De l’entreprise-réseau à l’économie de plateforme, les impasses des négociations

 Enquêtes ouvrières en Europe - Episode 5

Résumés

Malgré le caractère disruptif qui lui est souvent attribué, l’économie de plateforme s’inscrit aussi dans la continuité de l’externalisation et de la désintégration de la figure de l’entreprise qui s’observe également à travers l’essor de la catégorie de l’entreprise-réseau. Elle accentue ainsi une situation où l’entreprise échappe à la fonction d’interlocuteur patronal, ce qui implique une mise en question des institutions des relations professionnelles et des répertoires d’action collective. En mettant en évidence les caractéristiques respectives de l’entreprise-réseau et de l’économie de plateforme, nous interrogeons les réponses syndicales par rapport à la première et en discutons l’applicabilité dans l’économie de plateforme, qui se présente à présent comme une arène privilégiée pour l’analyse et l’expérimentation des relations professionnelles à venir.

Texte intégral

1Les systèmes de relations professionnelles se sont constitués historiquement dans le cadre des États-nations où s’articulent, de manière différenciée selon les contextes nationaux, les niveaux centralisés de la négociation collective sectorielle et interprofessionnelle et le niveau décentralisé de l’entreprise. Dans cette configuration multi-niveaux, qui caractérise des pays comme la France ou la Belgique, l’entreprise en tant que lieu d’une coordination hiérarchique de l’activité économique, à l’opposé des logiques de marché fondées sur le système des prix (Coase 1937), pouvait apparaître comme un niveau pertinent de la négociation collective dans la mesure où la représentation des travailleur·euse·s s’adressait à un employeur unique et identifiable, susceptible d’endosser le rôle d’interlocuteur social.

2De ce point de vue, l’affaiblissement des systèmes de relations professionnelles, souvent attribué aux déficiences de l’acteur syndical et au recul des taux d’affiliation, trouve une autre explication, à nos yeux plus décisive, dans la transformation des structures de pouvoir au sein de l’entreprise. Celles-ci sont traversées, depuis au moins les années 1980, par un double mouvement de concentration capitalistique à l’échelle internationale et de déconcentration productive sur les lieux de travail, qui rend plus incertaine l’identification des centres de décision patronaux. L’entreprise – dans l’acception d’une organisation du travail – se présente désormais sous une forme hybride entre « hiérarchie » et « marché », comme une nébuleuse faisant intervenir des sous-traitants, des agences de travail intérimaire, des franchises et des travailleur·euse·s indépendant·e·s ou détaché·e·s avec lesquels sont noués des contrats commerciaux. La précarisation et la diversification de l’emploi, à la source de l’affaiblissement de l’acteur syndical, recouvrent ainsi plus largement les situations où les travailleur·e·s qui participent à la production ne sont pas les salarié·e·s directs de l’entreprise-pivot où se concentre de facto le pouvoir économique. Qu’elle soit désignée en termes de client, d’utilisateur, de donneur d’ordre ou de commanditaire, l’entreprise tend ainsi à se défaire de sa fonction d’employeur (Thébaud-Mony 2001).

3Cette évolution est exacerbée par les évolutions plus récentes de l’économie de plateforme, sous sa forme des « lean platforms » (Srnicek, 2017), qui se caractérisent par l’externalisation de l’emploi et des actifs nécessaires à la production, ainsi que par le refus d’adopter le rôle formel d’employeur. Loin de présenter un caractère fondamentalement disruptif, l’économie de plateforme prolonge et intensifie donc, de manière archétypale, ce mouvement de désintégration de l’entreprise, grâce entre autres au potentiel des technologies numériques. Corollairement, la précarisation de l’emploi qui en résulte procède de la dissimulation des liens de subordination, ou du moins de dépendance économique, qui finit par réduire les marges de négociation collective des travailleurs et saper les bases mêmes des systèmes de relations professionnelles fondés sur la reconnaissance mutuelle des interlocuteurs sociaux, sous l’égide de l’État. Les transformations de l’entreprise, des organisations en réseau jusqu’aux formes émergentes du capitalisme de plateforme, encouragent dès lors une réflexion sur le renouvellement de l’action collective des travailleurs et le répertoire de l’action syndicale.

