On remarque que le site de la Sablière de Schoppach, qui est le territoire qui nous intéresse ici, se retrouve par exemple au sein de tout un ensemble imbriqué d’entités administratives et géographiques.
Comme par exemple le continent Européen/l’Union Européenne, la Région Wallonne et la province du Luxembourg/la Lorraine belge, la Commune et la ville d’Arlon/le Pays d’Arlon et le Massif du bois de Stockem. Parmi toutes ces entités, se pose alors la question, plus particulièrement dans le cadre de cet article, de savoir quelles sont les influences, sur notre zone d’intérêt, des différentes entités administratives et autres institutions dont elle fait partie. Dans quelles proportions ces institutions vont-elles influer sur le devenir de territoires particuliers ? Tout en se posant la question, à l’inverse, de l’influence que ces territoires, leurs positions et les enjeux qui y sont liés peuvent avoir sur ces entités politiques.
Une situation géo-politique
Pour parler d’un territoire, on peut parler de ses sols, de la vie qui y prend place, de ses affectations ou des gens qui y évoluent. Cependant, il faut aussi prendre en compte sa situation, géographique et politique. On pourrait parler de situation géo-politiquePrenant le terme « géopolitique » dans le sens d’une « science humaine » qui analyse, étudie les conséquences et les effets des politiques internationales et des relations internationales sur la géographie (et inversement).
Reprenons, dans la liste ci-dessus, la première institution qui semble avoir une influence plus ou moins importante et directe sur le territoire qu’est le site de la Sablière : la Région Wallonne.
La Région : Région Wallonne
La Région Wallonne, créée en 1970, fait partie de l’état fédéral de Belgique avec ses consœurs que sont la Région Flamande et la Région de Bruxelles Capitale. Les compétences qui dépendent de la Région Wallonne, selon Wallonie.be, actuellement sont, entre autres : l’aménagement du territoire, les travaux publics, les transports, la mobilité, l’énergie, les pouvoirs locaux, les infrastructures sportives, le tourisme, l’environnement, l’eau, l’agriculture, la rénovation rurale, la conservation de la nature. La Région Wallonne est composée du Service public de Wallonie (SPW), qui en constitue son administration et qui est subdivisée en différentes compétences. Certaines d’entre elles concernent directement le territoire.
Le « SPW Territoire, Logement, Patrimoine et Énergie » comprend, entre autres, le « Département de l’Aménagement du territoire et de l’Urbanisme ». C’est ici, au niveau de la Région, que sont définis et contrôlés les affectations des territoires. Dans le « Code Wallon de l’Aménagement du Territoire, de l’Urbanisme (du Patrimoine et de l’Energie – Décret du 19 avril 2007, art. 2)Le CWATUPE* est remplacé, depuis 2017, par le CoDT (Code du Développement Territorial), qui en constitue son évolution. » on peut lire que : « l’aménagement du territoire de la Région wallonne, des régions, secteurs et communes est fixé par les plans. Cet aménagement est conçu tant au point de vue économique, social et esthétique que dans le but de conserver intactes les beautés naturelles de la Région wallonne. »
La Région joue un rôle déterminant dans la planification et la gestion des territoires notamment par le « plan de secteur » qui définit assez précisément des zones et leurs affectations en Wallonie.
Au niveau du « SPW Intérieur et Action Sociale », par exemple, on retrouve le « Département des Politiques publiques locales » qui, selon Wallonie.be, « contribue au développement effectif de la bonne gouvernance et de la démocratie au niveau local », et « garantie une gestion légale et transparente des affaires publiques locales, en particulier, en termes de fonctionnement des pouvoirs locaux, de gestion des ressources humaines, de marchés publics, de leur patrimoine, de patrimoine funéraire, de participation citoyenne. »
Le « SPW Agriculture, Ressources naturelles et Environnement » quant à lui, contient entre autres « l’Observatoire de la Faune, de la Flore et des Habitats » qui, d’après environnement.wallonie.be, est responsable de la qualification de sites spécifiques sous l’appellation SGIB (Site de Grand Intérêt Biologique). On retrouvera, au sein du même SPW, le « Département de la Nature et des Forêts » (DNF). Celui-ci « élabore, met en œuvre et assure le suivi des politiques et réglementations en matière de forêts, de conservation de la nature, des parcs naturels, de la chasse, et de la pêche », « il contrôle le respect de ces politiques et réglementations », ou encore « gère les forêts publiques et les réserves naturelles domaniales », toujours selon Wallonie.be.
Il ressort que la Région Wallonne est dotée de nombreux départements en rapport avec le territoire. On y retrouve des organismes à la source de l’aménagement et l’organisation du territoire ou plutôt de contrôle, de défense et de préservation de l’environnement, de la biodiversité, des citoyens. C’est à ce niveau que la Région Wallonne est intrinsèquement liée au site de la Sablière de Schoppach et a une influence certaine sur le devenir de celui-ci.
