Mars 2021 : après un an de confinement, il est nécessaire de Faire Front contre les conséquences injustes des mesures
Il y a tout juste un an, ce foutu virus nous a confiné.
Il nous a privé d’accolades et de grandes tablées amicales, il a plongé de nombreux/ses aîné·e·s dans une immense solitude et de nombreux·ses précaires dans une encore plus grande précarité. Il a privé les adolescents et les jeunes de leurs espaces de vie et d’interactions. Il a tué beaucoup d’entre nous. Il a fait porter aux personnels des soins une énorme charge de travail, de fatigue et de tristesse, il a privé de travail et de revenus des centaines de milliers d’entre nous, poussant certain·e·s au désespoir. Le bilan de ce virus est de toute façon accablant : ce n’est pas nécessaire de chercher d’autres reproches à lui adresser !
Et pourtant, lorsque nous regardons d’un peu plus près tous ces méfaits, un élément saute aux yeux : les femmes et les mères seules, les enfants et les ados, les pensionné·e·s, les pauvres et les précaires, les personnes isolées, Ales intérimaires, les petits indépendants, les artistes, les intermittents, les migrants, les sans-papiers, les sans-domiciles, les prisonniers, les travailleuses du sexe, etc. sont frappées plus durement que les autres. Dans le même temps, les plus riches ont souvent pu tirer profit de la crise pour s’enrichir encore. Les grandes entreprises ont pu continuer à fonctionner et à engranger des profits importants. Certaines s’apprêtent à verser de généreux dividendes à leurs actionnaires.
En plus d’être sournois, contagieux, mortel, ce virus serait donc aussi sexiste et injuste ? À moins que ce virus n’ait pas d’opinions ni de préférences ou encore de responsabilités morales ; qu’il fasse simplement, bêtement, ce que les virus savent faire : proliférer partout où il le peut, sans aversion particulière contre la culture ou la démocratie, sans aucune préférence pour telle ou telle catégorie sociale.
Les choix politiques ont aggravé les inégalités et les injustices
Pourquoi a t-on mobilisé si vite 390 millions pour une compagnie aérienne, et si peu pour les plus pauvres et les plus précaires ?
Mais alors, puisque, sans le moindre doute, le confinement et l’ensemble des mesures prises ont frappé plus durement les secteurs les plus fragiles, qui est responsable ? Qui doit rendre des comptes ? Pourquoi les temples du commerce ont-ils rouvert si rapidement alors que les lieux de culture restent fermés ? Pourquoi a t-on mobilisé si vite 390 millions pour une compagnie aérienne, et si peu pour les plus pauvres et les plus précaires ? pourquoi le personnel soignant et les autres métiers essentiels n’ont-ils encore vu aucune revalorisation sérieuse venir ? Des pourquoi comme ceux-là, nous en avons des dizaines, ils nous emplissent d’une vaste colère.
Nous ne voulons plus d’une gestion de la crise qui ne considère pas les liens sociaux et la solidarité comme des valeurs essentielles. Nous ne voulons plus que la crise que nous vivons collectivement exacerbe encore les inégalités et soit assumée injustement par les publics déjà victimes d’injustices au quotidien.
Répétons-le : nous ne voulons pas non plus d’un retour à la normale, car cette « normalité néolibérale », faite d’inégalités violentes, de mondialisation insensée, de destruction des services publics, de marchandisation de la vie et de résignation à la catastrophe écologique, est aussi la source du drame que nous vivons. L’échec des politiques néolibérales menées ces 4 dernières décennies est complet. Une rupture avec ce modèle est nécessaire, urgent, et possible.
CROYEZ-VOUS QUE NOUS POUVONS VIVRE SANS VOUS ?
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En mars, les mouvements sociaux passent à l’action
Nous sommes responsables, et attentifs aux dangers de contagion, mais certainement pas résignés. Et nous comptons bien le montrer, en portant haut et fort, dans la rue et dans l’action, nos revendications légitimes qui doivent être entendues et concrétisées, par de nouveaux choix politiques.
Faire Front invite tous les groupes, collectifs et victimes individuelles de l’injustice de ces politiques et mesures discrétionnaires à rejoindre les mobilisations (voir ci-dessous l’encadré des mobilisations de mars 2021), pour que la justice et la dignité ne soient pas elles aussi tuées par le Covid.
Les mobilisations de mars 2021
Le 8 mars, le mouvement féministe a mobilisé une fois de plus des milliers de femmes partout en Belgique et dans le monde dans le cadre de la journée internationale des droits de femmes. Des grèves ainsi qu’une multitude d’actions ont eu lieu pour dénoncer les violences et les inégalités sexistes que le système patriarcal engendre au quotidien.
Le 10 mars, le mouvement des sans-papiers organise, à 19 heures, l’évènement en ligne “Sans papiers, sans droits, écrasés par la loi”. Depuis un mois déjà, des personnes en situation de séjour irrégulier occupent l’église du Béguinage au cœur de Bruxelles. L’évènement propose de revenir sur le vécu des personnes concernées et de mettre en avant qu’elles sont leurs motivations et revendications, visant à rendre enfin les politiques migratoires plus humaines et justes. L’évènement est diffusé sur facebook
Le 13 mars, le monde culturel sous la bannière de “Still Standing For Culture” organise pour la 4ème fois des actions partout dans le pays pour mettre la gestion de la crise en débat. Nous mettrons nos corps et nos voix en mouvement pour exprimer notre colère et débattre ensemble des choix politiques qui depuis maintenant un an n’ont que trop peu été débattus. Pour participer aux actions : http://www.stillstandingforculture.be/appel-du-13-mars/
Le 14 mars, deux jours avant les auditions du procès pénal engagé par des citoyen.e.s et des organisations contre les autorités belges, le mouvement “l’affaire climat” organise une journée d’action dans toute la Belgique, pour montrer que nous voulons une véritable politique de lutte contre les changements climatiques et que l’état est aujourd’hui coupable de ne pas en faire assez. Pour rejoindre les actions.