  • 1 Nous nous référons principalement à l’étude La modernisation de l’organisation du travail dans le (…)
  • 2 Projet PRESUB – Industrial relations in a context of development of subcontracting dans le cadre d (…)
  • 3 Projet interuniversitaire SEAD – Sustainable employment in the age of digitalisation (2020-2024), (…)

4Les réponses collectives expérimentées dans le contexte de la sous-traitance, pour insatisfaisantes qu’elles soient, ne peuvent s’appliquer durablement à l’économie de plateforme en l’absence d’une reconnaissance mutuelle des interlocuteurs sociaux. Nos analyses se fondent sur des résultats de recherches centrées sur les relations professionnelles dans le contexte de la sous-traitance, plus particulièrement dans le secteur du nettoyage1 et dans celui de la maintenance industrielle en Belgique2. Les discussions de l’économie de plateforme émanent d’une recherche portant sur la soutenabilité de l’emploi et du travail dans le contexte de la numérisation des services et de l’industrie3. Pour l’ensemble de ces projets, les analyses proposées se basent sur des données empiriques qualitatives, des observations directes durant les mobilisations et des entretiens avec des travailleur·euse·s, des syndicalistes et des gestionnaires d’entreprises.

5Nous poursuivons cette réflexion (1) en exposant les caractéristiques spécifiques de l’entreprise-réseau et ses liens et différences avec ce que nous nommons l’économie de plateforme ; (2) en analysant ensuite les défis que ces phénomènes posent respectivement aux syndicalismes ; pour finalement (3) dégager les pistes qui s’ouvrent dans le champ de la négociation collective.

1. L’économie de plateforme dans le prolongement de l’entreprise-réseau

6En première analyse, la plateforme est une infrastructure numérique qui met en relation différents groupes d’individus. De façon générale, il est possible de caractériser les plateformes, à la suite d’Antonio Casilli (2019, 64), comme des « mécanismes multifaces de coordination algorithmique qui mettent en relation diverses catégories d’usagers produisant de la valeur » et qui extraient de la valeur de leurs transactions. Dans son étude du capitalisme de plateforme, Nick Srnicek distingue, à côté des plateformes d’annonceurs, de produits ou d’hébergement de données, la catégorie des plateformes « allégées » (lean platforms comme Uber, Deliveroo, Airbnb) qui « fonctionnent selon un modèle d’hyperexternalisation, dans lequel les travailleurs, le capital fixe, les coûts d’entretien et la formation sont tous confiés à des sous-traitants » (Srnicek, 2017, 81).

7D’une certaine manière, le déploiement des plateformes numériques atteste « que la frontière entre le lieu de la hiérarchie et de la sécurité (l’entreprise) et, par opposition, le lieu de la libre coordination par les prix (le marché) est devenu caduque » (Casilli, 2019, 74). Dès lors, l’émergence du modèle d’affaire propre au capitalisme de plateforme pose à nouveaux frais la question fondatrice de la « nature » de la firme, analysée par le courant économiste néo-institutionnaliste comme une alternative économiquement efficace au recours au marché, car l’internalisation de l’activité permet de réduire l’incertitude qui prévaut sur les marchés et de limiter les coûts de transaction (Winter & Williamson, 1991).

  • 4 L’analyse statistique rend compte de l’ampleur de la transformation des structures de l’entreprise (…)

8À bien des égards, le modèle d’affaire de l’économie de plateforme s’inscrit dans le prolongement du mouvement d’éclatement de l’entreprise et de dilution de la fonction patronale, à l’œuvre depuis les années 1980, qui marque le déclin de l’entreprise dans sa double fonction de vecteur d’efficacité économique et d’espace de régulation sociale. Les théorisations de la firme flexible (Atkinson, 1984), des systèmes de production « allégée » (Aoki, 1984) ou des districts industriels (Piore & Sabel, 1984) rendent compte d’un changement de paradigme qui oppose les valeurs de flexibilité, de décentralisation et d’horizontalité au modèle de la firme pyramidale fordiste4.

9En dépit de la très grande diversité de configurations organisationnelles que recouvre le modèle de l’entreprise organisée en réseau, il est possible d’en dégager quelques caractéristiques communes, déterminantes du point de vue des relations collectives de travail et du projet de démocratie sociale. Dans tous les cas de figure, les organisations réticulaires sont caractérisées par une dissociation des structures juridiques de l’entreprise et de l’espace organisationnel au sein duquel est coordonnée l’activité ; la généralisation à des degrés divers de relations d’emploi triangulaires, dont la figure emblématique est celle du travail intérimaire ; la transformation du mode de gouvernement de l’entreprise où se mettent en place de facto des relations de pouvoir économique.

