Cet article explore les conséquences des cyberviolences sur les trajectoires des féministes en France et au Québec. Les féministes, souvent ciblées par des attaques en ligne, souffrent de graves impacts sur leur santé mentale et leur engagement militant. Les réseaux antiféministes utilisent les technologies pour épuiser les activistes par des attaques répétées, ajoutant la stratégie de l’épuisement aux tactiques de répression. L’article analyse comment ces cyberviolences transforment l’activisme féministe et questionne les méthodes employées pour épuiser les militantes.
2Dans cet article, je reprends certains arguments de ma thèse de doctorat qui étudie les conséquences des cyberviolences sur les trajectoires individuelles d’activistes féministes en France et au Québec. Dans les deux cas d’étude, les cyberviolences sont utilisées comme des armes politiques qui s’inscrivent dans un processus de répression directe et indirecte (Codaccioni 2019) causant un profond sentiment d’insécurité chez les féministes et transformant leur rapport au militantisme. Par le biais de différentes tactiques, les réseaux antiféministes se saisissent des opportunités technologiques pour épuiser les féministes par la coordination et la répétition des cyberviolences. Ces usages des dispositifs sociotechniques élargissent le répertoire et les stratégies d’action des contre-mouvements antiféministes. La littérature identifie quatre stratégies qui sont utilisées par les contre-mouvements : recruter, créer des dommages, démobiliser (Zald et Useem 2009) et neutraliser (Blais 2019). Je propose d’intégrer la stratégie de l’épuisement à ce répertoire d’action. Si les stratégies d’action déjà étudiées sont d’ordre organisationnel en attaquant les mouvements féministes, celle-ci est plutôt individualisée et se démarque des autres en ciblant de manière explicite les activistes féministes à titre personnel. Cette stratégie participe notamment au processus d’individualisation de la répression à travers différentes tactiques. Cet article cherche à répondre à la question suivante : par quels usages des dispositifs sociotechniques et à travers quelles tactiques les réseaux antiféministes cherchent-ils à épuiser les féministes ?
3En appréhendant le répertoire d’action des réseaux antiféministes en France et au Québec, cet article s’intéresse de manière double à la notion d’espace ainsi qu’à ses frontières : celles entre les espaces nationaux selon un continuum en ligne et hors-ligne, et celles mouvantes qui circonscrivent la manosphère et la fachosphère en tant que nébuleuses à l’origine de la (re)production des (cyber)violences antiféministes. Selon les cas d’étude, les réseaux les plus actifs dans la coordination des cyberviolences ne sont pas les mêmes par leur filiation politique, idéologique et identitaire. En effet, les réseaux masculinistes de la manosphère sont les plus impliqués dans la coordination des cyberviolences répertoriées pour le cas québécois, alors que les communautés en ligne qui sont plutôt affiliées à l’extrême droite sont davantage responsables des violences en ligne du cas français. Ce résultat empirique s’explique notamment par les différences structurelles entre les cas et l’état des lieux de l’antiféminisme sur le terrain. La manosphère se définit comme un ensemble de communautés en ligne qui sont hostiles à la présence des femmes et des féministes dans le Web social (Jane 2017). La fachosphère renvoie à la manière dont de nombreux groupes appartenant à une nébuleuse d’extrême droite et de droite identitaire, conservatrice et catholique ont investi le Web social pour compenser une faible présence dans les médias traditionnels (Albertini et Doucet 2016). Il n’en demeure pas moins que les frontières sont poreuses entre la manosphère et la fachosphère (Morin 2021) et qu’il subsiste un processus de convergence des mobilisations haineuses (Bard 2019).
4Dans le cadre de cette enquête, je discute de cyberviolences, et non de cybermisogynie, en raison du processus de politisation de ces violences qui les inscrit in fine dans le répertoire de la répression. Cela s’explique également par le fait que les militant·e·s sont la cible de cyberviolences parce qu’elles sont féministes et non pas seulement parce qu’elles sont des femmes qui s’expriment dans l’espace public par leurs usages du Web social.
