effet qualité évoqué ci-avant soit dévoilé.

A la lumière de ces données, les puissants ne pourront s’étonner qu’au cours de l’hiver 2017-2018, 15% des ménages ont souffert du froid chez eux et que 11,6% des français dépensent plus de 8% de leur revenu disponible pour payer leur facture énergétique. Quant à certains commentateurs de chaînes d’info en continu, ils comprendront peut-être pourquoi les fameuses « émeutes au Nutella » ont éclaté. Quant à la Cour des Comptes, toujours si prompte à conseiller des économies et à doctement expliquer comment les dépenses publiques doivent être gérées, il ne lui reste plus qu’à établir un budget de fonctionnement type pour chaque catégorie de ménage ( les 10% les moins aisés etc…) après, si possible, expérimentation de leur part pour valider leurs chiffres.

9- La violence des organisateurs de l’évasion fiscale et la révolte des gilets jaunes.

L’évasion fiscale organisée par les cols blancs des grands cabinets d’audit (les Big Four) s’effectue en utilisant des schémas se situant à l’extrême limite de la légalité et totalement illégitimes. Les dégâts qu’ils causent sont d’une violence inouïe, mortelle dans les pays en voie de développement. Les chaînes d’infos en continu passent en boucle les violences survenues ponctuellement lors des dernières manifestations de gilets jaunes mais ne disent pas un mot de ces autres violences en cols blancs (organisées, froides, systématiques, implacables) qui affectent gravement la vie quotidienne de millions de citoyens et constituent autant de violences quotidiennes. Ce ne sont pas des vitrines qu’ils cassent ces cols blancs experts en évasion fiscale mais des vies qu’ils massacrent et pour ceux qui survivent des fins de vies odieuses (les établissements pour personnes âgées dépendantes en sont une parfaite illustration).

10- La taxation des transactions financières (les enjeux sont considérables) est aussi urgente qu’absolument nécessaire : l’oligarchie financière s’y oppose.

La taxation des transactions financières est un serpent de mer dont on parle depuis plusieurs dizaines d’années sans la moindre mise en œuvre à ce jour. Comme pour la lutte contre l’évasion fiscale, les lobbys financiers sont parvenus à bloquer toutes les tentatives. Et pourtant ! La finance casino qui nous gouverne a entre autres pour conséquence de générer un volume de transactions financières électroniques absolument faramineux : en Suisse, elles représentent chaque année 150 fois le PIB et 100 fois le PIB dans la plupart des pays développés. Compte tenu des montants financiers en circulation, des taux de 0,2%, 0,5%, 1% permettraient de produire une véritable manne pour la plupart des Etats. Pour la France comme pour l’Allemagne, une taxation à 0,25% de toutes les transactions financières électroniques (y compris celles du commun des mortels utilisant sa carte de paiement) génèrerait à elle seule un montant supérieur à celui de l’ensemble des recettes fiscales actuelles (directes et indirectes) ! Les grandes banques, les fonds spéculatifs, les bourses qui génèrent la grande majorité de ces transactions s’y opposent. Une telle taxation constituerait aussi un moyen pour d’une part lutter efficacement contre l’évasion fiscale (ses processus étant complexifiés) et d’autre part percevoir beaucoup plus d’impôts auprès de ces institutions financières ; tous inconvénients majeurs pour l’oligarchie financière.

11- L’argent est là ! Financer concomitamment (l’un ne va pas sans l’autre) les deux nécessités de réduire les inégalités et de faire que la planète survive n’est pas un problème d’argent, mais un problème de solidarité qui ne se résoudra que par la prise en main de la finance par les citoyens.

