Depuis des années, toutes les alarmes sont déclenchées : la Terre se réchauffe, on va à la catastrophe. À présent, même les lycéens sortent dans les rues pour le crier. Ce 15 mars, une journée de manifestations nationales et internationales est prévue. Il semble qu’on ait dépassé un cap. Cette fois, il faut prendre des mesures sérieuses. A l’échelle de la planète. On ne peut plus attendre. Tout le monde doit s’y mettre. Oui, mais pour faire quoi ? D’accord, un incendie ravage. Il faut éteindre le feu. Et réparer les dégâts. Et puis c’est tout ? Après la vie reprend son cours ?
Ne pas s’arrêter au seul symptôme
Je vais défendre une idée fondamentale : le réchauffement climatique n’est qu’un symptôme. Grave, sans aucun doute. Mais ce n’est qu’un signal spectaculaire parmi d’autres. Quelque chose de plus sérieux est en jeu. Si on s’attaque au désastre climatique « et puis c’est tout », on court un double risque :
- celui de ne traiter qu’un symptôme en laissant intact des maux qui resurgiront inévitablement, sous d’autres formes, plus tard ;
- celui plus inquiétant d’éventuellement contribuer à aggraver ces maux, à les doter d’une puissance dévastatrice qu’ils n’avaient pas forcément.
Avant d’en venir au fait, rappelons ce qu’est ce péril climatique. Parce qu’il est vraiment préoccupant. Du fait des activités humaines, la température s’est réchauffée de plus de 1°C en moins d’un siècle. On prévoit qu’elle se réchauffera encore sans doute de 1 ou 2°C d’ici 20 ou 30 ans, peut-être davantage. 2 ou 3 petits degrés, cela semble anecdotique mais, passé le cap de 2°C, les saisons et climats sont profondément reconfigurés (sécheresses, canicules, pénuries d’eau, cyclones, inondations, montée des eaux marines…). Il semble surtout que les cycles naturels seront alors à ce point perturbés qu’ils contribueront eux-mêmes à aggraver les effets de serre et le réchauffement. On craint un processus d’emballement aux formes et conséquences imprévisibles. De vastes régions de la Terre deviendront simplement inhabitables tandis qu’ailleurs la vie humaine sera sérieusement perturbée et incertaine. Bref, la planète deviendra inhospitalière pour l’humanité, en tout cas pour la grande partie des 7 ou 8 milliards d’hommes et de femmes qui y vivent aujourd’hui.
La solution, chacun maintenant la connaît : des sociétés humaines Zéro CO2 à l’échelle de la planète[1]. Au plus tard en 2050. Pour arriver à un tel résultat, des mesures politiques et des changements radicaux dans les comportements collectifs et individuels sont inévitables, entend-t-on. Certains, non sans raison, y voient une opportunité de refonder nos économies sur d’autres métiers et de nouvelles activités. Produire l’alimentation autrement et inévitablement manger autrement et autre chose. De nouvelles énergies, renouvelables et bien sûr Zéro CO2. D’autres véhicules et donc une autre mobilité. D’autres sortes de villes et de vie urbaine, dès lors, une nouvelle ruralité, bref une géographie humaine inédite. D’autres loisirs aussi, tant individuels que collectifs. Travailler autrement, davantage en équipe, collaborativement et sobrement. Et puis, on ne cesse de nous en parler, de nouvelles technologies, de nouvelles machines et surtout de nouveaux rapports aux machines qui devraient sous peu rentrer dans nos corps. Pour notre pus grand bien. Dit-on.
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Philippe De Leener
[1]– Le CO2 mais aussi les autres gaz à effet de serre, notamment le méthane et les radicaux sulfites dont on parle moins et qui pourtant doivent inquiéter.
[2] Je renvoie ici aux chroniques inspirantes de Guy Bajoit dans ce même journal POUR.
[3] Bauman, Z., La vie liquide. Paris, Editions Hachette, Collection Pluriel, 2013.
[4]– Le lecteur impatient lira utilement notre ouvrage (De Leener, P. & Totté M. Transitions économiques. Pour en finir avec les alternatives dérisoires, Vulaines-Sur-Seine (France), Editions Le Croquant, 2018.