Méthodologie
- 1 Cette méthode me permettait aussi de ne pas me limiter aux réprésentations textuelles des discours (…)
5Les matériaux de cette enquête multisituée reposent sur deux méthodes de recherche qui permettent d’appréhender simultanément les traces numériques de l’antiféminisme et d’interroger les féministes sur leurs expériences en ligne afin de contextualiser leurs traces et celles des violences antiféministes. D’une part, j’ai réalisé une ethnographie en ligne des plateformes Facebook, Twitter, Instagram et YouTube entre les mois d’octobre 2018 et décembre 2019. Même si mon travail s’est efforcé de contextualiser les phénomènes en ligne par rapport à ceux hors-ligne (Robinson et Schulz 2009), cette méthode présente des limites pour l’analyse des cyberviolences puisqu’un nombre élevé de celles-ci sévissait dans des espaces (semi)privés qui m’étaient inaccessibles en tant que chercheuse. D’autre part, j’ai effectué 50 entretiens semi-dirigés avec des féministes à Paris (N26) et Montréal (24). Ceux-ci sont construits de manière hybride entre des récits de vie et des entretiens sur traces (Dubois et Ford 2015). Les entretiens qui m’ont permis de retracer les différentes formes de cyberviolences qui ont ciblé les féministes ayant participé à cette enquête1.
- 2 Soulignons que les participant·e·s qui s’identifient au courant universaliste sont la cible de la p (…)
6Pour participer, les personnes devaient se définir en tant qu’activistes et présenter des usages féministes du Web social. Les expériences militantes des participant·e·s ne se limitent pas à leurs usages numériques puisque la quasi-totalité de l’échantillon présente des trajectoires de militantisme plus traditionnel avec différentes expériences associatives et organisationnelles. Le seul critère d’exclusion était le fait d’être un homme cisgenre, incluant ainsi la participation de personnes non-binaires et d’hommes trans. Les personnes rencontrées appartiennent à différents courants du féminisme (queer, décolonial, radical, universaliste, etc.)2, bien que la majorité des participant·e·s sont des femmes cisgenres, blanches, hétérosexuelles, jeunes, neurotypiques et sans handicap pour 58 % de l’échantillon. Néanmoins, j’ai tout de même recueilli le témoignage de 21 féministes noir·e·s et racisé·e·s (42 %). Il s’agit surtout de personnes étudiantes ou professionnelles dans le domaine des communications et du journalisme pour une moyenne d’âge de 35 ans.
Cyberviolences et cyberhaine
7Si la littérature dénote un certain flou quant à la définition des cyberviolences, celles-ci se démarquent sur trois aspects : le renforcement de l’anonymat, le fort pouvoir de dissémination et la possibilité de contrôle moindre pour les victimes (Blaya 2015). Premièrement, l’anonymat est facilité par les dispositifs sociotechniques qui permettent la création d’avatars ou de fausses identités. Cela produit des effets sur la victime et l’agresseur. L’anonymat renforce chez celui-ci un sentiment d’impunité, tandis que cela augmente le degré d’insécurité et d’isolement de la victime. Deuxièmement, l’ubiquité du Web social amplifie le pouvoir de dissémination des cyberviolences qui bénéficient de la contraction du temps et de l’espace en ligne. Troisièmement, il est difficile de contrôler cette forme de violence en raison de sa désincarnation et de sa diffusion simultanée à travers plusieurs réseaux.
- 3 L’une des différences entre les cas est notamment le niveau d’intervention de l’État en France et a (…)
8Selon le Violence Against Women learning network, il existe six principales formes de cyberviolences : 1) le piratage (utiliser les technologies pour obtenir illégalement ou sans autorisation certaines informations ou données, changer ou modifier des renseignements personnels pour calomnier ou déshonorer la victime, 2) l’usurpation d’identité (utiliser les technologies pour prendre l’identité de la victime ou d’une autre personne pour avoir accès à des informations personnelles, embarrasser ou humilier la victime, communiquer avec la victime ou créer de faux documents d’identité), 3) la surveillance et le pistage (utiliser les technologies pour traquer et surveiller les activités et les comportements de la victime ou de son entourage), 4) le harcèlement (utiliser les technologies sans cesse pour contacter, importuner et menacer la victime ou ses proches, 5) le recrutement (utiliser les technologies pour entraîner les victimes potentielles dans des situations violentes et 6) la distribution malveillante de données personnelles ou identifiables (Commission sur le large bande 2015). Je me suis ainsi basée sur cette typologie pour cartographier les différentes tactiques antiféministes qui sont liées à l’usage des dispositifs sociotechniques pour (re)produire des cyberviolences en France et au Québec. Les formes les plus récurrentes de cyberviolences sont du ressort de la surveillance, du harcèlement, du recrutement pour commettre des raids numériques3 ainsi que celle de la distribution malveillante pour manipuler et faire circuler du contenu offensant, calomnieux ou diffamatoire. Les tactiques qui s’inscrivent dans la catégorie de l’usurpation d’identité ciblent majoritairement les féministes musulmanes, et plus particulièrement celles qui portent le foulard ou qui ont une importante visibilité médiatique. Des rumeurs sont propagées contre ces féministes en les associant à des réseaux terroristes islamistes. Ces tactiques sont réalisées plus particulièrement par les groupes d’extrême droite qui produisent énormément de contenus antiféministes en détournant des traces numériques de leurs contextes d’origine. Enfin, le piratage a été la forme la moins récurrente même si une dizaine de féministes avait été la cible de telles pratiques. Conséquemment, la majorité des cyberviolences observées ne demandent pas de savoirs techniques avancés de la part des acteurs antiféministes.