10L’entreprise de type fordiste se caractérisait par une forte intégration verticale des activités de la chaîne de valeur si bien que les frontières économiques de la firme capitaliste « concentrée » correspondaient étroitement à ses frontières juridiques telles que fixées par le rapport salarial et le contrat de travail (Dockès, 1993). À présent, la plupart des entreprises ont mis en œuvre des politiques d’externalisation, c’est-à-dire de cession de leurs unités à des entreprises extérieures, et de recours à des formes diverses de relations inter-entreprises. La notion d’entreprise « distribuée » (Mariotti, 2004) paraît adéquate pour désigner cet ensemble organisé d’entreprises juridiquement indépendantes concourant à la production d’un même bien ou service : les activités qui constituent la chaîne de valeur nécessaire à la mise sur le marché d’un produit (conception, fabrication, commercialisation, distribution, maintenance, etc.) sont distribuées au sein d’un ensemble large et structuré d’entreprises. Si bien qu’en définitive l’espace organisationnel ne correspond plus aux frontières de l’entreprise définie au sens juridique et patrimonial.

11La structuration de l’« entreprise en réseau », dans ses multiples variantes, a d’importantes conséquences sociales et tout particulièrement dans le champ des relations professionnelles. Qu’ils relèvent d’une logique de spécialisation ou exclusivement d’une logique de réduction des coûts, les rapports de sous-traitance finissent par transformer la relation d’emploi fondée classiquement sur le contrat de travail bilatéral entre un employeur et un·e salarié·e, en instaurant dans les faits, à des degrés divers, des relations triangulaires d’emploi faisant intervenir une entreprise tierce. Les salarié·e·s de la sous-traitance industrielle, des points de vente franchisés ou des services logistiques externalisés connaissent des situations de travail pour une part comparables, caractérisées par une double relation de subordination, à l’égard de l’employeur de jure et de l’entreprise cliente/utilisatrice. Dans ces conditions, les marges de négociation sont fortement limitées. La diversité des statuts et des intérêts des salarié·e·s qui se côtoient au sein des espaces organisationnels, couplée à l’indétermination des centres de décision patronaux, constitue un défi pour les syndicats appelés à reconstruire des solidarités et à redéployer leur action au-delà des frontières de l’entreprise. À la différence cependant du contrat de travail intérimaire qui prévoit formellement le transfert de l’autorité patronale vers la firme utilisatrice pour ce qui concerne l’organisation du travail, dans le cas de la sous-traitance, la firme cliente n’exerce pas une telle autorité. Mais à travers les dispositions du contrat commercial et du cahier des charges qui la lient au sous-traitant, celle-ci détermine dans une certaine mesure, directement ou indirectement, les conditions de travail des salarié·e·s de la sous-traitance.

12On peut dès lors se demander comment l’entreprise principale (donneur d’ordre, client/utilisateur, firme pivot, franchiseur…) parvient à obtenir un pouvoir de coordination et de direction sur les membres du réseau sans recourir aux contrats de travail. Émergent en effet de nouvelles structures de gouvernance, qui ne correspondent pas au processus d’intégration verticale classique. En tant qu’organisation économique de production, la firme-réseau peut être appréciée comme « une entité collective qui implémente et pérennise un unique système productif entre des firmes légalement indépendantes à travers une firme focale, laquelle détient le pouvoir (de facto) de coordonner le “tout” sans recourir à l’intégration capitalistique » (Chassagnon, 2012, 6). De ce point de vue, la notion de core-business est à géométrie variable. Le cœur du métier correspond en fin de compte aux compétences retenues en interne permettant de coordonner et de contrôler l’ensemble de la chaîne de valeurs. Les nouvelles organisations économiques ne s’insèrent plus dans la dichotomie simple entre le « marché » et la « hiérarchie » (choix du make or buy), les différents arrangements inter-entreprises se situant jusqu’alors par rapport à ces deux formes polaires. À présent, les frontières de la firme moderne apparaissent brouillées, car elles ne sont plus bornées par le capital et les contrats d’emploi de long terme, mais par « des relations de pouvoir qui résultent de l’interdépendance des ressources critiques du réseau » (Chassagnon, 2012, 7). En fin de compte, le centre des relations de pouvoir n’est plus la relation d’emploi mais la dépendance économique.

