La bienveillance, ce mot-là était omniprésent durant la campagne présidentielle de Macron en 2017. Il était bien souvent associé au mot gouvernance. Fallait-il être sourd pour ne pas entendre la litanie « d’une nouvelle gouvernance pour un nouveau monde » ! Rajoutant à cela une pincée « d’empowerment » , l’on obtenait un cocktail qui ne pouvait être que rassembleur (24% des suffrages exprimés et 18% des inscrits).
Ce cocktail-là, c’est celui qui prévaut aussi chez les grands organisateurs de l’évasion fiscale (les Big Four : Deloitte, PwC, EY, KPMG) qui, à défaut de chercher l’adhésion des citoyens d’un pays, doivent impérativement emporter l’adhésion de leurs employés pour ainsi créer un sentiment d’appartenance aussi puissant que possible. On a déjà vu combien le formatage des esprits constituait une arme essentielle pour maintenir une communauté de plus de quatre millions de personnes (augmentant chaque année de plus de 7%) en situation de « pensée unique », mais le recours intensif aux concepts de bienveillance, de gouvernance (bonne ! nécessairement) et « d’empowerment » constituent autant d’ingrédients d’accompagnement pour garder vivace le formatage opéré. Il faut en effet être en mesure de résister continûment aux incessantes accusations de piller les Etats !!!
Rappelons brièvement le contenu de ces trois concepts.
La bienveillance repose en principe sur l’idée que l’univers politique est celui du commun ou tout au moins de la poursuite du commun, ce qui présuppose l’absence d’une délimitation entre amis et ennemis.
La notion de gouvernance a d’abord été développée pour l’entreprise et en son sein. Etendue au domaine politique, « la rhétorique de la gouvernance vise à légitimer politiquement l’entreprise et sa contribution à la formation d’une stabilité de l’économie et de la finance globalisées » (1).
« L’empowerment », dans son acception néolibérale, consiste à « étendre et disséminer à la politique sociale et à toutes les institutions les valeurs de marché » (2). Il s’agit d’être « entrepreneur de sa propre vie », de conduire rationnellement son existence, de faire des choix sans pour autant que la question de l’émancipation et de la justice sociale soit posée. « Tout au plus est évoquée celle de l’accès aux opportunités, sans remises en cause des inégalités sociales° » (3). Le modèle managérial le définit comme « la délégation de l’autonomie de la gestion des tâches » ; cette autonomie est cependant exercée en lien étroit avec le management à qui il revient de coacher l’équipe, déterminer le contenu et les limites de l’autonomie, fixer les normes de productivité et les objectifs de production à atteindre. Il s’agit d’un pouvoir octroyé avec obligation de s’en servir pour être plus performants (4).
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Christian Savestre
(1) Thierry Pouch
(2) Dardot et Laval / Bacqué et Biewener
(3) Bacqué et Biewener
(4) Spreitzer