Menaces climatiques : surtout, ne rien changer ?

Depuis septembre 2018, la Belgique est le siège des mobilisations d’un nombre croissant de citoyens qui s’inquiètent, à juste titre, des dérèglements climatiques dont ils commencent à observer les effets. À ce jour, les grèves scolaires des jeunes et leurs marches hebdomadaires sont les plus médiatisées. Dans leurs messages, ces jeunes adjurent les « responsables » politiques de prendre enfin les mesures à même de « sauver la planète ». Nous voudrions ici inventorier les réponses que les décideurs leur opposent pour dire, entre les lignes, à tous ceux qui se manifestent : « Rentrez chez vous, tout va aller très bien, Mme la marquise ».

Nous ne parlerons pas ici de ceux, de plus en plus rares, qui osent encore dire que le changement climatique n’existe pas et que c’est une infox ou un complot ourdi par (au choix) les Russes, les Chinois, les écologistes déclinistes… Face aux arguments probants du GIEC, des collectifs de chercheurs, de médecins ou de gardes-forestiers…, les climato-sceptiques la mettent en sourdine ces derniers temps, du moins en Belgique.

« On fait tout ce qui est possible. »

Une première réponse dilatoire face aux revendications de la rue est de dire que l’on a déjà fait et que l’on fera tout ce qui est possible. Cette attitude est plutôt celle des responsables politiques qui sont actuellement au pouvoir. Ainsi, une action appelée Wake up your ministers (« Réveillez vos ministres ») a été lancée par l’association ActForClimateJustice : elle demandait à chacun d’interpeller les 4 ministres responsables de l’environnement en Belgique par sms, mails ou coups de téléphone. Ayant envoyé un courriel à nos édiles, j’ai reçu des réponses des ministres Crucke (Wallonie) et Frémault (Bruxelles). Dans chaque cas de longues listes d’actions réalisées ou projetées, parfois sympathiques mais plutôt  cosmétiques et, hélas, majoritairement centrées sur des réponses technologiques. Tout va devenir intelligent (smart) dans nos sociétés, depuis les poubelles jusqu’aux villes, sauf… les humains. Un résultat spectaculaire et amusant de cette action : la ministre flamande de l’environnement, troublée et devenue insomniaque suite à de nombreuses interpellations, a disjoncté et inventé devant un parterre d’agriculteurs industriels que la Sûreté de l’État lui avait révélé que toutes ces mobilisations pour protéger le climat étaient inspirées d’un méchant complot subversif. Mensonge a révélé ladite Sûreté nationale et démission obligée de la ministre…

« La technologie va nous sauver ! »

Le mythe qui anime l’Occident depuis trois siècles est celui du progrès technico-scientifique. Alors que tout montre que ce programme a atteint ses limites et, comme l’a montré Ivan Illich, est devenu contreproductif à cause de ses excès. Il est dès lors la première cause des menaces ces qui pèsent sur l’équilibre des écosystèmes. Malgré tout, certains veulent nous administrer encore plus du poison qui nous rend malades (et pas à doses homéopathiques…). Géo-ingénierie (saupoudrer l’atmosphère de particules diverses qui arrêteraient les rayons solaires), capture du CO2 de l’atmosphère (par des procédés encore à inventer au niveau industriel), relance de la production d’électricité nucléaire… Nos apprentis-sorciers ne savent quoi imaginer pour repousser encore ce qu’ils refusent obstinément : arrêter la fuite en avant productiviste. Plutôt que de rechercher encore et toujours des moyens d’éponger l’eau qui déborde de la baignoire trop pleine, pourquoi refusent-ils de fermer le robinet qui coule à flots ?

 « Arrêtez de vouloir punir. »

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Alain Adriaens