Les constats opérationnels

Chapitre V

V.1.Quelques constats opérationnels par pays[1].

V.1.1 Irlande

Le partnership de droit irlandais est utilisé comme point de relais avec des offshores localisées des paradis fiscaux (800 partnerships domiciliés à une même adresse à Dublin).

V.1.2 Pays-Bas

Une société hollandaise fournisseur de prête-noms, déjà identifiée dans le LEAK PANAMA PAPERS, est de nouveau identifiée dans le LEAK PANDORA PAPERS.

V.1.3 USA

Ce qui expliquerait un des intérêts du FBI à l’acquisition des documents du LEAK PANAMA PAPERS
Le LEAK PANDORA PAPERS identifie 206 trusts de droit US liés à des sociétés holdings dans 41 pays, dont 30 trusts liés à des personnes ou sociétés impliquées dans des dossiers de fraude. Depuis 1990, une dizaine d’Etats USA (Dakota du Sud, Texas, Floride, Alaska, Nevada, New Hampshire, Delaware) ont créé ou renforcé des législations de trusts spécialisés, sans réelle opposition parlementaire (le plus souvent par relais ou à l’initiative de parlementaires d’Etats fédérés liés à la droite du Parti Républicain ou au Tea Party). Selon le LEAK PANDORA PAPERS, 191 trusts sont clairement identifiés pour créer ce secret sur l’identité des bénéficiaires et les mouvements financiers. Un tel phénomène était déjà présent dans les documents du LEAK PANAMA PAPERS, mis en évidence par une relecture des documents via des outils logiciels et un nouveau « mapping » territorial.

Ce qui expliquerait un des intérêts du FBI à l’acquisition des documents du LEAK PANAMA PAPERS, un autre intérêt étant une présence plus importante de nationaux américains mise en évidence par la relecture via des outils logiciels.

V.1.4 Colombie

L’actuel Directeur de l’Administration fiscale colombienne est identifié comme détenteur d’ offshores dans le LEAK PANDORA PAPERS.
Le Ministre des Finances de Colombie au moment du LEAK PANAMA PAPERS est identifié comme détenteur d’offshores dans le LEAK PANDORA PAPERS.

L’actuel Directeur de l’Administration fiscale colombienne est identifié comme détenteur d’ offshores dans le LEAK PANDORA PAPERS.

V.1.5 Mexique

L’analyse croisée des adresses de domicile et de résidence des bénéficiaires mexicains d’offshores montre une concentration de ces bénéficiaires dans des quartiers et « resorts » privatifs à haut potentiel de revenus et de patrimoine, connectés avec de forts taux de votes électoraux pour le parti Conservateur mexicain.

V.1.6 Argentine

L’intermédiaire argentin, surnommé « le blanchisseur du Kirchnerisme » pour son rôle central dans le blanchiment des produits de la corruption dans les contrats publics en Argentine, en aveux partiels, déjà identifié dans le LEAK PANAMA PAPERS, est également identifié dans le LEAK PANDORA PAPERS.

La Chambre des Représentants d’Argentine vient de voter son inculpation pénale, malgré son statut de repenti partiel.

Il s’agit de la plateforme montrant le plus de liens avec la criminalité classique
V.1.7 Emirats arabes unis

Il s’agit de la plateforme montrant le plus de liens avec la criminalité classique.

V.1.8 Luxembourg

100.000 documents, soit trois fois plus de documents que dans le cas de la Belgique, n’ont pas été analysés, l’ICIJ n’ayant aucun correspondant au Luxembourg.
100.000 documents ayant une occurrence avec le Luxembourg se trouvent dans le LEAK PANDORA  PAPERS, soit trois fois plus de documents que dans le cas de la Belgique, et n’ont pas été analysés, l’ICIJ n’ayant aucun correspondant au Luxembourg.

V.1.9 Belgique

Selon les données fournies à Knack par les porte-paroles du SPF Finances, 322 biens immeubles sont identifiés comme détenus par des offshores localisées dans des paradis fiscaux.

Soit notamment :

  • Iles Vierges Britanniques, 25 entités pour 59 biens ;
  • Panama , 18 entités pour 117 biens ;
  • Monaco, 16 entités pour 40 biens ;
  • Chypre, 12 entités pour 23 biens ;
  • Liberia, 6 entités pour 8 biens ;
  • EAU[2], 5 entités pour 15 biens.

Hors les pays cités, aucune information n’a été donnée par le SPF Finances quant aux paradis fiscaux retenus pour établir la liste.