13Le modèle des plateformes numériques représente ainsi un dépassement de l’entreprise en réseau, pour trois raisons principales :

  • La valeur d’une entreprise n’est pas forcément liée à celle de ses actifs. À l’instar des « organisations virtuelles » (Becheikh & Su, 2005) qui externalisent l’entièreté des opérations de fabrication, pour ne conserver au titre de core-business que la phase de recherche et développement, les plateformes numériques ne nécessitent pas d’immobilisations corporelles. Dans tous les cas, le modèle d’affaires réside dans la mise en relation de capitaux dispersés, alimentant la confusion avec les principes de l’économie collaborative ou du partage.
  • Ensuite, les coûts de transaction sur le marché ne paraissent plus justifier l’existence des entreprises. Dans l’économie de plateforme, les coûts ex ante liés à la prospection du marché et à la négociation des contrats sont réduits au minimum. L’algorithme met en relation des clients et des prestataires de services qui, les uns et les autres, s’inscrivent en ligne. Les coûts ex post liés notamment au contrôle et aux vérifications des prestations sont également limités grâce aux appariements algorithmiques, aux classements automatisés et, selon les plateformes, aux systèmes d’évaluation par les clients. L’entreprise est dès lors réduite à sa plus simple expression, sans générer des coûts d’organisation engendrés par la gestion du personnel interne ou de la sous-traitance.
  • Enfin, l’entreprise est mise en cause dans sa fonction de régulation sociale, dès lors que la coordination administrative de l’activité – fondée sur des rapports hiérarchiques – est ici remplacée par une logique d’appariement algorithmique apparemment neutre, permettant ainsi aux plateformes numériques de mettre à distance le rôle d’employeur (voir aussi Abdelnour & Méda, 2019 ; Casilli, 2019). Par conséquent, bien plus encore que dans les cas du travail intérimaire, de la sous-traitance ou de la franchise, où la figure patronale se trouve diluée entre un pouvoir hiérarchique de jure et un pouvoir économique de facto, dans le cas du capitalisme de plateforme, le « déficit démocratique » résulte de la dissimulation des relations de pouvoir et de l’effacement de l’employeur dans son rôle d’interlocuteur patronal au sein d’entreprises repliées sur leur fonction d’intermédiation. La plateforme met en relation des usagers dont le statut de travailleurs n’est pas a priori reconnu, ouvrant la voie à des formes de mise au travail atypiques. Au motif qu’il s’agirait d’une opportunité pour procurer un revenu d’appoint à des personnes inactives, éloignées du marché du travail ou nécessitant un revenu complémentaire, l’économie de plateforme donne lieu à des formes d’institutionnalisation et de pérennisation de formes d’emplois atypiques et précaires. Ces entreprises mobilisent notamment le statut d’indépendant (ou d’auto-entrepreneur en France) ou des statuts « sui generis » comme en Belgique, où un régime peer to peer, partiellement défiscalisé, est proposé aux travailleurs des plateformes agréées assimilées en l’occurrence à l’économie collaborative5. Ces formes d’emplois participent dès lors à la précarisation de l’emploi, en normalisant l’idée que les travailleur·euse·s sont à la recherche d’un revenu complémentaire, en contournant le contrat salarial et en échappant à la réglementation du temps de travail. Plus que par une relative importance quantitative sur le marché de l’emploi, c’est par cet effet normatif et technologique que l’économie de plateforme pèse sur les relations professionnelles et questionne les pratiques syndicales.

2. Le syndicalisme à l’épreuve des nouvelles configurations de l’entreprise

14L’occultation de la nature réelle des relations de pouvoir dans l’entreprise constitue un vecteur puissant de l’affaiblissement des systèmes de relations professionnelles et des capacités de résistance collective des travailleurs. Cela se vérifie, à des degrés divers, dans toutes les relations de sous-traitance, et de façon emblématique dans le cas du travail intérimaire, où les conditions de travail sont régies en partie par l’entreprise-cliente ou utilisatrice. La généralisation de la sous-traitance permet aux donneurs d’ordre de transférer les risques et les contraintes de productivité à des prestataires de services mis en concurrence. Mais alors que le donneur d’ordre détermine largement les modes opératoires, les normes de qualité et les délais de livraison dans des organisations du travail répondant aux logiques du flux tendu et du juste-à-temps, la relation de subordination demeure dissimulée derrière le contrat commercial entre deux entreprises, réduisant ainsi les espaces de négociation entre celui qui prescrit le travail et ceux qui l’exécutent. Dans les rapports sociaux de sous-traitance, la relation triangulaire d’emploi se manifeste par l’existence d’une relation d’ingérence: « le salarié entre directement ou indirectement en relation avec le client (entreprise ou individu) qui peut, par ses exigences, influencer significativement les conditions de travail et d’emploi du salarié. Cette dernière relation est a minima une relation de service mais peut être qualifiée de relation d’ingérence, si l’influence du client est réelle et directe sur les conditions de travail et d’emploi du salarié » (Sobczak, Rorive Feytmans & Havard, 200822). Les marges de manœuvre pour la négociation du salaire, de la stabilité de l’emploi, du temps de travail et de l’ensemble des conditions de travail se trouvent limitées par la connivence commerciale qui s’installe entre le donneur d’ordre et le sous-traitant. Ainsi, la généralisation de la sous-traitance du nettoyage s’est traduite par une extension du travail à temps partiel et des horaires décalés ; et dans la maintenance des centrales nucléaires, la précarité de l’emploi et les risques pour la santé et la sécurité au travail augmentent tout au long de la chaîne de sous-traitance. Dans les configurations de l’« entreprise en réseau », la comparaison des cadres conventionnels met d’ailleurs en évidence des inégalités profondes entre les travailleur·euse·s des entités périphériques et ceux de l’entreprise principale.

