Le rapport des services secrets américains préconise notamment l’envoi de fausses leaks à WikiLeaks, dans l’espoir qu’elle tombe dans le piège et les publie
Trois semaines à peine après la fin du procès de la banque Julius Bär, les services secrets américains émettent un document classifié secret : l’U.S. Intelligence Report on Wikileaks qui fuitera et sera publié le 18 mars 2010 par… WikiLeaks. L’organisation s’y trouve qualifiée de « menace pour la sécurité informationnelle de l’armée américaine ». Le rapport explicite la stratégie du contre-espionnage américain pour tenter de « détruire le centre de gravité de WikiLeaks et dissuader ceux qui voudraient s’y intéresser ». Il préconise notamment :
l’envoi de fausses leaks à WikiLeaks, dans l’espoir qu’elle tombe dans le piège et les publie. Ensuite, le lancement d’une campagne médiatique pour ruiner la réputation et la crédibilité de Wikileaks ;
l’identification, la divulgation, le licenciement, les poursuites pénales, les actions en justice, contre les membres de WikiLeaks et les lanceurs d’alertes.
Entre-temps, les leaks affluent de partout dans le monde vers WikiLeak
s Entre-temps, les leaks affluent de partout dans le monde vers WikiLeaks. L’équipe ne s’offre aucun répit. Le rythme des publications s’accélère. Voici un petit aperçu des publications en 2008-2009.
Le 24 mars 2008, publication des « bibles secrètes de la Scientologie» qui révèle entre autres choses, les pratiques ultra agressives de l’église à l’encontre de ses ennemis.
Septembre 2008, publication des mails de Sarah Palin qui utilise sa messagerie privée pour ses affaires politiques officieuses, afin d’éviter de devoir conserver une copie pour le public américain – ce qui serait le cas avec sa messagerie professionnelle.
À la fin de 2008, divulgation de la liste des membres du British National Party, une organisation néo-fasciste qui défend l’hégémonie de la « race blanche ».
En décembre 2008, publication d’un rapport privé de la South African Competition Commission qui dévoile les attitudes des cartels bancaires en Afrique du Sud.
En février 2009, divulgation de 6.700 rapports du Congrès américain qui révèlent aux citoyens américains le comportement de leurs élus en coulisses.
Novembre 2009 : publication des mails secrets de l’historien sympathisant nazi, David Irving.
En soutien à Julian Assange, cet article est en accès libre.
Pour faire des économies, Trafigura a finalement déversé ces résidus chimiques en Côte d’Ivoire (…) On dénombre 108.000 victimes
Parmi ces leaks, épinglons en septembre 2009, la publication du Rapport Minton, un scandale qu’on peut résumer en un seul mot : #Trafigura. C’est le nom d’une multinationale hollandaise basée à Londres et spécialisée dans le transport de pétrole et de matières premières. En 2006, Trafigura a affrété le Probo Koala, un cargo transportant des déchets toxiques vers Amsterdam en vue de leur prise en charge. Pour faire des économies, Trafigura a finalement déversé ces résidus chimiques en Côte d’Ivoire, à Abidjan, la plus grande ville d’Afrique de l’Ouest, dans plusieurs décharges qui n’étaient pas équipées pour leur traitement. La Côte d’Ivoire réagit et les dirigeants de Trafigura commandent un rapport interne,The Minton Report, afin d’évaluer la toxicité des déchets. L’idée est de contrer les accusations en minimisant la pollution. Mais ce rapport ne tire pas les conclusions que souhaiterait la firme. Au total, on dénombre 108.000 victimes, certaines décédées, d’autres intoxiquées et gravement malades. À la vue de ces chiffres accablants, l’entreprise dissimule le rapport Minton… qui remonte jusque WikiLeaks.
On qualifie d’« effet Streisand » ce phénomène par lequel la volonté d’empêcher la divulgation d’informations que l’on aimerait garder cachées déclenche le résultat inverse
Lors de la publication du Minton Report par WikiLeaks, les médias britanniques reçoivent une « injonction secrète » de leur gouvernement leur interdisant de mentionner le rapport ou son contenu. S’ensuit une bataille judiciaire menée par The Guardian et la BBC, qui comptaient le publier. Les médias perdent le procès, mais se mettent à communiquer sur l’injonction secrète et les pressions qu’ils ont subies… Et ça fait le buzz. En quelques heures, le hashtag #Trafigura est le plus twitté d’Europe. Le lendemain, les avocats cèdent et le rapport est publié (on qualifie d’« effet Streisand » ce phénomène par lequel la volonté d’empêcher la divulgation d’informations que l’on aimerait garder cachées déclenche le résultat inverse). S’ensuivra un procès retentissant… qui sera néanmoins considéré comme un cas d’école en matière d’impunité des multinationales, car Trafigura n’a jamais eu réellement à rendre compte de ses actes.
Ironiquement, cette « première agence de renseignement des citoyens » est surveillée… par l’agence de renseignement américain, qui ne la lâche plus
Ces nombreuses publications vaudront à WikiLeaks d’être qualifiée de « first Intelligence Agency of the People » dans le monde. Et ironiquement, cette « première agence de renseignement des citoyens » est surveillée… par l’agence de renseignement américain, qui ne la lâche plus.
Comment faire pour assurer une meilleure sécurité à l’équipe et à l’organisation ? Il y a bien cette idée de créer un Paradis de l’information qui taraude Julian depuis l’affaire de la banque Julius Baer…
Voilà. C’était le 13ème épisode de WANTED, la série qui vous emmène au cœur du réacteur de notre monde et vous en dévoilera les faces cachées…
Demain, nous verrons comment Julian va concevoir de manière magistrale la sécurité de WikiLeaks…
Belgium4Assange
Texte écrit par Delphine Noels,
Avec la collaboration de Marc Molitor, Pascale Vielle et Bogdan Zamfir
Le 4 janvier 2021 sera une date historique : à Londres, la justice britannique rendra son verdict dans le procès d’extradition de Julian Assange. Quels sont les enjeux de ce procès ? En quoi nous concernent-t-ils directement ? Difficile d’avoir les idées claires à ce sujet tant la mésinformation et la désinformation ont été grandes.
A partir du 1er décembre et jusqu’au 4 janvier, Belgium4Assange diffusera quotidiennement un épisode de WANTED, série Facebook qui raconte la vie de Julian Assange en 34 épisodes.
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