Également, il faut supposer qu’il s’agit d’un lien de propriété directe et que ne seraient pas identifiés les liens de propriété indirecte (une offshore localisée dans un paradis fiscal qui contrôle une chaîne de sociétés localisées dans des pays non- paradis fiscaux qui détiennent des propriétés immobilières en Belgique).

 

V.2.Quelques 14 constats quant au cadre normatif OCDE, quant au cadre règlementaire UE et quant au cadre légal et règlementaire belge.

Rôle essentiel des intermédiaires non financiers, notamment les avocats, dans la mise au point et la gestion des mécanismes d’offshorisation fiscale, du fait de la protection que leur accorde leur secret professionnel
V.2..1 Au niveau international, européen et belge.

1) Rôle essentiel des intermédiaires non financiers, notamment les avocats, dans la mise au point et la gestion des mécanismes d’offshorisation fiscale, du fait de la protection que leur accorde leur secret professionnel. Cette responsabilité est soulignée par plusieurs universitaires de renom, tels Rogen Palan, professeur à City Université de Londres en économie politique internationale, Ricardo Soares de Oliveira, professeur à Oxford et spécialiste des questions extractives et minières, Marc Tasse, professeur à l’Université d’Ottawa et ancien Directeur du Département Forensic de Deloitte CANADA.

 

Absence de liste internationale des paradis fiscaux pour particuliers
V.2.2 Au niveau international et européen.

2)Absence de liste internationale des paradis fiscaux pour particuliers.

3)Liste européenne des paradis fiscaux inconsistante, notamment ne distinguant pas entre paradis fiscaux pour particuliers et paradis fiscaux pour entreprises.

4)Cadre mondial et européen de communication des informations encore incomplet.

5)Il n’apparait pas que les dossiers des LEAKS aient fait l’objet d’un intérêt particulier au niveau de  l’Association des Pays du Benelux, qui dispose d’une commission fiscale, fréquentée par des représentants, politiques et administratifs, des 3 Etats membres.

 

V.2.3 Au niveau de l’Etat Fédéral belge.

6)Liste belge des paradis fiscaux pour lesquels les sociétés doivent communiquer les versements au -dessus de 100.000 euros incomplète.

L’Arrêté Royal (AR) relatif à la catégorie des paradis fiscaux territoriaux (territoires dans lesquels les sociétés se livrant à des  activités  économiques domestiques sont soumises à un impôt des sociétés normal, les sociétés se livrant à des activités extraterritoriales étant soumises à un impôt des sociétés au taux zéro, par exemple, Panama, Liban, Hong Kong,…), à publier depuis 2016, n’a toujours pas été publié.

7)Absence de mécanisme légal obligeant les particuliers belges et résidents fiscaux en Belgique à communiquer chaque année leurs versements dans des paradis fiscaux.

8)Absence de taxation au départ des particuliers belges vers une autre résidence fiscale    contrairement à d’autres Etats européens tels Pays Bas, France ou UK.

9)Absence en Belgique de service fiscal spécifiquement dédié à la gestion des dossiers et à la vérification et au contrôle approfondi de manière permanente de la situation fiscale des grands  particuliers[3].

10)Délai de prescription fiscale trop court et insuffisamment prolongé contrairement à d’autres Etats européens.

11)Absence de stockage systématique par l’Administration fiscale belge des données relatives aux  phénomènes offshore et aux divers LEAKS, documentés ou pas par l’ICIJ.

12)Absence de reconnaissance préalable de culpabilité en cas de transaction pénale en matière de  fraude fiscale ou financière, et en matière de blanchiment.

13)Absence de dispositif légal autorisant l’achat de données volées.

 

V.2.4 Au niveau de l’Etat Fédéral belge et des 3 Régions.

14)Absence de remise en question de la position doctrinale qui empêche d’inclure à l’actif net d’une succession l’actif net d’un trust, sauf rares exceptions.

Victor Serge,
Pseudonyme

[1] Sources, presse nationale et internationale.

[2] Vous pourrez retrouver la signification de tous les acronymes dans le tableau des acronymes ci-dessous.

[3] Recommandation de l’OCDE. Existe en France, UK, Espagne notamment. Refus de mise en place en Belgique par l’ex-Ministre des Finances NVA Johan Van Overtfeld, adepte de la théorie du ruissellement. « Le premier canal de ruissellement de la richesse des riches n’est-il pas qu’ils contribuent et paient les impôts légalement prévus et légalement mis en place, y compris si ce sont de nouveaux impôts », selon un milliardaire américain, classé parmi les plus grandes fortunes mondiales ?

Tableau de acronymes

AEOI, Automatic Exchange of Information, acronyme anglais pour Echange automatique d’information.