15En s’inscrivant dans la prolongation de ces logiques, l’essor de l’économie de plateforme place les travailleur·euse·s et les organisations syndicales dans une situation inédite. Plus encore que dans le cas de l’intérim ou de la sous-traitance, la neutralité affichée des infrastructures numériques d’intermédiation obscurcit les relations de pouvoir réels (Gerber & Krzywdzinski, 2019). L’apparente « dématérialisation » du management à travers la plateforme numérique et la gouvernance algorithmique posent dès lors un défi considérable à « l’organisation de résistances » (Brugière, 2019). Au-delà de l’externalisation et de la fragmentation de l’emploi, il est fréquent que des travailleur·euse·s combinent plusieurs sources de revenu, ce qui rend la mobilisation moins probable et plus difficile. À cela s’ajoute une dispersion spatiale exacerbée des travailleur·euse·s, tant dans le travail numérique réalisé à distance que dans les services à la demande inscrits dans un espace local, qui réduit les chances de construire des collectifs de travail, renforçant les effets de l’individualisation des relations professionnelles. L’atomisation des travailleur·euse·s, le turnover important, la compétition interindividuelle générée par le fonctionnement des algorithmes, la qualité souvent temporaire de l’engagement (Jan, 2018), la grande part de statuts indépendants et les modes prévalant d’engagement et de surveillance (Abdelnour & Bernard, 2019) sont autant de facteurs qui tendent à mettre en cause la légitimité des organisations syndicales dans leur fonction de représentation des travailleurs.

3. Quelles réponses collectives ?

16Parmi les pratiques syndicales observées dans les services opérationnels sous-traités, en l’occurrence dans le nettoyage (Lafuente Hernández, Jamar & Martinez, 2016) et dans l’économie de plateforme, trois types de réponses collectives peuvent être identifiées pour répondre aux défis qu’induisent les nouvelles configurations de l’entreprise, marquées par le brouillage de l’employeur dans sa fonction d’interlocuteur patronal. Elles consistent : à privilégier la négociation au niveau de la branche ; à étendre le champ de l’action collective au niveau de la configuration organisationnelle, au-delà des frontières de l’entreprise ; à intégrer les travailleurs de la périphérie dans le cadre institué des relations collectives de travail.

17Une première approche vise à renouer avec la négociation de branche. Parmi les transformations marquantes des systèmes de relations professionnelles, il convient de relever une certaine tendance à la décentralisation de la négociation collective au niveau de l’entreprise. Ce mouvement a été soutenu dans plusieurs pays par l’atténuation du caractère contraignant des dispositions de branches, prenant la forme de recommandations ou d’accords-cadres, ou par l’ouverture de facultés de dérogation aux règles générales fixées par la convention de branche (Supiot, 2016). Inversant cette logique, et plus particulièrement dans le cadre de la sous-traitance interne, l’action syndicale a consisté à privilégier un renforcement de la régulation de branche. C’est le cas des activités de nettoyage industriel, où dans le contexte belge, les conventions collectives sectorielles sont prédominantes, permettant ainsi de limiter la mise en concurrence des entreprises par les coûts salariaux, d’encadrer le système de reprise du personnel, et de préserver l’action syndicale sur les lieux de travail par l’instauration de procédures de contrôle sur les chantiers.

18Cependant, cette solution ne permet pas toujours de contrecarrer certaines formes de dégradation des conditions d’emploi et de travail, comme le recours généralisé au travail à temps partiel et à des horaires de travail inconfortables, au travail détaché ou encore à des formes d’intensification du travail, qui échappent largement à la régulation, comme cela se vérifie dans le cas du nettoyage industriel. En outre, cette stratégie rencontre un certain nombre de limites dans le contexte de l’économie de plateforme. La perspective d’établir un cadre conventionnel de branche pour les entreprises et les travailleurs de l’économie de plateforme reste purement théorique dans l’actualité par le simple fait que les activités se déroulent en deçà du salariat. Par ailleurs, les problématiques spécifiques au travail par intermédiation numérique sont fréquemment transversales aux secteurs d’activité préexistants, mettant au défi la structuration des organisations syndicales. Ainsi, au niveau de la Fédération générale du travail de Belgique (FGTB), les activités de plateforme les plus visibles (comme la livraison ou le transport de personnes) ont été assimilées à la centrale professionnelle du secteur du transport, alors que d’autres plateformes proposant des services diversifiés (comme les activités de service à domicile ou à la personne, mais aussi les activités numériques) s’assimilent moins facilement à cette structure. La relative indépendance des centrales syndicales rentre ici en tension avec les questions transversales posées par l’économie de plateforme.

