Le gel des décisions d’asile pour les Palestinien·nes

Les attaques coordonnées et violentes du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023, ayant entraîné la perte de 1.200 vies et ayant fait plus de 7.500 blessé·es selon les autorités israéliennes, ont suscité une réponse militaire virulente d’Israël à Gaza. L’armée a lancé une offensive aérienne et terrestre accompagnée d’un siège total. Selon les informations communiquées par le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA), cette violence inouïe aurait causé la mort de plus de 21.000 Gazaoui·es entre le 7 octobre et la fin de l’année 2023, en plus du déplacement interne d’1,9 million de personnes. Par conséquent, la situation humanitaire à Gaza, déjà problématique avant le début de cette offensive, a pris une tournure catastrophique. En raison de la prévalence des bombardements et des combats au sol à travers la bande de Gaza, aucune “zone sûre” réelle n’existe.

Même avant l’intensification de la violence actuelle, de nombreux·ses Palestinien·nes fuyaient leur pays, demandant l’asile en Belgique. Iels représentaient la troisième nationalité la plus importante à y demander la protection internationale en 2022 et 2023. Beaucoup d’entre eux et elles maintiennent évidemment un lien fort avec leurs proches en Palestine et se sentent concerné·es par le sort des habitant·es de Gaza.

Au-delà des raisons souvent traumatisantes pour lesquelles ces personnes ont quitté leur pays et des expériences difficiles vécues sur les routes migratoires, beaucoup doivent aujourd’hui faire le deuil de membres de leurs familles, d’ami·es ou de connaissances, ou craindre pour leurs vies. Des associations livrant des services de santé mentale de première ligne aux personnes exilées, telles qu’Ulysse et Médecins Sans Frontières (MSF), témoignent de l’impact négatif considérable de la situation actuelle à Gaza sur l’état psychologique de ces personnes.

En plus de l’attente de la décision de protection, les conditions de vie en Belgique intensifient souvent leur détresse. Depuis la mise en place de la politique de non-accueil par le gouvernement fédéral en octobre 2021, la plupart des hommes arrivant en Belgique sans leurs familles (dits “hommes seuls” et qui y demandent l’asile se voient refuser une place d’accueil. Ils se trouvent donc à la rue pendant des mois alors qu’ils devraient être pris en charge par Fedasil (l’Agence fédérale pour l’accueil des demandeurs d’asile).

Dans ce contexte, le 20 octobre 2023, le Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides (CGRA) a annoncé geler certaines décisions concernant les Palestinien·nes de Gaza et de Cisjordanie. L’instance indépendante en charge des décisions d’asile justifiait cette décision en faisant valoir le manque “d’informations objectives suffisantes pour évaluer avec précision la situation en matière de sécurité dans les Territoires palestiniens”.

Comme nous l’avions dénoncé dans une carte blanche co-écrite avec des organisations du secteur, la durée de ce gel des décisions d’octroi ou de refus du statut de protection subsidiaire semblait disproportionnée face à l’évidence et à l’ampleur de la violence aveugle contre les civil·es que l’on a pu observer à Gaza pendant la période en question. Au vu des effets néfastes sur la santé des demandeur·euses de protection, mais aussi sur leur capacité à poursuivre leur procédure d’asile, la Belgique aurait dû octroyer rapidement et largement la protection internationale à ces Palestinien·nes.
Néanmoins, le CGRA n’a repris le traitement de ces dossiers que deux mois plus tard, annonçant finalement le 19 décembre que “la situation à Gaza indiquait clairement un besoin de protection internationale”.

Cette brève analyse donnera un aperçu de la raison du gel et de ses conséquences majeures pour les personnes concernées. Elle abordera le changement de la situation sécuritaire et humanitaire à Gaza, la question de la protection internationale de Palestinien·nes en Belgique, les conséquences du gel, et finalement, nos recommandations liées à cette pratique.

Découvrez l’analyse complète : Le gel des décisions d’asile pour les Palestinien·ne·s en Belgique: causes et conséquences