La concurrence est rude entre la grande distribution et ceux qui essaient de développer des commerces de proximité qui vendent des produits sains et en circuits courts.
Chez POUR, nous avons décidé d’étudier ce secteur comme annoncé dans l’article « Produire, vendre et consommer la nourriture autrement ». Dans ce cadre, nous vous proposons cette semaine un témoignage sur la difficulté de survivre dans la logique de compétition généralisée quand on développe un projet dans un contexte individuel ou familial.
Dans la rue des Croisiers, au centre de Namur, Céline Dandois gère un magasin de « bio-bien-être ». Une aventure de 2 ans que, pourtant, elle va arrêter ! Tranche de vie d’une jeune trentenaire qui veut concilier harmonieusement ses idéaux et sa vie professionnelle.
Un master en informatique suivi de 4 ans de recherche à l’université ne satisfont pas Céline. Elle se lance dans des études de bijouterie-joaillerie pour devenir artisane. Mais lors des stages, elle réalise qu’elle n’a pas envie de pratiquer ce métier où elle ne retrouve pas ses valeurs qui tournent autour d’une prise de conscience environnementale.
« Je mangeais bio et local, j’étais cliente d’une épicerie bio où l’épicière était à la fois herboriste et thérapeute. Mais lorsqu’elle a voulu remettre son commerce, j’ai compris que se présentait une belle opportunité. J’étais en recherche, j’avais envie d’être indépendante. Par chance, l’épicière et son fils qui travaillait avec elle, ont accepté de rester dans le magasin et de m’apprendre le métier. J’ai repris l’épicerie en 2016 avec pour objectif de la relancer et j’ai créé ma société SPRL To Be Oh.
Tout était nouveau pour moi. La transmission pouvait se faire petit à petit. En parallèle, j’ai repris le boulot d’informaticienne à l’université mais dans le domaine de l’éducation. À l’épicerie, je faisais ce qui est administratif mais la gestion quotidienne, c’était Sital et son fils. Quand mon contrat s’est terminé au bout d’un an à l’université, j’ai décidé de m’investir davantage dans la boutique qui est devenue mon projet principal. J’ai appris à gérer la caisse, les stock en magasin, passer les commandes aux fournisseurs. Sital se centrait sur le bien-être et le soin. »
L’envers du décor
Céline a trouvé plaisant de se retrouver de l’autre côté du comptoir. Elle a été impressionnée par l’étendue de la gamme des différents produits. C’était difficile au début car elle avait tout à apprendre dans différents domaines du bio et du local. Du frais à l’épicerie en passant par l’entretien de la maison, la décoration, les soins de beauté pour le corps et même du vrac dont le beurre de karité qu’on ne trouve pas partout. De plus, dans l’optique zéro déchet, elle opta pour différents objets de remplacement comme le wrapi (coton imprégné de cire d’abeille) qui remplace le film alimentaire, les serviette hygiéniques et lavables et autres trouvailles pour entretenir une maison et bien se porter sans polluer la planète. D’ailleurs elle est récompensée de son effort car les clients lui font remarquer combien la boutique sent bon les essences et, en confiance, participent au mouvement en amenant les sachets utilisés, les boîtes à œufs et surtout échangent leurs trucs, astuces et recettes de santé. Plus qu’une épicerie, To Be Oh est un lieu de bien être et de participation collective, d’échange d’idées… « C’est cette chaleureuse simplicité le cœur de la boutique », confie Céline.
Une annonce sur Facebook
Le 1er octobre, Céline surprend ses fans sur les réseaux sociaux. « Après une longue réflexion et après avoir envisagé plusieurs possibilités, nous avons pris la décision de fermer le magasin. » Nous, c’est Sital et elle qui ont travaillé étroitement. Stupéfaction. Ce n’est pas une question de rentabilité mais d’épuisement. « Nous n’avons aujourd’hui plus l’énergie nécessaire pour porter ce projet et continuer à le faire grandir », explique Céline. Et en effet, Mathias, le fils de Sital est parti vers d’autres cieux en avril et Sital l’herboriste, qui est l’image de la boutique avec son expérience de 25 ans de conseil, est en arrêt maladie. Céline continue seule, avec l’aide de Marie-Pascale qui vient un jour par semaine. C’est d’autant plus dommage que To Be Oh est le seul magasin bio dans le centre de Namur. « J’ai envie de passer à autre chose, dit Céline. J’ai arrêté les commandes, sauf les produits frais. Il y a un énorme potentiel dans cette boutique. Mais il faut travailler sur la visibilité du magasin, changer son éclairage. On n’a plus l’énergie qu’on avait au début. »
Pas de succession prévue ?
Que va devenir la boutique ? Si quelqu’un veut reprendre le commerce, Céline lui ouvre les bras. Mais elle ne se voit pas à chercher quelqu’un qui voudrait continuer la partie. Elle se situe dans la démarche de liquider rapidement et non de céder. Quel est son projet personnel ? La jeune femme de 31 ans ne sait pas du tout ce qu’elle fera. « J’étais bien dans ma boutique qui présente des aspects que j’adore et d’autres où je ne suis pas à l’aise. Mais ce n’est pas fait pour moi. Je cherche toujours quelque chose qui me prendra aux tripes !
On lui souhaite le trouver !
Godelieve Ugeux
To Be Oh mon magasin bio, rue des Croisiers, 18 Namur. Ouvert le lundi, ma, jeu, ven 10h30-18h30 – Samedi 9h30-18h30.