19Une deuxième approche revient à prendre acte des relations triangulaires d’emploi et à inscrire la négociation collective dans l’espace organisationnel défini par les nouvelles configurations de l’entreprise. Comme nous l’avons souligné plus haut, cette triangulation peut prendre des formes très différentes selon qu’il s’agisse de rapports de sous-traitance, de travail en intérim ou d’intermédiation de plateforme.

20L’option consistant à faire appel à la responsabilité sociale des entreprises (RSE), privilégiée par les employeurs, s’inscrit dans cette perspective. C’est au fond dans cette logique que l’on peut situer un certain nombre d’initiatives prises dans le cadre du dialogue social de branche européen, à travers des prises de position communes non contraignantes, visant par exemple à privilégier le choix du « mieux disant » (plutôt que le « moins-disant ») dans les adjudications de marchés ou à recommander l’adoption d’horaires de travail plus compatibles avec la vie sociale et familiale (Kirov, 2016), en particulier dans le secteur du nettoyage où les partenaires sociaux se sont accordés sur une déclaration conjointe en faveur du « nettoyage en journée », faisant appel en l’occurrence à la responsabilité sociale des entreprises clientes qui fixent les horaires de nettoyage dans le cahier de charges.

21Une autre stratégie consiste à rediriger l’action vers le centre de pouvoir économique et organisationnel effectif, en dépit de l’invisibilisation des rapports de subordination. On assiste ainsi, sur le terrain de l’entreprise, à un renouvellement du répertoire de l’action syndicale tournée vers les composantes précaires de l’emploi (Béroud & Bouffartigue, 2009). Des initiatives syndicales innovantes, ou qui émanent de collectifs de travailleur·euse·s, visent à révéler et à interpeller les centres de décisions patronaux réels, par-delà l’organisation hiérarchique formelle. L’action des syndicats américains dans les services de nettoyage (Justice for Janitors Campaign ; voir Knotter, 2017), qui privilégient l’action directe et les manifestations dénonçant la connivence entre sous-traitants et donneurs d’ordre, rentrent dans ce registre d’une pratique syndicale qui a pour but d’obtenir de meilleures conditions de travail pour les travailleurs de la sous-traitance. Une approche similaire peut être observée dans le cas de restructurations qui entraînent des licenciements collectifs dans toute la chaîne de sous-traitance. En ciblant le donneur d’ordre, les travailleur·euse·s de la sous-traitance s’invitent à la table de négociations du plan social et pointent les inégalités de traitement entre les travailleurs internes et externes. Ils engagent ainsi une réforme de la réglementation qui encadre les phases d’information, de négociation et d’accompagnement social des travailleurs licenciés collectivement (Bingen & Martinez, 2020). L’interpellation de l’employeur de facto caractérise également la conflictualité sociale dans l’économie de plateforme, tout particulièrement à travers l’action des collectifs de livreurs (Leterme, Vandewattyne & Dufresne, 2018 ; Brugière, 2019). Ainsi, les actions dirigées contre les entreprises de plateforme jouent le rôle de révélateur du rapport de subordination existant et manifestent le statut d’employeur de facto par le biais de la contestation (Cingolani, 2021).

22De manière plus structurée, les expériences de syndicalisme de réseau ou de site, étudiées dans le cas de la maintenance industrielle, visent à organiser la collaboration entre délégations de la sous-traitance et celles des firmes clientes, ce qui revient à recentrer l’action sur l’espace de travail effectif. Il s’agit dès lors de considérer que les groupes de travailleur·euse·s d’entreprises différentes qui participent à la production constituent une même « communauté de travail ». L’étude menée dans deux industries de flux dans cette perspective (nucléaire en Belgique et pétrochimique en Espagne) a permis d’analyser les effets de la triangulation du rapport salarial ainsi que les apports et les limites de deux expérimentations d’organisation syndicale et de concertation sociale qui tentent d’y répondre. Les pratiques syndicales observées contribuent à donner une consistance à la notion de « communauté de travail » à partir des enjeux de santé et de sécurité au travail. Tant dans l’industrie nucléaire que dans la pétrochimie, les expériences mettent en évidence l’existence d’une communauté d’intérêts activée par l’action syndicale, rassemblant les salarié·e·s de diverses entreprises qui partagent le même environnement de travail et affrontent les mêmes risques professionnels. Reconnaître cette identité collective mène à une réflexion sur l’opportunité d’instaurer des organes de concertation sociale élargis à la sous-traitance et complémentaires aux instances existantes. Cependant, les expériences analysées montrent également les limites de la démarche de coordination syndicale car, à défaut d’être institutionnalisée, elle repose essentiellement sur des liens de proximité entre les travailleur·euse·s (métiers, vision syndicale, relations interpersonnelles).

