On savait Macron féru de théâtre depuis sa prime jeunesse. Il dispose d’ailleurs d’un professeur à demeure. Ses récentes annonces destinées à éteindre le mouvement des gilets jaunes ont montré qu’il excellait notamment dans le théâtre de l’improvisation et de l’illusion.
Il a d’abord commencé par faire dire à ses zélateurs que « la République en Marche » avait dès ses premiers pas parfaitement identifié les causes du mouvement, prégnantes depuis quarante années selon eux (eh oui, tant d’années de néolibéralisme, ça laisse des traces), en ne craignant pas d’étaler la contradiction majeure entre leur prétendue perspicacité et les mesures prises depuis son avènement, aggravant toutes les origines du mouvement : injustice fiscale, sociale et dépérissement des services publics. Tout à leur volonté de faire semblant d’avoir tout compris après avoir néanmoins essayé jusqu’au dernier moment d’imposer en force une augmentation de taxe écologique qui ne finançait que très minoritairement l’écologie , grisés qu’ils étaient par des « réformes » clivantes passées jusqu’alors à la hussarde, ils se sont empêtrés dans des postures toutes plus surjouées les unes que les autres et c’est leur chef lui-même qui a décidé de reprendre seul le devant de la scène, le théâtre Macron s’accommodant mal de la présence d’autres acteurs, même comparses. Ayant parié sur un rejet du mouvement par l’opinion publique, rien n’avait été prévu quant aux mesures à prendre pour le contenir d’où l’improvisation la plus grande, teintée d’enfumage (présentées pour certaines comme nouvelles alors que simplement anticipées), tant dans leur énoncé que dans leurs modalités, à tel point qu’une semaine après certaines d’entre elles se révèlent franchement illisibles et partiellement inapplicables. Que faut-il retenir de ce que nous a dit Jupiter en ce lundi 10/12/2018 ? Rien ou si peu, l’important étant dans ce qu’il n’a pas dit. Et c’est ce qu’il n’a pas dit qui prouve en fait qu’il n’a pas modifié son cap d’un iota.
Les non-dits de Macron sont éclairants :
– l’impôt sur la fortune n’est pas rétabli.
– la flat tax sur tous les revenus du capital est maintenue.
– les riches et très riches particuliers ne sont pas invités à contribuer davantage à l’impôt (direct).
– les grandes entreprises et multinationales qui se soustraient à l’impôt ne sont pas appelées à la rescousse, ne serait-ce que pour démontrer l’existence d’un minimum de solidarité. Tout au plus prévoit-on de différer d’une année la diminution du taux de l’impôt société (de 33% à 31%) initialement prévue en 2019 pour les entreprises réalisant un chiffre d’affaires annuel de plus de 250 millions d’euros.
– la taxation éventuelle des GAFA n’est envisagée que de manière symbolique, uniquement pour tenter d’atténuer la colère du citoyen face au scandale de leur évasion fiscale.
– la taxation des transactions financières n’est même pas évoquée, malgré l’énorme enjeu en cause.
– la concurrence fiscale (et l’évasion fiscale qui en résulte) en vigueur au sein de l’Union Européenne n’est pas dénoncée et encore moins combattue.
– l’existence de paradis fiscaux au sein de l’Union Européenne (Luxembourg, Pays-Bas, Irlande, Malte, Chypre, Belgique ; sans parler du Royaume Uni en principe bientôt sorti de l’UE) continue à être niée.
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Christian Savestre
Extrait du titre « Il faut que tout change pour que rien ne change »: célèbre réplique du “Guépard”, le film de Visconti inspiré du roman Le Guépard (Il Gattopardo) de l’écrivain italien Giuseppe Tomasi di Lampedusa, paru en 1958 à titre posthume.