Dans un premier temps, le site est intégré et qualifié dans le plan de secteur en tant que ZACCe (Zone d’Aménagement Communal Concerté économique), ce qui va permettre d’envisager la constitution d’un projet économique sur ce lieu. Ensuite, une partie du site est intégrée à l’inventaire des SGIB. Avec cela le site de la Sablière va gagner plus de reconnaissance et d’intérêt quant à sa biodiversité et ses biotopes particuliers. Une autre partie de ce site définie comme Zone Forestière est mise sous la protection et la gestion du DNF*. Zone forestière qui, dans le projet envisagé sur le site de la Sablière, deviendrait une réserve domaniale avec l’accord et sous la gestion du DNF également.
Dans le cadre des différents permis -d’urbanisme et autres-, c’est également des Régions que dépendent les structures de type intercommunalesSelon l’article 2, § 1er du « Décret 26.3.2014 portant assentiment à l’accord de coopération entre la Région flamande, la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale relatif aux intercommunales interrégionales ». En effet, Idelux qui est propriétaire du site de la Sablière dépend, au niveau du droit applicable, de la Région Wallonne. C’est notamment suite à l’approbation par le DNF de la demande de défrichement du site par Idelux que le site va être déforesté. (Voir annexe 3)
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En ce qui concerne la demande de permis de déboisementIl faut ici une précision quant au terme de déboisement, à différencier de celui de défrichement. Déboisement peut être défini comme « l’enlèvement définitif d’arbres. La zone déboisée est destinée à ne plus être couverte d’arbres par la suite (…) » (Doc. parl. wal., (session 2007 – 2008), 2008, n° 408 (2007-2008) 1) », selon le Ministre Antoine (2008). Alors que le défrichement d’une zone peut-être assimilé à un abatage des arbres, mais sans pour autant modifier l’affectation future du site. du site, elle a été accordé par le « Département Aménagement du Territoire et de l’Urbanisme. » (Voir annexe 4) Ces accords sont cependant contestés entre autres par l’introduction d’un recours en annulation au Conseil d’État par l’ObsE, contre les différentes institutions concernées. À ce moment-là, c’est donc au niveau de l’État belge qu’une annulation contre les décisions prises et les permis accordés peut être tentée, avec la possibilité, si ces recours sont réfutés, d’aller jusqu’à introduire un recours à l’Europe.
Parlons de la ville d’Arlon. Cette ville se situe dans le sud de la Wallonie en Lorraine belge, juste en dessous du massif forestier ardennais dans un environnement plutôt naturel. Elle se situe également à quelques kilomètres seulement de la frontière luxembourgeoise. Depuis quelques années maintenant, le Luxembourg provoque une telle attraction vers son territoire pour les résidents belges -que ce soit pour le travail ou les achats non taxés-, que les communes limitrophes le ressentent très fortement.
Arlon est donc reliée à ce pôle plus important qui est celui du Grand-duché et de nombreuses personnes viennent s’y installer, avec pour but de se rapprocher du Luxembourg où ils travaillent. Cela entraîne des conséquences à double tranchant.
D’une part, plus de personnes viennent s’installer dans la région, avec souvent plus de moyens financiers dus à la rémunération avantageuse du Grand-duché du Luxembourg. Cela permet plus d’investissements et de dynamisme dans la région et la ville.
D’un autre côté, selon le journal Luxemburger Wort, cette arrivée massive de nouveaux résidents entraîne une forte demande de logements, souvent hors centre-ville.
Ce sont en effet des maisons unifamiliales, quatre façades pour la plupart, et hors centre-ville qui sont construites, entraînant une urbanisation intensive de terrains naturels, mais aussi une augmentation des prix des habitations et des terrains.
Ce processus a lieu au détriment des habitants « historiques » de la région ou de la ville d’Arlon qui, avec ces augmentations de prix, ne sont plus capables d’assurer la possession d’un bien voir sa location, comme nous indique le classement par la Région Wallonne de la commune d’Arlon en tant que Zone d’Initiative Privilégiée de type ISelon le Géoportail de Wallonie, les ZIP I sont des « zones de forte pression foncière ou immobilière qui correspondent à des communes où cette pression est telle que les couches modestes et moyennes de la population ne peuvent s’y loger ».. De plus, l’attraction importante de la ville de Luxembourg entraîne une désertification du centre-ville d’Arlon où de plus en plus de commerces ferment au cours des années, ce qui fait de la ville un endroit où la vie disparait peu à peu, diminuant alors en attractivité.