Cartographie des tactiques antiféministes en ligne
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10Les tactiques de surveillance et de pistage sont les plus récurrentes dans le cadre de cette enquête, tout en s’appuyant sur des mécanismes de pression politique et de contrôle coercitif pour décourager des institutions ou des bailleurs de fonds de financer ou soutenir certaines initiatives féministes. D’ailleurs, certain·e·s féministes ont été licenciées à la suite de telles campagnes en ligne (notamment lorsque des internautes écrivaient à leurs employeurs à propos de leur engagement) et des associations féministes ont perdu des subventions. En entretien, Safa raconte comment des réseaux d’extrême droite ont réussi à annuler une prestation d’emploi financée par l’État à l’association Lallab.
On avait fait la demande [service civique], qui a été acceptée. On a annoncé sur nos réseaux sociaux qu’on cherchait trois jeunes pour une mission de plusieurs mois chez Lallab. Tout était parfait. C’était incroyable qu’après seulement 1 an et demi d’existence on pouvait déjà compter sur une équipe. On avait vraiment construit toute notre année en fonction de ces postes. On a reçu des dizaines de candidatures […]. Au début, on recevait énormément de soutien […]. Deux jours plus tard, on commence à recevoir du cyberharcèlement très violent en taguant le gouvernement, l’État, le ministère de l’Éducation. Les gens disaient « ce n’est pas possible, nos impôts vont payer des terroristes, nos impôts vont payer nos ennemis, mais qu’est-ce que vous faites ? ». Cela allait très loin. Il y avait des femmes et des hommes politiques qui s’exprimaient, les médias. (Safa).
11Le fait d’identifier (tags) systématiquement les institutions responsables du programme ainsi que les interventions multiples des médias et de certain·e·s élu·e·s ont exercé une pression politique sur l’association Lallab si bien que celle-ci a perdu son entente de financement du service civique du jour au lendemain. L’intimidation contre Lallab a provoqué d’importantes conséquences pour l’association et ses militant·e·s. Cela a aussi renforcé le climat islamophobe contre lequel nombre de militant·e·s se butent, et qui interfère avec leur engagement et augmente ses coûts. Cette forme de violence s’appuie sur des clivages préexistants et cherche à les amplifier pour exercer une pression politique si forte que des institutions décident de faire volte-face. Ces tactiques s’inscrivent dans le répertoire de la répression auquel participent à la fois l’État et les acteurs antiféministes.
12Le concept de cyberhaine est particulièrement fécond pour illustrer de quelle manière les différents systèmes de domination s’imbriquent les uns dans les autres (Collins 2000). Il se définit comme « tout propos haineux, discriminant ou dégradant, visant à humilier, insulter, ridiculiser, voire déshumaniser, une personne ou un groupe de personnes » dans le but de « susciter des sentiments de haine ou de rejet à l’encontre de ces personnes » en raison de leur appartenance ethnique, raciale ou religieuse, leur orientation sexuelle, leur identité de genre ou tout autre attribut identitaire « au moyen d’Internet ou de tout autre moyen électronique de communication » (Blaya 2020, 39). La cyberhaine cible des catégories spécifiques de personnes ainsi que les individus et les communautés auxquelles ils appartiennent. Cela affecte leur sentiment de sécurité et augmente considérablement la peur d’être la cible de crimes haineux hors-ligne, d’autant plus que le fait d’être victime de cyberviolence augmente le risque de l’être hors-ligne (Couchot-Schiex et Moignard 2016).
