Un moyen : les « Big Four »
Un outil : les paradis fiscaux
Une fin : le succès d’une idéologie.
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Affamer les Etats, c’est ce que font ces fameux « Big Four », plus d’un million de personnes (la troisième plus grande entreprise mondiale en termes d’effectifs) qui organisent l’évasion fiscale à l’échelle industrielle et planétaire.
Pour ce faire, ils ont besoin d’être présents dans les paradis fiscaux (l’impôt y est nul ou faible) du monde entier et d’y mobiliser des effectifs totalement dévolus à cette activité de prédation. Ils sont même présents dans les paradis fiscaux qui figurent sur les listes noires de l’Union Européenne et de l’OCDE qui ont pourtant été réduites à une peau de chagrin.
Organiser l’évasion fiscale ne constitue pas une fin en soi. La véritable armée qui s’y livre a pour mission d’assurer – avec la complicité des gouvernants – le succès d’une véritable idéologie, consistant à diminuer les recettes fiscales des Etats pour mieux justifier de diminutions drastiques des dépenses publiques permettant ainsi de livrer au secteur privé la fourniture des services publics qu’ils assuraient. Mise en œuvre aux Etats-Unis dans les années Reagan quand les fortes baisses d’impôts ont servi de justification à de drastiques baisses de dépenses publiques, elle a valu à son théoricien le plus célèbre, James McGill Buchanan, de se voir décerner le Prix Nobel d’économie en 1986. « Starve the Beast » (« affamer la bête »), telle est l’expression qui définit cette idéologie. Autre distinction pour Buchanan : Pinochet l’a invité au Chili en 1980 pour participer à l’écriture d’une nouvelle Constitution (pour Buchanan, il fallait interdire les déficits budgétaires dans les constitutions). Pour les initiés, précisons qu’il a aussi été pendant plusieurs années Président de la Société du Mont-Pèlerin, association d’économistes libéraux dont Friedrich Hayek a été le fondateur.
Décrire l’omniprésence des Big Four dans les paradis fiscaux implique de dénoncer préalablement l’absolu scandale que représentent les listes officielles de paradis fiscaux communiquées par l’Union Européenne (U.E) et l’OCDE. L’U.E en retient sept (Bahamas, Guam, Palaos, Saint-Christophe- et- Niévès, Samoa, les Samoa Américaines , Trinidad et Tobaggo, la Namibie ayant été retirée de la liste récemment) et l’OCDE un (Trinidad & Tobaggo). Rien de tel, en effet, que de nier leur existence pour tenter d’étouffer un scandale dont les citoyens du monde entier prennent de plus en plus conscience. Les ONG et autres associations qui se battent depuis des dizaines d’années contre l’évasion fiscale sont heureusement là pour rétablir la vérité, une vérité que les extrémistes défenseurs du « pas d’impôt » établissent sur leurs sites Internet en énumérant près d’une centaine de paradis fiscaux ( Etats proprement dits ou dépendances telles que, par exemple, celles de la Couronne Britannique).
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Christian Savestre