23Ce syndicalisme de réseau, fondé sur un territoire ou un objet de travail communs, est cependant confronté à une difficulté supplémentaire lorsque les travailleur·euse·s ne sont pas réunis sur des lieux de travail partagés et identifiables (comme des « chantiers », des « sites »), et lorsque l’entreprise-pivot recourt non pas à des entreprises sous-traitantes dotées d’une représentation syndicale, mais majoritairement à des travailleur·euse·s individuel·le·s, indépendant·e·s ou à des entités économiques de très petite taille. Dans l’économie de plateforme, l’éclatement spatial des travailleur·euse·s pose un défi supplémentaire à la création de solidarités et de collectifs de travail. Cela attire l’attention sur des espaces de mobilisation alternatifs – espaces urbains et virtuels – où la coprésence et les activités partagées mettent en évidence des conditions communes et facilitent la construction de solidarités au travail (Tassinari & Maccarrone, 2020 ; Salehi et al., 2015). D’après nos enquêtes menées auprès des travailleur·euse·s de livraison de repas en Belgique, les lieux d’attente et de convergence constituent pour les livreurs de repas et les chauffeurs un support important à la socialisation et à l’action collective. Mais cette « spatialisation » est incertaine pour les activités de plateforme plus dispersées et plus féminisées qui s’effectuent aux domiciles des clients. En revanche, les espaces virtuels développés dans le cadre du travail ou en parallèle peuvent dans certains cas contribuer à rendre visible une condition commune et à produire des stratégies de résistance. Les sociabilités transcendent ainsi les séparations entre espaces urbains et numériques avec l’emploi des réseaux sociaux. Ces types d’espaces remplissent alors une fonction de « sites » de mobilisation (Arora, 2014).

24Une troisième approche, singulièrement présente au sein de l’économie de plateforme, consiste en l’intégration des travailleur·euse·s aux statuts hétérogènes dans le champ des relations collectives de travail, d’une part, via des stratégies de requalification des statuts et, d’autre part, par des innovations organisationnelles visant l’affiliation ou la mobilisation des travailleurs.

  • 6 Cette stratégie comporte par ailleurs des limites inhérentes liées à la diversité des situations e (…)
  • 7 La loi « Rider » adoptée par le gouvernement de Pedro Sanchez en 2021 (Real Decreto – Ley 9/2021) (…)

25L’une des principales difficultés pour l’action collective dans l’économie de plateforme réside dans l’invisibilisation des rapports de subordination réels. Un enjeu central des conflits de travail est donc de confronter l’apparente neutralité des plateformes qui se positionnent en tant qu’intermédiaires neutres entre « usagers » indépendants. Identifier et qualifier le travail représente ainsi une stratégie-clé de l’activité syndicale. Celle-ci passe, d’une part, par l’action judiciaire qui vise à requalifier des travailleur·euse·s de plateforme pour qu’ils obtiennent la reconnaissance d’un statut de salarié·e. De manière emblématique, cela est illustré par les procès récents à Bruxelles qui avaient pour enjeu la requalification des livreurs Deliveroo en employés de l’entreprise. Alors que ces actions participent à un déplacement de l’activité syndicale vers l’action judiciaire, les procès sont également des espaces-temps de mobilisation et de visibilisation dans l’espace urbain et médiatique.6 Mais cette focalisation sur le statut d’emploi se reflète, d’autre part, dans le champ politique à travers la revendication systématique des deux principaux syndicats, Fédération générale du travail de Belgique (FGTB) et Confédération des syndicats chrétiens (CSC), d’une réglementation qui fait prévaloir la « présomption de salariat », à l’instar de la loi dite « Rider » qui encadre légalement le statut des livreurs des plateformes de repas à domicile, en Espagne7.