AR : Arrêté Royal.

BEPS : Base Erosion and Profit Shifting (acronyme anglais pour érosion de la base d’imposition et transfert de bénéfices). Plan de 15 actions visant à doter les pays des outils nécessaires pour garantir l’imposition là où la valeur est créée et offrant un cadre prévisible pour les entreprises.

BKA : Bundeskriminalamt, Office Fédéral de Police Criminelle (Allemagne).

BND : Bundesnachrichtendienst, service de renseignement extérieur du gouvernement fédéral allemand, placé sous la tutelle de la Chancellerie.

CFC : dispositif CFC = règles relatives aux sociétés étrangères contrôlées (SEC ou CFC) visant à éviter le transfert des bénéfices de la société mère établie dans un pays à fiscalité élevée vers des filiales contrôlées situées dans des pays à fiscalité faible ou nulle afin de réduire la charge fiscale du groupe, et autorisant la reprise de ces transferts de bénéfices   dans la base imposable de la maison mère.

CTIF : Cellule de Traitement des Informations Financières créée en 1993, au cœur du dispositif belge préventif de lutte contre le blanchiment d’argent d’origine criminelle et le financement du terrorisme. La CTIF est une autorité administrative indépendante, ayant la personnalité juridique et sous le contrôle des Ministres de la Justice et des Finances.

DGI : Direction Générale des Impôts (France).

DGFIP : Direction Générale des Finances Publiques (France), a succédé après réunion de la DGI et de l’Administration des Comptes Publics.

EAU : Emirats Arabes Unis.

EOIR : Exchange of Information on Request (acronyme anglais pour norme internationale pour la transparence et l’échange d’informations sur demande).

FATCA : Foreign Accourt Tax Compliance Act. Il s’agit d’une réglementation extraterritoriale américaine en vigueur depuis le 1er juillet 2014 visant à identifier et déclarer les contribuables américains de la part des institutions financières auprès de l’administration fiscale américaine. Le FATCA existe sous 2 Modèles et sous forme d’IGA.

FIOD : Service Néerlandais de Renseignement et d’Enquête Judiciaire, dans les domaines économique, fiscal et douanier. Le FIOD dépend de l’Administration fiscale hollandaise et dispose de pouvoirs de perquisition et d’audition dans les formes judiciaires. Un service de nature équivalente existe en matière sociale, le SIOD.

GAFAM : Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft.

GAFI : Groupe d’Action Financière ou Financial Action Task Force, organisme intergouvernemental de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Le GAFI est un organisme distinct de l’OCDE. En effet, tous les États membres de l’OCDE ne sont pas membres du GAFI, et réciproquement.

ICIJ : Le Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) (International Consortium of Investigative Journalists, en anglais) est une organisation à but non lucratif basée à Washington D.C. Il associe 600 journalistes d’investigation de plus de 100 pays et travaille en partenariat avec plus de 100 organisations médiatiques, depuis les médias les plus renommés au monde, comme la BBC, le New York Times, le Guardian, la BBC, le Monde, le Washington Post.

ISI : Inspection Spéciale des Impôts. L’ISI a pour mission de combattre la fraude fiscale grave et organisée. (Belgique) Contrairement a son équivalent hollandais FIOD et a certains de ses equivalents dans d’autres Etats, l’ISI ne dispose pas de pouvoirs d’investigation dans les formes judiciaires.

ISOC ou Impôt des Sociétés.

LGT ou Liechtenstein Global Trust.

MROS ou Money Laundering Reporting Office – Switzerland,   Le Bureau de communication en matière de blanchiment d’argent auprès de l’Office fédéral de la police (Fed Pol) joue un rôle de relais et de filtre entre les intermédiaires financiers et les autorités de poursuite pénale. Il est l’équivalent du CTIF en Belgique.

OCDE : Organisation de Coopération et de Développement Economiques.

OCDEFO : Office central de la lutte contre la délinquance économique et financière organisée (Belgique). Un des Offices centraux de la Police Fédérale Belge.

ONIF : Oficina Nacional de Investigación del Fraude (Espagne). Service d’enquêtes fiscales spécialisé de l’Administration fiscale espagnole.

QPE : Question Parlementaire Ecrite.

TAXUD : Taxation & Customs Union, Direction Générale de la Fiscalité et des Douanes de l’Union (Direction Générale de la Commission Européenne).

TIEAS : Tax Information Exchange Agreements, accords sur l’échange de renseignements en matière fiscale, instruments  élaborés par l’OCDE et mis en œuvre bilatéralement par 2 Etats.

TPI : Tribunal de Première Instance.