Mazan : Nous n’en avons pas fini avec le patriarcat

Le 19 novembre, Gisèle Pelicot dénonçait une «société machiste et patriarcale qui banalise le viol». Dominique Pelicot, lui, reconnaissait avoir voulu «soumettre une femme insoumise». Le verdict du 19 décembre à Avignon distingue ce «monstre pervers» des «violeurs ordinaires». Pourtant, le viol par soumission chimique est toujours un refus du consentement, en réaction contre le désir d’égalité.

Nous n’en avons pas fini avec le patriarcat. C’est la leçon première de l’affaire de Mazan. Pendant une décennie, un mari a drogué son épouse de toujours pour se filmer en train de la violer et de la faire violer par des inconnus, dont cinquante sont jugés avec lui. « C’est sa femme, il fait ce qu’il veut avec sa femme », déclare un accusé pendant l’enquête. Le patriarcat, ce n’est pas seulement la violence, symbolique et physique, que subissent les femmes ; c’est aussi la complicité entre les hommes qui se les partagent, les recettes de médicaments qu’ils échangent, leur connivence dans l’injure sexiste, les attouchements homoérotiques qui leur donnent du cœur à l’ouvrage et les images qu’ils font circuler en guise d’invitation ou de souvenir.

 

Eric Fassin

Enseignant-chercheur, sociologue


J’ai publié le 25 octobre ce texte sur le site du Nouvel Obs sous le titre : « La soumission chimique, punition des femmes insoumises ». La déclaration de Dominique Pelicot le 19 novembre en confirmait l’hypothèse centrale. Je le reprends aujourd’hui sur mon blog à l’occasion du verdict.

Je viens également de donner un entretien le 17 décembre à France 24, ici en ligne.


Source https://blogs.mediapart.fr/eric-fassin/blog/191224/mazan-nous-n-en-avons-pas-fini-avec-le-patriarcat

Article publié par l’auteur sur son blog sur Médiapart et sur le Nouvel Observateur.
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A VOIR.
●”#MeToo et la justice : après le choc Mazan, en finir avec la culture du viol ?”, sur YouTube, débat de Médiapart, en accès libre.
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A LIRE l’interview de Denis Salas, ancien magistrat, professeur, enseignant associé à  l’Ecole Nationale de Magistrature, sur Actu-Juridique, 12 décembre 2024, en accès libre,
● ” Viols de Mazan : ce procès suggère moins une nouvelle définition du viol qu’une nouvelle manière de juger le viol”.