Au niveau politique, la commune d’Arlon émet, entre autres, comme objectifs « la transition écologique et énergétique [est] une réelle priorité », « la commune d’Arlon et l’ensemble de ses citoyens doivent devenir des acteurs de cette indispensable transition écologique et énergétique. Il faut aller vers un mode de vie respectueux des limites de son environnement, développant la coopération et l’entraide. »
Le site de la Sablière de Schoppach appartenait à la ville d’Arlon jusqu’en 2017. Celle-ci vend alors le terrain à Idelux, ce qui permet à ceux-ci l’élaboration d’un projet sur le site. Bien que, comme nous l’avons vu, l’intercommunale dépend de la Région Wallonne au niveau de la délivrance des permis, c’est à la commune d’Arlon d’accompagner, par la mise en place des consultations citoyennes et enquêtes publiques qui y sont liées, les permis d’urbanismes relatifs au projet qui est censé prendre place sur le site -comme pour tout projet qui prend place sur sa commune, selon l’obligation définie par le CoDT.
C’est le service urbanistique communal arlonais qui a lancé l’enquête publique concernant la demande de permis de déboisement du site, ou celle concernant l’installation de la station service CNG (Gaz Naturel Comprimé). C’est également elle qui met à disposition la consultation des documents relatifs à ces demandes. À échelle communale donc, et dans de nombreux cas -hors intercommunales-, c’est de cette administration que les permis d’urbanisme émanentSelon la « Fiche d’information théorique et pratique – Aménagement du territoire et urbanisme | n° 6 » de la fédération inter-environnement Wallonie. comme, par exemple, celui concernant le projet du Golf d’Arlon et d’autres permis de lotissements et d’écoquartiers.
Au sein des administrations communales, sont aussi présentes des « commissions ». « Ces commissions sont l’un des moyens par lesquels la Région ou la Commune concrétise le principe de participation des citoyens. Elles permettent à ceux-ci de s’investir de façon constructive dans la vie de leur Commune ou de la Région. Elles sont aussi un lieu d’échanges entre personnes représentant des intérêts différents et parfois opposés : monde économique, associations d’environnement, représentants du tourisme ou de l’agriculture…Fédération inter-environnement Wallonie, 2008, p.3»
Cependant, il est important de souligner que ces commissions n’ont qu’un rôle consultatif, et ne font pas droit.
Sont donc mis en place, au niveau des institutions communales, des organismes de contrôle qui ont pour but de réguler les décisions des institutions, et des organismes de participation qui ont pour but d’impliquer les citoyens.
Parlons maintenant d’Idelux, intercommunale active principalement en province du Luxembourg. Cette entreprise a été créée en 1962 dans le but, pour reprendre leurs propres mots, d’« assurer – dans le cadre de nos métiers – un plus grand bien-être des habitants de nos territoires d’action ».
Le but de l’intercommunale était, dans un premier temps, d’attirer des industries dans la province du Luxembourg encore fortement rurale à cette époque, en l’équipant des espaces et infrastructures utiles à cela. Ils vont se concentrer au fur et à mesure sur le développement économique de la province : création de parcs d’activités économiques, de zones d’artisanat, de zones de proximités aux communes pour l’installation d’industries, d’entreprises et de commerces sur ces lieux. La Province du Luxembourg, de laquelle dépend en partie Idelux, écrit d’ailleurs sur son site web : « Sans la Province, et l’intercommunale dont elle est le bailleur de fonds, Idelux, que serait-il advenu de notre développement économique ? »
De nombreux sites et parc d’activités de la région peuvent être attribués à Idelux, déjà réalisés ou en cours de développements : Weyler et Weyler-Hondelange, Arlon-Centre, Arlon-Sterpenich, ou Arlon-Schoppach, l’extension de ce dernier (sur le site de la Sablière) et l’extension du Wex à Marche-en-Famenne.
Au fur et à mesure de leur développement, l’intercommunale va dégager une dimension environnementale et de développement durable dans leurs projets. Ils mettent en avant, depuis quelques années, plusieurs principes tels que : « [gérer] de façon optimale les eaux de pluie afin de limiter les risques d’inondation et d’alimenter les nappes phréatiques », « [construire] dans la cadre d’une plus grande participation citoyenne », « [viser] une utilisation optimale du foncier », « [optimaliser] la gestion des terres pour éviter les transports vers des sites de remblais », ou encore « la conception de projets au sein de réseaux écologiques existants et favorise la biodiversité », comme on peut le lire sur leur site internet.
En 2017, l’Intercommunale acquiert le site de la Sablière de Schoppach qui appartenait à la Ville d’Arlon. En mars-avril 2021, avec l’accord du DNF, ils rasent le site pourtant classé par la Région wallonne comme SGIB. Depuis, ils mettent peu à peu en place le projet sur le site, en commençant par l’installation d’une station-service de type CNG fin 2021.
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