Un débat de fond est ouvert et il faut s’en réjouir, il n’y en a pas tellement au sein de la gauche. L’article « Ecolo, le capitalisme et la gauche »[1] que j’avais publié en mai dernier a suscité différentes réactions dont la principale est la réponse que m’a adressée Jean De Munck[2]. J’ai souligné l’aspect constructif et respectueux[3] de cette réponse qui permet la poursuite d’un dialogue tenant compte à la fois des points de rencontre non négligeables et des divergences parfois profondes.[4] À mon tour, donc, de revenir sur un certain nombre de critiques et de propositions exprimées par Jean De Munck.
Mais il faut d’abord pointer que le cadre de nos argumentations n’est pas identique. Dans ma contribution je questionnais les ambiguïtés d’Ecolo – en tant que formation politique se revendiquant de l’écologie politique – tant vis-à-vis du clivage gauche/droite que de son positionnement à propos du capitalisme. De Munck me répond d’emblée et comme position de principe que « le mouvement écologiste a déjà choisi son camp. Il se situe structurellement dans le camp de la gauche anticapitaliste, plus profondément encore que la gauche classique, y compris radicale. » Diable ! Je ne doute pas de la sincérité des convictions de Jean De Munck ni de celle d’un certain nombre de militant e s écologistes qui pourraient partager ce point de vue, mais jamais cette affirmation n’est sortie – et ne sortira – de la bouche d’un dirigeant écolo. Notre ami commun Henri Goldman – récent candidat d’ouverture sur les listes Ecolo à Bruxelles – qui dit partager pour l’essentiel l’argumentation de Jean De Munck notait à ce propos que « ce n’est absolument pas le positionnement rhétorique d’Ecolo, mal à l’aise avec “la gauche” et encore plus avec “l’anticapitalisme” ».[5] Or, c’est bien là précisément que se situait l’essentiel de mes questionnements et de mes doutes. La « cible » de nos propos n’est donc pas exactement la même, ce qui en modifie la portée, mais naturellement ne m’empêchera pas de poursuivre le débat qui implique donc clairement des militants ou des sympathisants, mais pas directement l’organisation dont ils se réclament peu ou prou.
La centralité de l’égalité
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Hugues Le Paige
[1] https://www.revuepolitique.be/blog-notes/ecolo-le-capitalisme-et-la-gauche/ .
[2] « Les écologistes et l’anticapitalisme. Une réponse à Hugues Le Paige » sur le site de Pour le 12 juin 2019 :https://pour.press/les-ecologistes-et-lanticapitalisme-une-reponse-a-hugues-le-paige/ .
[3] En dépit de cette pratique fréquente — à la fois agaçante et un peu dérisoire — chez les tenants de l’écologie politique de (dis) qualifier les interlocuteurs issus de la gauche historique « d’hommes (ou de femmes) du XXe siècle » et ignorants « de la pensée des 30 dernières années ». Se revendiquer des « Lumières » ne fait pas de vous un homme du XVIIe siècle…
[4] Mon premier article se situait dans le cadre de la campagne électorale, mais le propos était bien plus large. J’indiquais mon engagement en faveur du PTB que je confirme, mais mon analyse est indépendante de ce choix partisan même si les valeurs défendues sous-tendent l’un et l’autre.
[5] https://www.facebook.com/henri.goldman .
[6] Souligné par nous.
[7] ibidem
[8] https://www.lemonde.fr/politique/article/2019/06/08/thomas-piketty-l-illusion-de-l-ecologie-centriste_5473422_823448.html
[9] Le Soir du 14 juin 2016 : « Ecolo et MR au top dans les communes les plus riches ».
[10] Si l’on veut se familiariser avec la pensée de Gramsci, je vous recommande un excellent ouvrage synthétique : Guerre de mouvement et guerre de position, Textes choisis et présentés par Razmig Keucheyan. La Fabrique, Paris, 2012, 338 pages, 17€. Ramzgi Keucheyan est également l’auteur d’un intéressai « essai d’Écologie politique », La nature est un champ de bataille, La Découverte, 2014.
[11] Comme BNP Paribas Fortis, Unilever ou EDF Luminus
[12] Le Soir, 19/06/2019
[13] Idéologie développée aux États-Unis dans les années 80 par la psychologue Carol Gilligan et la philosophe Joan Tronto et dont la dimension féministe était un élément important. Transmise en France par la philosophe Fabienne Brugère qui joua un rôle important dans l’adoption très éphémère du care sur le plan politique par Martine Aubry en 2010.
[14] L’auteur fait ici allusion à lune certaine production romanesque française qu’il reprend à son compte.
[15] Question de « dater » le point de vue.