13Si le genre représente une variable lourde lorsqu’il s’agit de cyberviolences, il en va de même pour la racialisation et l’origine ethnique ou religieuse. La totalité des participant·e·s de cette enquête qui sont noir·e·s ou racialisé·e·s a été victime de cyberhaine. Les féministes de confession musulmane sont la cible des formes de cyberviolence les plus graves et intensifiées, et plus particulièrement celles qui portent le hijab. La cyberhaine et les cyberviolences sont transversales à leur engagement féministe et contribuent à leur épuisement militant. Les militant·e·s doivent ainsi développer des stratégies pour composer avec ces violences quotidiennes pour poursuivre leur engagement féministe.
14Lors de l’ethnographie en ligne, de nombreux espaces numériques antiféministes ont été observés, dont la page Facebook Le Grillon Grillé qui était très active en 2019. Ce mème ironise sur les réelles victimes du climat politique ambiant en sous-entendant que le projet politique du féminisme noirE et queer va trop loin en opprimant les hommes blancs.
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16Soulignons d’ailleurs que la photo de profil de la page parodie le drapeau de la fierté. Il s’agit d’un exemple évident de cyberhaine à l’encontre des féministes en tant que groupe social en ciblant plus particulièrement les personnes qui ne sont pas cisgenres et le mouvement LGBTQIA2+. De nombreux contenus antiféministes ridiculisent ainsi les féministes par le biais de mèmes haineux qui s’inscrivent dans le répertoire de la répression directe et indirecte.
Le trolling et la cybersurveillance comme tactique antiféministe
17Les cyberviolences sont souvent associées aux comportements de trolls qui représentent une figure mythique des rapports sociaux à l’ère du numérique. L’origine du concept et de son action (trolling) demeure difficile à situer. L’une des premières définitions le présente comme un ensemble de comportements qui visent à déranger les conversations numériques par la prise de positions outrageuses ou offensives par humour ou pour le plaisir (Mantilla 2013, 593). Cette pratique intentionnelle, répétitive et provocatrice nuit à l’intégrité des communautés en ligne (Sanfilippo, Yang et Fichman 2017). Dans le cadre de cette enquête, le concept de troll est une notion fourre-tout qui désigne la présence d’un ennemi politique caché derrière son écran. Lors de leur entretien, nombre de féministes ont utilisé la notion de « troll » ou de « troller » pour désigner une personne leur étant inconnue qui cherche à provoquer des émotions désagréables par l’intermédiaire d’un registre d’expression agressif (Badouard 2018). Noor explique qu’elle déteste « ce mot lorsqu’il est appliqué au cyberharcèlement » puisqu’un « troll est une créature imaginaire, et tu as l’impression que ça n’existe pas vraiment parce qu’il est derrière un ordinateur ». L’usage de cette terminologie participe ainsi à la normalisation des cyberviolences.
Quand on me dit « mais, ignore-les, de toute façon ce n’est pas la vraie vie ». C’est quoi alors la vraie vie ? « Bah je ne sais pas, ce n’est pas comme si un mec te disait dans la rue connasse ». Tu crois que parce que tu me le dis sur Twitter cela n’a pas autant d’impact que dans la rue ? Cela n’arrive jamais dans la vie de personne que dans une journée tu te prennes 300 insultes dans la rue. En revanche, cela arrive que tu te prennes 300 insultes dans une journée sur Twitter. Je ne comprends pas pourquoi il faudrait faire une distinction entre la vraie vie et Internet quand derrière l’ordinateur il y a quelqu’un qui s’en prend plein la gueule (Noor).
18Comme l’illustre cet extrait, les effets des cyberviolences sont minimisés par cette dichotomie entre « vie réelle » et « vie virtuelle », ce qui participe aussi à leur dépolitisation puisque les espaces en ligne seraient en dehors du politique. Mes résultats montrent a contrario une forte politisation du trolling comme tactique pour détourner les ressources des féministes et instaurer un climat toxique en ligne. Cette tactique permet de « faire taire un adversaire et occuper l’espace du débat » en s’assurant d’une « visibilité optimale » sur le plan politique (Badouard 2018). Souvent présenté comme un jeu humoristique qui découle des codes de l’Internet, le trolling serait plutôt une tactique pour confisquer les espaces discursifs et la visibilité politique de son adversaire.
