La commune de Namur a ouvert ce 9 juin une enquête publique concernant le réaménagement du square Léopold. Jusqu’au 7 juillet, tous les citoyens, namurois ou non, sont invités à donner leur avis. C’est peut-être la dernière étape avant le démarrage des tronçonneuses et autres bétonneuses.
Des arbres centenaires
L’espace Léopold est cet îlot de verdure qui se trouve devant le C&A, à gauche lorsque l’on sort de la gare, le seul espace vert du centre-ville. Il abrite des arbres centenaires et offre un havre de fraîcheur aux habitants ainsi qu’un précieux refuge pour la biodiversité. Parmi ces arbres, on note la présence d’ormes, des survivants en quelque sorte puisque cette espèce d’arbre a quasiment disparu suite à la graphiose de l’orme. Aujourd’hui ce parc est malheureusement laissé à l’abandon, un bon argument pour ceux qui veulent sa destruction.
Le réaménagement de l’espace Léopold est une saga qui dure depuis plus de 10 ans. Le projet de centre commercial, soutenu par la ville mais fortement contesté par ses habitants, a changé plusieurs fois de forme et de promoteur. Sa dernière version est consultable.
Le coup de grâce au centre-ville
Le but affiché était d’éviter la construction d’un « shopping center » à l’extérieur de la ville et de « redynamiser » le centre-ville. Comme si le seul moyen d’animer une ville était de multiplier les commerces : en général les centres commerciaux ont pour effet de vider les commerces des centres villes qui deviennent alors vides et tristes. Avec la crise du Covid, beaucoup d’enseignes ont déjà fermé. La construction d’un nouveau « quartier Léopold » pourrait bien donner le coup de grâce au centre-ville réputé si accueillant et convivial.
Un projet démesuré.
Une véritable forteresse
La société Besix a présenté son plan : « Le Côté Verre », qui suppose la destruction du parc avec l’abattage de tous les arbres (sauf un !). Les bâtiments devraient comporter 18.000m² de commerces, 2000m² d’Horeca, 10.000m² de bureaux, 11.600m² de logements et un parking souterrain de 800 à 900 places. Le tout sur une hauteur de 8 étages ! La plupart des bâtiments à Namur ne font pas plus de 4 étages de hauteur. C’est une véritable forteresse qui va se dresser devant les habitants. Curieusement, les plans de Besix sont presque toujours présentés d’un point de vue élevé, ainsi on ne se rend pas compte de la hauteur réelle des édifices.
Privatisation de l’espace public.
En 2012, la ville de Namur a cédé le terrain du parc Léopold pour 3,5 millions d’€ à la société LCV (Le Côté Verre) sous forme d’emphytéose (+1000€ par an), sans aucune condition et sans jamais prendre en compte l’intérêt social et écologique de ce parc. LCV a introduit maintenant un programme de construction de tout un quartier privé. Ce projet réduit l’espace public à la portion congrue : des trottoirs et quelques terrasses.
Et la démocratie dans tout ça ?
Dès le début, la majorité MR-CDH-Ecolo de la commune de Namur s’est complètement inféodée aux intérêts de l’acquéreur privé et piétine allègrement toute objection ou alternative venant de ses propres citoyens.
De plus, elle a trompé les namurois en leur faisant croire qu’ils avaient leur mot à dire, alors que l’accord d’emphytéose laissait au promoteur privé les mains complètement libres. Voir l’article de Pierre Dulieu : « Comment les namurois se font entuber »
L’opposition ne désarme pas.
En 2015, une consultation populaire a mobilisé une grande partie des namurois (21.900 personnes soit 24 % des habitants habilités à voter). Malgré l’implication de la ville qui n’a pas hésité à tordre les questions et à dépenser de l’argent pour convaincre, le résultat a montré qu’une majorité des habitants était contre ce projet de centre commercial.
Plusieurs collectifs se sont rejoints pour la défense des arbres et du parc : Collectif Parc Léopold, l’ASBL Ramur et beaucoup d’autres. Au fil des ans, les opposants ont acquis une solide expertise en matière juridique, politique et d’aménagement du territoire. Ils ont même construit un projet alternatif. Cette alternative réduit l’ampleur du projet et permet de sauver deux arbres sur trois.
Tout n’est pas perdu !
Le projet Besix est en contradiction avec le plan de secteur qui place le parc Léopold en zone d’intérêt public. C’est pour cela qu’a été lancée l’enquête publique de PRU (Périmètre de Remembrement Urbain) permettant à tous les citoyens de faire part de leur avis sur ce projet. Ensuite, ce PRU devra être approuvé par le Conseil communal puis par le gouvernement wallon.
L’ASBL Ramur propose à ceux qui veulent s’opposer à ce méga projet de réagir avant le 7 juillet, soit en écrivant directement au bourgmestre et aux échevins, soit en complétant une lettre type dans laquelle sont repris les différents arguments que chacun peut cocher selon son opinion.
Anne De Muelenaere