Sauver les banques, oui. Taxer la finance ? Non

Parallélisme entre prétendue lutte contre l’évasion fiscale et  projet de taxation des transactions financières. On entend parler de la lutte contre l’évasion fiscale depuis plusieurs dizaines d’années. La taxation des transactions financières à grande échelle est un projet dont on parle depuis à peu près aussi longtemps. La lutte contre l’évasion fiscale est un leurre brandi par les gouvernants destiné à abuser le citoyen. Aucun résultat tangible ne peut être produit, bien au contraire; l’évasion fiscale ne cesse d’augmenter[1] et l’augmentation constante des effectifs de ses principaux organisateurs (les fameux « Big Four ») en atteste. Le projet de taxation des transactions financières est un autre leurre destiné à laisser penser aux citoyens que leurs gouvernants cherchent à maîtriser un monde financier- devenu monstre – qui leur a depuis longtemps échappé, le plus souvent avec leur complicité active.

Pour l’évasion fiscale comme pour la taxation des transactions financières, les enjeux sont considérables : des milliards de recettes fiscales évaporées pour l’une[2], des milliards de recettes fiscales avortées pour l’autre. Les adeptes de l’évasion fiscale et les combattants de la taxation des transactions financières  sont le plus souvent les mêmes.

L’évasion fiscale, pour les puissants (grandes entreprises et riches particuliers), constitue la solution pour échapper aux impôts existants. Pour eux, la meilleure des solutions est cependant celle qui consiste à ne pas avoir à y échapper en faisant en sorte que tout impôt susceptible de les  concerner  ne voit pas le jour : c’est le cas de la taxation des transactions financières qui concernerait l’ensemble des transactions et non 10 à 20% seulement des transactions comme c’est le cas dans les pays qui ont mis en place un tout petit début de taxation. En la matière, le lobbying financier en action pour faire avorter les projets de taxation des transactions financières est à la mesure de l’hypertrophie des acteurs du monde de la finance, et notamment des banques.

L’hypertrophie des banques : leurs actifs globaux en témoignent. L’expression  “too big to fail” pour qualifier les banques les plus importantes (aussi appelées banques systémiques) est quasiment passée dans le langage courant de même que celle de « too big to jail » pour ses principaux dirigeants. L’examen de certaines de leurs données financières donnent effectivement une bonne idée de leur effarante puissance qu’il est nécessaire de divulguer aux citoyens afin qu’ils puissent apprécier  le pouvoir qu’elles détiennent sur les décisions politiques qui vont influer sur leur vie quotidienne : le renflouement des banques par le citoyen /contribuable -sans contrepartie-  lors de la crise financière de 2007/2008 en est le meilleur exemple.  Trop gros pour partir en faillite, trop gros pour aller en prison : c’est bien cela qui s’est passé.

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Christian Savestre


[1] Cf les 15 dernières chroniques et vidéos sur l’évasion fiscale
[2] Cf les 15 dernières chroniques et vidéos sur l’évasion fiscale
[3] Trading Haute Fréquence (HFT : High Frequency Trading) : consiste à passer une multitude d’ordres en un temps record (de l’ordre de la milliseconde au millionième de seconde) à partir d’algorithmes et d’ordinateurs surpuissants. Les traders haute-fréquence font souvent aussi usage des services de colocation offerts par les Bourses pour installer leur service informatique au plus près et ainsi augmenter encore la vitesse d’exécution de leurs ordres. Selon l’ESMA (Autorité européenne des marchés financiers), en 2014, le trading haute fréquence représentait en Europe près de la moitié du montant total des transactions et plus de deux tiers du nombre d’ordres.
[4] Crise financière. Pourquoi les gouvernements ne font rien. Jean-Michel Naulot. Editions Seuil. (Octobre 2013)

Sources :

La crise permanente, l’oligarchie financière et l’échec de la démocratie. Le scandale de la finance casino, les pistes pour en sortir. Marc Chesnay. Editions Quanto (Avril 2018). C’est ce livre qui a permis l’écriture de cet article.

La taxation des transactions financières : une vraie bonne idée. Gunther Capelle-Blancard. Octobre2017. Revue du Conseil scientifique. AMF (Autorité des marchés financiers).