Épuiser et nous dégoûter de la politique pour qu’on arrête d’en faire. Tout ce qui est relatif à l’antiféminisme, ça vise à dire que les femmes n’ont pas leur place dans l’espace public, n’ont pas leur place en politique, qu’elles ne doivent pas être ici. C’est une manière de plus de le prouver. Ça pourrait être drôle, le troll, mais je ne trouve même pas ça drôle. Même s’il y a des pages comme Mèmes royalistes qui trollent tout le monde et qui se disent apartisanes, mais ils trollent quand même toujours sur les mêmes choses et les mêmes personnes (Marion).
19Des féministes comme Marion changent leur approche pour ne plus « perdre leur temps », et refusent cette fatigue. Ce changement d’attitude traduit un refus de débattre avec des personnes qui ne cherchent qu’à amenuiser leurs ressources (temps et énergie). Comme le souligne Emmanuelle, « [i]ls m’ont pris énormément de temps, d’énergie et de patience. Je pense que toutes les militantes connaissent ça, mais derrière ce sont des nuits blanches parce que l’autre a dit des trucs horribles et que tu as été obligée de les lire ». Si cette tactique participe à l’épuisement des féministes, l’écrasante majorité des participant·e·s. ne cherchent même plus à expliquer leurs arguments ni à les défendre en ligne. Les cyberviolences qui ciblent délibérément les féministes ne sont pas le fait de personnes isolées en étant plutôt des actions concertées par des réseaux antiféministes. Le trolling s’inscrit dans le sillage de la répression politique et cherche à réifier la haine des féministes. Le dispositif antiféministe d’insécurité en ligne repose sur des pratiques d’intimidation et de harcèlement, il est aussi renforcé par des outils techniques de cybersurveillance.
Le forum Jeuxvideo.com est bien connu pour faire ce genre de truc. Leur avatar c’est un gros smiley jaune et ils font des bots. Cela m’arrive régulièrement d’avoir sur Twitter des notifications où j’avais été ajoutée à une liste de gens à brûler […] J’ai ouvert un Tipeee il n’y a pas longtemps pour que ma communauté m’aide à soutenir mon travail militant. J’ai eu un commentaire sur mon Tipeee d’un mec du forum 18-25 qui avait juste mis leur avatar jaune. C’était une technique d’intimidation. C’est pour me dire « on est là et un jour ça va le déclencher et tu ne sais pas quand ». C’est vraiment du terrorisme virtuel. Je n’ai pas l’impression que cela me paralyse, mais je me censure quand même (Émilie).
20Les membres de la communauté en ligne de Jeuxvidéo.com surveillent les activités numériques des féministes pour leur rappeler qu’un raid ou des actions de piratage peuvent être organisés inopinément. Comme l’explique Noor, « une fois que tu as été identifiée par ces personnes, tu es dans leur target list. Ils te gardent sous le coude et ils te suivent tous. Ils ont des comptes qui servent juste à te suivre et dès que tu vas dire ou faire une vidéo qui ne leur plaît pas ou qui est un peu radicale, ça recommence ». Ces pratiques instaurent un régime de terreur et un état d’hypervigilance quasi permanent. La cybersurveillance s’opère par une collecte systématique d’informations pour suivre les traces numériques des féministes en temps réel. Cette tactique leur permet aussi d’obtenir des informations confidentielles et de dévoiler l’identité d’activistes qui militent sous pseudonyme.
Il a enquêté sur moi pendant je ne sais combien de temps. Il ne me lâche pas […]. Il m’a suivi depuis le début. Sa technique c’est de reprendre chacun de mes Tweets et de republier sur ses comptes en faisant des appels au harcèlement. […] À chaque fois qu’il reprenait mes Tweets, j’avais le droit à des milliers d’insultes, de menaces de mort et de viol, de photos pornographiques et montages… Il a effectué des recherches sur moi à partir de mon compte qui était anonyme. Je n’avais aucune photo de moi, je n’avais jamais balancé mon nom ou prénom. Il a réussi à avoir des infos sur moi comme mon nom et mon adresse (Yasmina).