Les enjeux liés à la  taxation des transactions financières, à la lutte réelle contre l’évasion fiscale prouvent que l’argent est là pour à la fois répondre aux besoins des classes populaires et  moyennes ainsi qu’aux gigantesques investissements et dépenses à engager pour mener la guerre contre le réchauffement climatique ; c‘est d’une guerre qu’il s’agit  … contre le réchauffement climatique pour en éviter une autre, celle qui se produira entre les peuples si la première n’est pas menée et gagnée. Pour qu’elle le soit, l’oligarchie financière doit être mise au pas afin que la solidarité l’emporte sur la cupidité d’une infime minorité à la puissance exorbitante.

Nicolas Hulot, dans sa première participation à une émission télévisée (après sa démission) il y a quelques jours a formulé quatre expressions : effort de guerre, norme européenne des 3% de déficit budgétaire vs PIB ne pouvant pas s’appliquer à cet effort de guerre, cruauté de la finance internationale et nécessaire solidarité ; curieusement, ces 4 points n’ont pas été repris par les médias dominants qui ont pourtant abondamment parlé de cette prestation télévisée.

Souvenons-nous du taux auquel le Président des Etats Unis Roosevelt taxait les riches contribuables pendant la deuxième guerre mondiale : la solidarité s’imposait et l’effort de guerre primait sur les règles de déficit budgétaire. Alors que l’Union Européenne devrait lancer un gigantesque programme d’investissement, elle continue à faire aveuglément prévaloir sa religion du 3% de déficit : un véritable suicide !

12- Ceux qui pensent échapper à l’impitoyable moulinette du néolibéralisme (classes moyennes supérieures notamment) se mettent le doigt dans l’œil

Pour la plupart d’entre eux, ils n’ont pas encore compris que leur intérêt est de se solidariser avec les classes moyennes et populaires car eux aussi seront au fil du temps déclassés. Les captifs, dans la logique néolibérale, finissent toujours par payer. Un tout petit exemple très éloquent : plusieurs employés de BNPP FORTIS (Belgique) bénéficiant d’une voiture de société viennent de recevoir un redressement fiscal au titre d’avantage en nature non déclaré.  Ils pensaient pourtant être à l’abri d’une telle taxation compte tenu de l’accord signé avec leur Direction. Mais non ! les captifs sont poursuivis.

13- Il n’y a pas de politique écologique possible sans éradication de l’évasion fiscale, de l’injustice fiscale et sans une forte réduction des inégalités économiques et sociales

Tout écologiste qui n’aurait pas un programme économique intégrant la nécessité absolue d’éradiquer l’évasion fiscale et l’injustice fiscale ainsi que de réduire fortement les inégalités économiques et sociales, ne peut être pris au sérieux. Cela voudrait dire qu’il n’engagera pas l’effort de guerre suffisant et qu’il fera supporter l’effort insuffisant effectué sur les seuls consommateurs captifs avec l’injustice que cela entraînera et la non solidarité qui s’ensuivra.

Christian Savestre


Sources :

– données de revenu disponible, de taxes indirectes payées par tranche de revenu disponible: site https://www.inegalites.fr/La-Tva-est-elle-juste + Insee Economie et statistiques
– données de dépenses contraintes : Le Monde Economie et Entreprise du 17/11/2018
– données mensongères sur l’évolution du coût de la vie (y compris la blague du statisticien) : Pouvoir d’achat, le Grand Mensonge. Philippe Herlin, Editions Eyrolles. Dépôt légal septembre 2018.
– données sur les augmentations de prix de produits courants  de octobre 2017 à octobre 2018 : Le Monde Economie et Entreprise du 17/11/2018
– données sur la facture énergétique hiver 2017/2018 : Libération du 28/11/2018
– données sur la taxation des transactions financières : La Crise Permanente, L’Oligarchie Financière et l’Echec de la Démocratie. Le Scandale de la Finance Casino, Les Pistes pour en sortir. Marc Chesney, Editions Quanto. Dépôt Légal Avril 2018.
– données sur la campagne Macron : JDD du 02/12/2018, Marianne du 02/12/2018
– Source de la photo de couverture: Page Facebook de Jacques Cheminade. Un grand merci pour l’autorisation.