Panurge acheta une brebis et la jeta dans la mer. Les autres suivirent dans un bel ensemble entraînant leurs bergers avec elles. Tous se noyèrent.
Les brebis ont un comportement rationnel.
Le diesel est dangereux pour l’environnement et la santé : gaz à effet de serre, pollution de l’air dans les villes par les particules fines, causes de maladie et de mort, avec augmentation du coût des soins de santé… Ajoutons-y les fraudes à grande échelle de l’industrie automobile en ce qui regarde l’efficience des filtres à particules, les dommages qu’elles ont causés à la confiance des consommateurs et à la réputation de grandes marques, les coûts du rappel des véhicules… Il semble donc logique d’accroître les taxes sur ce carburant pour en décourager l’usage. Les gilets jaunes s’insurgent. Ils préfèrent respirer des particules fines.
Les gilets jaunes (et Trump) ont un comportement rationnel.
L’accroissement des accises sur le diesel et les réactions qu’il a entraînées témoignent de l’unanimité des gouvernements et des partis politiques pour oublier de « combiner les problèmes de fin de mois et de fin du monde » selon la formule pertinente de Nicolas Hulot.
Les gouvernements et les partis politiques (et Trump) ont un comportement rationnel.
L’urgence climatique est bien là. Elle est documentée, largement expliquée et ses effets sont de plus en plus visibles. Les moyens financiers, techniques et opérationnels existent, sont disponibles et mobilisables. La prise de conscience s’accélère et se généralise. Les partis verts sont convaincants. Pourtant les efforts restent beaucoup trop limités en regard de ce qu’il faut faire[1]. En Belgique, Ecolo a gagné les dernières élections communales. C’est même la raison nécessaire et suffisante pour les autres partis de taper tous ensemble sur le doigt qui montre la lune.
Les partis verts ont un comportement irrationnel.
Les autres partis (et Trump) ont un comportement rationnel.
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Alain Tihon[1]La preuve s’étale dans le soutien sans faille et absurde des gouvernements, des politiciens et des banques à l’industrie charbonnière : extraction, transport, gestionnaires de réseaux électriques, constructeurs de centrales… (cf. New York Times, Nov. 24, 2018, « The World Needs to Quit Coal. Why Is It So Hard? ».
[2]En Belgique, avec Publifin on allait voir ce qu’on allait voir … et on voit !
[3]Pour rappel, il a présidé à la révolution néolibérale en proclamant la liberté des capitaux, du commerce, la diminution des impôts et la privatisation de l’État.
[4]Bien sûr, les « petits porteurs » en bénéficient, mais ce sont avant tout les gros actionnaires, fonds de pension, assureurs, fonds spéculatifs, d’investissement… qui décident du choix de la musique.
[5]Mécanisme par lequel les décideurs passent très facilement du secteur privé au public et réciproquement et peuvent ainsi influencer les lois et règlements en faveur de leurs intérêts.
[6]Pour l’anecdote, rappelons qu’au moment même où l’État sauvait les banques de leurs erreurs à coup de milliards, celles-ci distribuaient des bonus faramineux à leurs dirigeants responsables du désastre.
[7]Dites « merci, Eurogroupe ! ».
[8]Sur ce §, voir Crashed, Adam Tooze, Les belles Lettres, novembre 2018.
[9]Rappelons brièvement que Facebook et ses semblables tirent parti des informations personnelles pour influer sur le comportement de ses utilisateurs, puis vendent cette influence aux annonceurs dans un but lucratif. C’est un écosystème mûr pour la manipulation (NYT).
[10]Voir la chronique « Une rage d’Europe » du 6/7/18.