21Le dévoilement de l’identité de Yasmina l’a mise en danger en tant que féministe qui porte le foulard dans un contexte de fortes tensions politiques et d’islamophobie. Le partage hors contexte de certaines traces numériques des féministes est une tactique qui cherche à augmenter les risques de cyberviolences.
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23Cette nouvelle publication du Grillon Grillé reprend une publication du compte Facebook L’empêcheuse de penser en rond qui corrige des contenus numériques pour les rendre plus féministes. La page se permet « de corriger » la publication initiale en ridiculisant encore une fois les féministes en les catégorisant de personnes laides. Il s’agit d’un exemple de rétorsion de contenus féministes dans le but de surveiller, de recruter et de distribuer de manière malveillante.
Le continuum des violences en ligne et hors-ligne
24Considérant que nombre des cyberviolences observées pendant cette enquête montrent un caractère sexuel, il importe donc d’inscrire les violences en ligne dans le continuum des violences de genre (Hare et Olivesi 2021, 320). Tout comme les violences sexuelles, une compréhension des cyberviolences comme un continuum permet « de décrire et de nommer cette palette de comportements d’abus, de contraintes et d’usages de la force » contre les femmes et les féministes (Kelly 2019, 21). Une telle conception rend compte des expériences communes de violences au regard de leur nature, leur récurrence, l’ampleur de la menace et leur contexte (Kelly 2019). Elle rend aussi compte de la continuité des espaces dans lesquels les violences se déploient. Un double déplacement des cyberviolences s’opère entre les espaces numériques et des espaces en ligne vers les espaces hors-ligne.
Un homme qui suit les féministes depuis les années 1990. Il m’a suivi sur les Chiennes de Garde, après quand j’ai ouvert mon propre forum, il a essayé de venir dessus. Il n’a jamais pu. Dès que j’ai ouvert mon blogue, il a commencé à venir sur mon blogue. Je l’ai toléré très longtemps, et puis j’ai commencé à bloquer son IP. C’était d’ailleurs un article où je parlais de la Ligue du LOL. J’ai bloqué son IP et il l’a changé. Il continuait. C’était flippant (Ariane).
- 4 J’inclus dans cette forme de cyberviolence le fait de divulguer des liens familiaux ou amicaux des (…)
25Cet extrait montre comment les acteurs antiféministes se déplacent spatialement pour traquer les féministes en ligne. Pour que leur présence soit inquiétante, ils la signalent par différents moyens technologiques et contournent les pratiques de sécurisation comme le fait de bloquer des adresses IP. Leur capacité coercitive est consolidée par ce déplacement spatial et un rapport complètement inégalitaire sur le plan informationnel. En effet, les acteurs antiféministes disposent d’un volume considérable d’informations sur les féministes, qui ne savent pas toujours qui les observe de manière ouverte ou dissimulée. Ce déplacement des violences amène les féministes à craindre de se faire agresser dans les espaces hors-ligne. Dans le même ordre d’idée, des féministes ont confié avoir été victimes de la divulgation de certaines de leurs informations personnelles (doxxing) pour recevoir ultérieurement des lettres menaçantes à leur domicile. Ce phénomène rend manifeste le déplacement des violences des espaces en ligne vers les espaces hors-ligne. Cette pratique malveillante consiste à mettre en ligne des informations comme le numéro de téléphone, l’adresse civile ou les renseignements bancaires d’une personne. Ce type de violence est souvent l’objet d’un vol de données, que ce soit par des techniques de piratage ou par des connaissances qui donnent intentionnellement ces informations4. Ma recherche montre que le vol de données est l’une des cyberviolences les plus utilisées en raison des dommages qu’elle peut causer et de sa facilité déconcertante. Cette tactique n’exige pas nécessairement de savoirs techno-informatiques avancés tout en étant parfois facilitée par des proches de féministes de manière intentionnelle ou involontaire. D’une part, des proches qui sont en conflit avec des militant·e·s de leur entourage transmettent leurs informations personnelles ou les publier eux-mêmes en ligne. D’autre part, des proches peuvent faciliter la collecte de données qui permettent d’identifier les féministes sous anonymat, d’établir leurs liens familiaux et amicaux ou de les situer géographiquement. En entretien, Élisabeth raconte que la sonnerie de son interphone était constamment activée la nuit pour la réveiller et la terroriser en montrant que son adresse était connue des réseaux antiféministes de la fachosphère et de la manosphère. Par ces menaces, qui dégradaient son sentiment de sécurité et celui de ses proches, Élisabeth a été contrainte de déménager. Ces épisodes de violence illustrent précisément le continuum des violences et le déplacement des (cyber)violences – et de leurs harceleurs – selon les types d’espace.
