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Comment vous est venue l’idée de cette campagne?
L’idée de la campagne est venue d’un militant d’Intal Congo, un artiste dont des collègues avaient subi la tentative d’interdiction de l’utilisation de l’effigie de Patrice Lumumba lors du festival Afropolitande 2015 au Bozar. Cette interdiction venait de la direction du Bozar dont Étienne Davignon, un homme contre qui la famille Lumumba a porté plainte en 2011 pour crime de guerre, tortures et traitements inhumains et dégradants à l’égard de Patrice Lumumba. En réponse à cette tentative d’interdiction, une trentaine d’artistes s’y sont opposés en se rassemblant dans le hall du Bozar avec l’effigie de Lumumba et ont diffusé son discours historique du 30 juin 19601. Une victoire pour les artistes qui ont pu de cette manière rendre hommage à ce grand humaniste qui fut le premier Premier ministre du Congo, élu démocratiquement. Cet évènement au Bozar reflète aussi une censure structurelle en Belgique de reconnaître Patrice Lumumba comme un héros de l’indépendance du Congo.
Pourquoi cette campagne ?
Cet évènement marquant au Bozar nous montre la nécessité d’avoir à la tête de nos institutions culturelles belges des personnes incarnant des valeurs de justice et de liberté d’expression, œuvrant en faveur d’une culture permettant aux artistes de raconter l’histoire des gens, de tout un chacun et non des classes dominantes. Avec Intal, nous voulons une culture qui soit décoloniale. Une institution comme le Bozar doit donc incarner un espace d’expression collective ouvert sur le passé et présent colonial parce que d’autres histoires doivent être racontées pour interroger la culture dominante. C’est pourquoi nous voulons, au travers de cette campagne, interroger le présent colonial de Bozar. Nous estimons que l’interdiction de l’image de Lumumba, au Festival Afropolitan du Bozar, n’est pas un fait anodin. Sa présidence par Étienne Davignon incarne l’imposition d’une orientation euro-centriste et coloniale. Nous soutenons une culture solidaire et humaine qui permette aux artistes d’utiliser leur art pour approfondir nos connaissances et notre compréhension du monde, de nous-mêmes et donc aussi de la colonisation. Nous ne pouvons comprendre ni combattre le racisme systémique en Belgique sans décoloniser nos imaginaires et notre culture qui sont en grande partie le fruit du régime raciste qu’était le régime colonial belge.
Que demandez-vous ?
A brève échéance, nous voulons qu’Etienne Davignon soit démit de sa fonction de président du Conseil d’Administration de Bozar. La ministre des Affaires étrangères qui exerce la tutelle sur Bozar doit fournir des explications et des excuses pour ces nominations consécutives, ayant conduit Étienne Davignon à exercer la présidence du CA pendant plus de 20 ans (1ère nomination en 1998). Interpelée en commission parlementaire sur cette présidence, la ministre, Sophie Wilmès, a félicité et remercié le travail de cet homme, n’exprimant aucune préoccupation quant à son rôle dans l’assassinat de Lumumba, ni dans sa défense ducolonialisme2. Il n’est pas normal qu’en 2020 un homme qui défend la colonisation, un système d’exploitation criminelle, soit libre de terminer son mandat comme bon lui semble et en soit en plus remercié. En outre, nous demandons que son successeur soit une personne qui œuvre à la mise en valeur de la culture populaire et qui permet aux artistes de raconter l’histoire de tout un chacun, et non celle uniquement des classes dominantes. Une personne qui ne défende pas le système criminel d’exploitation qu’a été le colonialisme. Enfin, avec cette campagne, nous voulons aussi ouvrir le débat sur la décolonisation de l’ensemble des espaces culturels belges. Jacques Brassinne de La Buissière, visé aussi par la plainte de la famille Lumumba est actuellement le président du Théâtre de Poche de Bruxelles, un autre grand haut lieu culturel belge.
Comment soutenir la campagne?
La campagne Decolonize Bozar peut être soutenue de multiples manières. Tout d’abord, nous avons mis un dossier avec une pétition en ligne sur le site d’Intal. Nous invitons à signer et à diffuser cette pétition, qui sera remise à la ministre des Affaires étrangères. Nous avons une vidéo qui permet de relayer la campagne facilement et largement. Pour l’instant, plusieurs associations et personnalités l’ont déjà signée3. Ce lundi 1er février, un appel à candidature pour renouveler le Conseil d’Administration de Bozar a été lancé. Nous pensons que cet appel est le fruit d’une volonté importante au sein de Bozar de vouloir renouveler ce Conseil d’Administration en place depuis très longtemps mais aussi le résultat de la campagne Decolonize Bozar. Nous sommes nombreux à vouloir ce changement, à vouloir décoloniser les espaces culturels. Nous invitons également tout un chacun, qui voudrait apporter son apport à la décolonisation des arts et de la culture, à nous rejoindre chez IntalCongo4.
Pour signer la pétition et consulter le dossier de campagne : https://www.intal.be/campagne/bozar/
Pour voir la vidéo de campagne : https://www.facebook.com/intalcongo
1 https://zintv.org/qui-a-peur-de-lumumba/
2 https://www.lecho.be/culture/general/etienne-davignon-n-est-pas-candidat-a-sa-succession-a-la-presidence-de-bozar/10269182.html
3 Premiers signataires : le Collectif Mémoire Colonial et Lutte contre les Discriminations, Lucas Catherine (auteur), Ludo DeWitte (auteur), Bakushinta, Fédération des congolais de Bruxelles, Pitcho (artiste), Raphaëlle Bruneau (artiste), Ligue de Défense Noire Africaine, CADTM, Hart Boven Hard Bruxelles, Bruxelles Panthère, Olivier Mukuna (journaliste indépendant), Change, Binabi ULB, Quinoa asbl, PTB Culture….
4 https://www.intal.be/devenir-membre-lid-worden/