L’écologie, un sport de combat ?

Tout le monde le dit, depuis le GIEC jusqu’aux médias dominants, en passant par les partis traditionnels : si nous ne voulons pas menacer la survie de notre civilisation, il faut modifier en profondeur notre agriculture, notre alimentation, nos manières de nous déplacer, nos consommations excessives… Et pourtant, à part demander aux citoyens de poser, sur base volontaire, de sympathiques écogestes, quasi rien ne change. Pour la 5ème fois, ceux qui réfléchissent aux causes politiques et sociétales des comportements suicidaires de ceux qui prétendent diriger le monde se réunissent pour définir ce qu’implique une « écologie de combat ».

C’est depuis de longues années que des militants rouges foncés et verts vifs[1] œuvrent ensemble pour définir ce qu’il conviendrait de faire pour affronter les deux défis majeurs auxquels sont confrontées nos sociétés : les dérèglements écologiques (et pas seulement climatiques) et la crise sociale qui ne fait que s’aggraver. Souvent, cette manière de relier des problèmes trop souvent disjoints a été nommée écosocialisme.

Aujourd’hui, ils ne sont de moins en moins seuls à considérer que toutes ces crises ont une seule et même cause : les excès dus à la religion économique qui domine le monde sous la forme du capitalisme néolibéral. Sans oser aller jusqu’à oser nommer cette source unique de malheurs pourtant évitables, des partis traditionnels commencent à réaliser la nécessité de la convergence des luttes et des idées et ils ont récemment illustré cette tendance sous le joli nom de coquelicot…

Aller plus loin, plus vite

Mais les options politiques qui semblent émerger de ce rapprochement semblent encore bien timides et empêtrées dans les aléas de la politique politicienne. Plus que jamais mobilisés, les écosocialistes de la première heure remettent leurs ouvrages sur le métier, en tenant compte de l’accélération des menaces.

Ce sont l’association écosocialiste d’action et d’éducation populaire À Contre Courant, le mouvement politique des Objecteurs de Croissance et l’Association culturelle Joseph Jacquemotte, qui organisent la rencontre 2019 dans le gîte les cent fontaines à Modave, les 23, 24 et 25 août, sous le titre « Pour une écologie de combat ». Lisons quels sont les objectifs qu’ils annoncent.

POUR UNE ÉCOLOGIE DE COMBAT

Dérèglements climatiques, fonte des glaces, 6ème extinction massive des espèces, destruction des écosystèmes, raréfaction des ressources naturelles, pollutions en tous genres… Ce sombre tableau, nous le connaissons bien désormais.

Mais l’entreprise de domination et d’exploitation capitaliste s’étend également à la totalité de nos êtres, usant nos corps par le travail, nous abrutissant par le divertissement, gangrenant nos cerveaux par la propagande, volant notre sommeil et nos rêves, nous poussant sans cesse à surconsommer, perturbant nos organismes, arrachant des mains ou crevant des yeux…

Militant·e·s de tous bords, gilets jaunes, jeunes pour le climat, nous avons compris l’urgence de rompre avec ce système délétère. Mais la classe dominante reste désespérément aveugle et sourde aux tourments du monde et à nos cris de colère, obnubilée par l’idéologie de la croissance et du profit maximum, fut-ce au prix de la survie de notre propre espèce. Nous n’obtenons pour seules réponses que mépris, démonstrations de force, destruction effrénée des services publics, fuite en avant productiviste, écologie culpabilisante, technocratique ou discriminante.

Face à ce vieux monde vacillant, nous refusons les fausses réponses écologistes des réactionnaires de tous poils, du big business, de la science toute-puissante, du repli sur soi ou des gourous. À la barbarie promise par l’extrême-droite, les fascismes et le néolibéralisme, nous opposons la bienveillance, la créativité et la solidarité. Nous portons la conviction qu’un autre monde est possible, que nous pouvons déconstruire le capitalisme en nous et changer de cap collectivement, faire société à nouveau.

Le temps est venu de reconquérir les territoires perdus, les droits spoliés, les esprits égarés, de ralentir, de revenir à l’essentiel. Centimètre par centimètre, action après action, mot par mot. En avant !

Deux journées bien remplies

On le voit, les organisateurs sont ambitieux et le programme correspond bien aux problématiques qu’il convient d’affronter avec détermination. Ainsi, il est prévu des plénières qui aborderont des sujets tels que « La vie quotidienne à l’ère du changement climatique: enjeux et luttes à mener », « Quelle lutte des classes en 2020 ? », de nombreux ateliers débattront de : « La transition écologique cubaine comme inspiration? », « Démocratie et territoires », « Numérisation, robotisation et transhumanisme », « Quels outils pour l’écosocialisme? » ou de très pratiques comme « Discuter avec son beauf », « Désobéissance civile », « Écriture théâtrale » « Zéro déchet, cuisine, cosmétiques, savons et détergents »… Il devrait quand même rester du temps pour l’informel, les repas (conviviaux et cohérents avec les valeurs défendues) ; il y aura aussi la projection du récent film « J’veux du soleil » de François Ruffin et Gilles Perret qui ont rencontré les gilets jaunes au cœur de leurs luttes. Les journées se termineront par ce qu’ils appellent un « agenda militant » car l’automne promet d’être chaud, et pas seulement sur le plan du climat.

Ceux qui voudraient dormir sur place ne doivent plus tarder à s’inscrire car, avec un tel programme, on peut penser que nombreux seront ceux qui voudront participer.

Alain Adriaens


[1] Cette année, il y aura même une touche de jaune au programme, avec la présence de quelques amis aux gilets de la même couleur. Cela n’implique pas que, comme pour les majorités politiques en gestation, la rencontre se du drapeau de la douzaine de pays se réclamant du panafricanisme ou du rastafarisme…