L’usage des cyberviolences comme stratégie d’action pour épuiser les féministes
26Par différentes tactiques, les cyberviolences servent une stratégie d’épuisement des féministes. Le but de cette stratégie antiféministe est d’épuiser toutes les ressources des féministes, qu’elles soient émotionnelles, matérielles ou symboliques, par le biais des dispositifs techniques. Pour ce faire, les acteurs antiféministes se saisissent de cette opportunité technologique pour élargir leur répertoire d’action stratégique et la portée de leurs tactiques pour créer des dommages, dissuader les féministes à se mobiliser, recruter de nouveaux militants (Zald et Useem 2009), neutraliser les mouvements féministes (Blais 2019) et finalement épuiser féministes. Si la stratégie de l’épuisement semble s’appuyer sur les mêmes mécanismes que celle de la neutralisation, elle diffère dans le sens où celle-ci est intrinsèquement ancrée dans le contexte du Web social et se veut une stratégie qui est individualisée tout en ayant des effets organisationnels et structurels pour les mouvements féministes. En outre, les dispositifs techniques permettent de développer un large arsenal de tactiques antiféministes pour cibler individuellement des milliers de féministes tout en les ciblant en tant que groupe social. Dans le contexte d’une forte mobilisation antiféministe dans le Web social, les cyberviolences représentent des leviers de coercition et de domination à l’encontre des féministes en reposant sur des mécanismes de répétition et une réelle intention de nuire lorsqu’elles sont perpétrées dans le cadre d’une dynamique de mouvement et contre-mouvement. Par conséquent, les cyberviolences ne sont pas seulement des violences ponctuelles, mais plutôt des violences politisées qui s’inscrivent dans un cadre plus large de répression directe et indirecte (Codaccioni 2019). Les violences numériques représentent ainsi une arme politique et répressive dans l’arsenal stratégique des contre-mouvements antiféministes.
27Si l’engagement en ligne a longtemps été présenté comme une forme plus passive ou moins coûteuse d’engagement en termes de temps ou d’énergie (Boulianne 2009), ces travaux ne reconstituent pas nécessairement les trajectoires individuelles des personnes les plus engagées en ligne et ne considèrent pas les variables lourdes comme le genre et la race dans leurs analyses. Conséquemment, ces études n’explorent pas les liens entre les coûts associés à l’activisme en ligne et l’identité ou la positionnalité des militant·e·s. Les résultats de cette enquête montrent combien les coûts du militantisme féministes sont élevés, et notamment sur le plan économique comme l’illustre l’exemple de Lallab qui a perdu une subvention étatique après des raids numériques de la fachosphère et l’intervention de représentant·e·s politiques de l’extrême droite. Ces coûts économiques sont aussi associés à des pertes de revenus après des épisodes d’épuisement professionnel précipités par des campagnes de désinformation et d’usurpation d’identité. Par exemple, Élisabeth a été la cible d’une importante campagne de diffamation de la part de l’extrême droite qui soutenait qu’elle offrait des services d’escorte. Ils ont fait des photos montages avec d’anciennes photos où elle était partiellement dénudée dans le cadre d’un « reportage sur les clients d’escortes ». Élisabeth s’était créée une « une fausse fiche d’escorte » pour rejoindre de potentiels clients. Ils ont repris cette fausse fiche en arguant qu’elle était véritablement une escorte. Par ces insinuations, elle n’a pas obtenu de contrat comme journaliste pendant plus de deux ans.
28L’un des principaux coûts du militantisme féministe en ligne se situe sur le plan de la santé mentale. Au vu des attaques antiféministes répétées, les ressources émotionnelles des féministes s’amenuisent progressivement, jusqu’à les mettre en danger. Les conséquences des violences en ligne ne se cantonnent donc pas seulement aux univers numériques puisqu’elles produisent des effets réels sur la vie des féministes : problèmes de santé, troubles du sommeil, dépressions, anxiété, pertes de revenus et d’opportunités professionnelles, hypervigilance et désengagement. D’ailleurs, les activistes en position subalterne vivent davantage de problèmes de santé mentale que les autres en raison du niveau de violences vécues dans le cadre de leur militantisme (Gorski et Erakat 2019).
