En Kanaky, la terre est le sang des morts

La question calédonienne est une question coloniale, et le colonialisme est une violence : né dans la violence, prolongé par la violence, enfantant la violence. Rappel, professionnellement vécu, par un retour aux sources du processus de décolonisation ouvert par Michel Rocard en 1988 et fermé par Emmanuel Macron en 2021.

L’amnésie politique et médiatique qui règne sur l’histoire récente de la Nouvelle-Calédonie m’a incité à écrire ce billet, en accompagnement de la couverture par Mediapart de l’actualité de ce territoire. Dans une récente vidéo de Brut, fort pertinente au demeurant, même Pascal Blanchard, pourtant spécialisé dans l’histoire critique du colonialisme français, s’en tient à des généralités sur l’origine de la crise actuelle, au point de relativiser l’aveuglement du pouvoir macroniste alors qu’il repose sur l’oubli, voire la négation, de quelques vérités historiques (lire cette analyse d’Ellen Salvi).

Reprenons, en invitant lectrices et lecteurs (abonnez-vous !) à visiter tous les articles de Mediapart qui témoignent de l’engagement collectif de notre rédaction sur cette question où se joue notre relation au monde et aux autres. Ils sont en partie réunis dans ce dossier où vous retrouverez notamment une série de reportages de Carine Fouteau, dont on peut lire aussi cette récente analyse, ainsi qu’un récit historique de Lucie Delaporte sur le projet colonial en Nouvelle-Calédonie.

Tout part de l’année 1988 (du moins pour la séquence récente car, sinon, tout commence en 1853 avec la prise de possession par la France). La cohabitation de deux années entre François Mitterrand, président de la République élu à gauche, et Jacques Chirac, premier ministre tenant de la droite, arrive à son terme dont l’élection présidentielle est l’échéance. Or leur duel électoral franco-français fera aux antipodes un martyr, le peuple kanak, renvoyé aux pires heures de la violence coloniale.