Le 15 mars, Pour la 4ème fois, les jeunes, sous la bannière de “jeunesse en lutte”, se mobilisent sur les campus contre la précarité étudiante et l’isolement. Ils organisent des rassemblements à Bruxelles, à Namur, à Louvain la Neuve et à Liège pour revendiquer un retour en présentiel ainsi que des mesures d’aides supplémentaires pour les étudiants en situation de difficultés financières. Le mouvement invite tou.te.s les jeunes, travailleur.se.s en formation, étudiant.e.s ou non, à rejoindre le mouvement, à s’organiser et à lutter ensemble. Pour plus d’information sur les rassemblements : Bruxelles ; Louvain-la-Neuve ; Liège ; Namur .
Le 21 mars, dans le cadre de la journée internationale de lutte contre le racisme, des rassemblements sont organisés partout en Belgique pour lutter contre les violences racistes et discriminatoires vécues au quotidien par les personnes racisées. C’est l’opportunité pour ces organisations et pour les collectifs de personnes racisées de dénoncer le racisme d’état et les violences policières. Les mobilisations ont pour but de dénoncer les violences structurelles présentes dans notre société. Des collectifs de personnes sans papier invitent également les manifestants à se retrouver à l’occupation de l’Église Saint-Jean-Baptiste-au-Béguinage à Bruxelles.
Plus d’infos : Mons ; Bruxelles
Les 23 et 24 mars aura lieu le procès en appel de onze personnes poursuivies depuis 2017 pour trafic d’êtres humains et participation à une organisation criminelle. Les personnes inculpées risquent jusqu’à 10 ans de prison. La plateforme #solidarity is not à crime appel à se mobiliser le 23 mars à 8 h devant le Palais de justice contre la criminalisation de la solidarité et contre ce procès qui n’a que pour seul but de terroriser les personnes migrantes et les personnes qui leur viennent en aide. Ils organisent également une cagnotte pour les frais de justice. – Plus d’infos ici : solidarityisnotacrime.org
Le 28 mars, sous la bannière de l’appel européen “European Action Coalition for the Right to Housing and to the City”, des mobilisations auront lieu à Bruxelles et dans toute l’Europe pour réaffirmer que se loger dignement est un besoin fondamental et un droit à la dignité. Et pourtant, le marché du logement montre chaque jour un peu plus sa totale incapacité à répondre à la crise du logement. En effet, en Belgique c’est plus de 45 000 ménages en attente d’un logement social, des logements insalubres payés toujours plus cher, une explosion du nombre de sans-abri dans les rues de Bruxelles, etc. Pour participer à l’action.
Le 29 mars, les syndicats organisent une journée nationale de grève pour dénoncer le gel salarial (0,4% maximum) et revendiquer : une marge indicative pour l’augmentation des salaires ; une augmentation sensible du salaire minimum et des bas salaires ; des accords pour améliorer les carrières professionnelles et les fins de carrière ; la modification de la loi injuste sur la norme salariale de 2017. Pour plus d’infos
Agir pour que toutes ces luttes se renforcent mutuellement
Toutes ces luttes sont importantes, se renforcent mutuellement et sont reliées : elles s’inscrivent en rupture avec cette logique capitaliste mortifère. Elles revendiquent, ici et maintenant, une autre gestion des risques sanitaires plus juste, plus humaine et plus solidaire ; et, pour demain matin, un autre modèle de société.
Dans l’immédiat, et sans attendre l’allègement général des mesures, il faut en rééquilibrer la charge, en considérant la culture, les liens sociaux, comme aussi importants – et davantage ! – que le commerce et le profit. Il faut également compenser intégralement les pertes de revenus des plus précaires.
Et demain, il faudra tirer les leçons des causes et des conséquences de cette catastrophe, pour amorcer un réel changement de cap. Et c’est possible ! On peut parfaitement transformer radicalement nos modes de production et de consommation, et nos relations avec les êtres humains et la nature. Il existe des alternatives simples, crédibles et immédiatement réalisables pour remettre la finance à sa juste place, pour diminuer radicalement le poids de la dette, pour sortir de l’austérité, pour refinancer les services publics et la culture, etc. Pour concrétiser ces alternatives et rompre avec l’orientation capitaliste de nos économies, au minimum deux éléments seront nécessaires : du courage politique, mais aussi et surtout un mouvement social puissant qui mette la pression sur nos représentant.e.s politiques afin qu’ils/elles œuvrent réellement en faveur des intérêts de la majorité de la population.
* Faire Front est un espace de convergence des mouvements sociaux né au début du premier confinement, qui réunit plus de 100 organisations, associations ou collectifs qui revendiquent, ensemble, une rupture démocratique, sociale et écologique !
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