Parfois, j’ai besoin d’une pause et je la prends sinon ce n’est pas possible de faire autrement. À certains moments, c’est très intense et d’autres beaucoup moins. Je pense que sur le long terme c’est différent, la fatigue accumulée… Je veux dire, il y a la fatigue tout de suite et la fatigue de la fatigue de la fatigue… Il y a aussi l’effet de cumul à chaque fois que je vis une expérience comme cela. C’est différent. On ne prend pas forcément le temps en plus, car on n’a pas le temps dans les milieux militants et féministes, on n’a pas le temps de se pencher très en profondeur sur notre santé mentale, sur les conséquences des violences militantes ou des violences comme le cyberharcèlement (Mona).
29Comme l’exprime Mona, la fatigue émotionnelle est transversale à l’engagement féministe. Multifactorielle, elle produit des incidences biographiques sur les trajectoires individuelles des féministes et accroît les coûts du militantisme. Pour s’adapter aux effets de cette fatigue, les féministes modifient leurs usages des dispositifs sociotechniques selon leur niveau d’énergie et leur disponibilité émotionnelle. Les activistes se rendent alors moins disponibles pour leurs communautés, ne lisent plus les commentaires – ou retirent la possibilité de le faire – et dévoilent moins leur vie privée, par exemple. Si cette fatigue n’est pas toujours directement liée aux épisodes de cyberviolences, la stratégie de l’épuisement développée par les acteurs antiféministes précipite néanmoins les féministes dans cette épreuve biographique. Les acteurs antiféministes traquent les féministes dans les espaces numériques comme le feraient des prédateurs qui poursuivent leur proie jusqu’à l’épuisement. La fatigue émotionnelle côtoie ainsi le « répertoire de la peur » (Blais 2021). Quoique ce répertoire fasse partie intégrante du quotidien des féministes au même titre que le stress, l’anxiété, la crainte et la méfiance, celui-ci peut néanmoins stimuler l’engagement lorsque cette émotion est corollaire à un certain travail émotionnel (Blais 2021). Cela n’est pas nécessairement le cas avec le répertoire de la fatigue qui provoque plutôt des périodes de rupture de l’engagement féministe. En définitive, les tactiques antiféministes en ligne et l’usage des cyberviolences contraignent les féministes à s’autocensurer, modifier leurs usages, se déconnecter ou encore se désengager du Web social.
Elena Waldispuehl
Elena Waldispuehl est chercheuse postdoctorale au LABCMO et au Réseau québécois en études féministes (RéQEF). Son projet de recherche (CRSH 2023) analyse l’impact de la fatigue émotionnelle sur le militantisme féministe. Docteure en science politique de l’Université de Montréal, sa thèse étudie les effets des cyberviolences antiféministes sur les trajectoires individuelles de féministes en France et au Québec.
Source : https://journals.openedition.org/rfsic/15677
Référence électronique
Elena Waldispuehl, « Cybersurveiller et cyberharceler les féministes jusqu’à l’épuisement comme stratégie d’action des réseaux antiféministes en France et au Québec », Revue française des sciences de l’information et de la communication [En ligne], 28 | 2024, mis en ligne le 26 juin 2024, consulté le 19 août 2024. URL : http://journals.openedition.org/rfsic/15677
Bibliographie
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Notes
1 Cette méthode me permettait aussi de ne pas me limiter aux réprésentations textuelles des discours antiféministes et de me distinguer des travaux recensés dans la littérature savante en présentant un continuum en ligne et hors-ligne des (cyber)violences et du militantisme féministe.
2 Soulignons que les participant·e·s qui s’identifient au courant universaliste sont la cible de la plus faible proportion de cyberviolences comparativement à d’autres courants féministes.
3 L’une des différences entre les cas est notamment le niveau d’intervention de l’État en France et au Québec pour sanctionner les cyberviolences. Soulignons que les raids numériques sont punissables avec la loi du 3 août 2018 en France. Au Québec, ce sont plutôt les tribunaux qui exercent un pouvoir de jurisprudence quant aux sanctions imposées pour des faits de cyberviolences.
4 J’inclus dans cette forme de cyberviolence le fait de divulguer des liens familiaux ou amicaux des féministes qui prennent soint de les cacher afin de protéger leur entourage.
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