Le porno vu par les féministes: libérateur ou oppressif?

Le porno est-il synonyme d’émancipation ou d’oppression? Une question qui fait débat au sein des cercles féministes depuis des décennies et à laquelle il n’a pas encore été possible d’apporter une réponse claire et univoque. Les Plats Pays n’y font pas exception.

«Porn is the theory, rape is the practice» (La pornographie c’est la théorie, en pratique c’est du viol), écrivait l’activiste et journaliste nord-américaine Robin Morgan en 1980. Une expression récupérée par de nombreux groupes d’activistes féministes, y compris dans les Plats Pays. Celles-ci s’inquiétaient de la multiplication du nombre d’images sexuelles montrant les femmes dans des positions d’infériorité, voire dégradantes. Depuis la fin des années 1960, l’attitude de la société envers la pornographie avait en effet changé dans de nombreux pays. Aux Pays-Bas, la pornographie a été retirée du Code pénal en 1979. En Belgique, où la diffusion du porno était considérée comme un outrage public aux bonnes mœurs, la justice se montrait de plus en plus laxiste en matière de poursuites.

Par conséquent, en 1980, un groupe de femmes, les Vrouwen tegen porno (Femmes contre le porno), prenait d’assaut le cinéma pour adultes Le Paris de Nimègue –la première salle de cinéma pornographique non-stop qui venait d’ouvrir dans cette ville de province. Cette protestation violente s’est soldée par l’arrestation des manifestantes. L’action en justice qui s’est ensuivi, pour saccage et violence publique, a été largement relayée par les médias et les féministes ont su tirer intelligemment parti de ce podium improvisé pour faire valoir leur point de vue sur la pornographie. Tout comme Robin Morgan et Andrea Dworkin, autre théoricienne nord-américaine du mouvement féministe, de nombreuses féministes dans les Plats Pays considéraient le porno comme discriminant, dégradant et oppressant. De l’abus de pouvoir, mis en scène et filmé, qu’il fallait interdire.

Liberté de déterminer sa propre sexualité

Interdire le porno? Peu de féministes se risqueraient encore aujourd’hui à une telle revendication. Vers la fin du XXe siècle, la plupart des organisations de la deuxième vague se sont désagrégées. Conformément à l’esprit de l’époque, les féministes deviennent de plus en plus individualistes: s’épanouir soi-même pleinement devient le nouvel objectif fondamental, ce qui inclut de développer sa sexualité. On entre dans l’ère du féminisme sex-positive. Comme le formule la journaliste et féministe nord-américaine Ellen Willis: «Ce que nous avons pu constater, c’est que l’affirmation “la pornographie, c’est de la violence contre les femmes” masquait en réalité l’idée néo-victorienne selon laquelle seuls les hommes veulent du sexe, les femmes ne font que le subir».

Pour lire la suite : https://www.les-plats-pays.com/article/le-porno-vu-par-les-feministes/

 

Heleen Debruyne,
traduit par Alice Mevis, 25 octobre 2023.

.
Publication partielle autorisée par Les Plats Pays.
A LIRE, sur POUR, en accès libre.
■”Crimes de l’industrie pornographique, les faits doivent être jugés dans leur intégralité”, Osez le féminisme, 30 octobre 2024.
.
A LIRE, en accès libre.
■Sur le site du Mouvement Le Nid.
●”Sous nos regards, récits de la violence pornographique”, Comité de rédaction de la revue du Nid, 10 avril 2025.
■Sur le site de Médiapart.
●”Affaires French Bukkake et Jacquie et Michel : Dans ces vidéos, on nous a complètement déshumanisées”, A l’air libre, 10 avril 2025, contient une vidéo avec les témoignages de 5 plaignantes.