26Une deuxième réponse syndicale a été la création de nouveaux services au sein même des organisations syndicales qui opèrent de manière plus ou moins indépendante d’autres centrales. C’est le cas de United Freelancers, une organisation mise en place au sein de la CSC en dehors de sa structuration interne préexistante et qui vise à fournir informations et services, soutien judiciaire et soutien aux mobilisations pour les travailleurs des plateformes. L’innovation organisationnelle est en outre favorisée par la coexistence de syndicats traditionnels et de nouveaux types d’associations (Abdelnour & Bernard, 2019 ; Vandaele, 2018 ; Kilhoffer, Lenaerts & Beblavý, 2017). Les intermédiaires stratégiques entre le syndicalisme traditionnel et les mouvements de plateformes jouent un rôle important dans ce syndicalisme ascendant qui est souvent développé par une minorité plus active des travailleur·euse·s les plus professionnalisé·e·s. En Belgique, l’exemple proéminent est le Collectif des coursiers à vélo fondé en 2016 puis la création dans la foulée de la Fédération transnationale des coursiers (Leterme, Vandewattyne & Dufresne, 2018). Comme dans le cadre d’un syndicalisme de réseau, le caractère peu institutionnalisé des collaborations peut rendre l’action contingente à la présence et l’engagement d’acteur·ice·s individuel·le·s et elle reste fragilisée par l’importante rotation des travailleurs de plateformes.

 

Conclusions

27L’émergence du capitalisme de plateforme conduit à remettre en exergue le point de vue selon lequel la qualité de l’emploi se vérifie à l’aune des possibilités de la négociation collective. Le modèle des plateformes numériques intensifie le mouvement de désintégration de l’entreprise qui caractérise le développement multiforme de l’entreprise-réseau. Plutôt que de marquer une rupture radicale dans les formes d’organisation du travail, il exacerbe des tendances engagées précédemment par la sous-traitance et l’externalisation de l’emploi en termes de déséquilibre dans les négociations collectives. Mettant en relation des capitaux dispersés et brouillant davantage ce qui distingue entreprise et marché, l’économie de plateforme met ainsi en cause l’entreprise dans sa fonction de régulation sociale.

28Les relations professionnelles s’en trouvent profondément affectées, appelant le syndicalisme à repenser les innovations en matière d’action collective. En se retranchant derrière la gestion de l’algorithme, des entreprises de l’économie de plateforme non seulement réduisent la transparence des modalités du management, mais se dérobent aussi à la négociation, en se soustrayant à la fonction d’interlocuteur patronal à l’égard de travailleurs atomisés. Elles font ainsi l’impasse sur la négociation collective qui ne peut fonctionner qu’à la condition d’une reconnaissance mutuelle des interlocuteurs sociaux.

29Alors que les analyses des relations professionnelles ont pu, par le passé, insister sur la faiblesse des organisations syndicales à représenter les cas-limite de l’emploi précaire ou atypique, l’économie de plateforme renouvelle ainsi le constat que la désintégration de l’entreprise représente un vecteur central d’affaiblissement de la négociation collective. Cela s’accompagne d’un déficit démocratique qui met en question les rôles et rapports de pouvoir autour des relations professionnelles. C’est à la lumière de ce constat qu’il faut comprendre la focalisation de l’action syndicale sur la requalification de l’emploi en contrat de travail salarié, ce qui permettrait – en théorie du moins – d’intégrer les travailleur·euse·s des plateformes dans le cadre régulier des relations professionnelles. Une série d’autres stratégies éprouvées se heurtent à une difficulté à être transférées, généralisées ou pérennisées dans le contexte de l’économie de plateforme.

30Si la conflictualité sociale autour de l’économie de plateforme interpelle donc les organisations syndicales dans leurs propres structures et leurs stratégies face à la précarisation de l’emploi, elle met également en évidence, de façon emblématique, les risques pour les travailleurs de la décentralisation des relations collectives de travail, dès lors que l’entreprise renonce à sa fonction régulatrice. Même si celle-ci constitue un espace d’expérimentation et d’apprentissage pertinent pour l’action collective dès lors que les enjeux de l’organisation du travail et de la santé au travail se vérifient à cet endroit, ce n’est qu’à travers leur articulation avec le niveau centralisé de la négociation collective que l’on peut concevoir une refondation du système des relations professionnelles qui soit adapté aux nouvelles configurations de la production. Les limites de l’action collective au niveau de l’entreprise proviennent au premier abord de la division des collectifs de travail qui engage une reconstruction des solidarités, mais plus fondamentalement encore, de l’indétermination croissante des centres de décision patronaux et des rapports de pouvoir et de subordination réels. Les plateformes numériques apparaissent à cet égard comme un révélateur de tendances qui se marquent plus généralement l’économie. À ce titre, et indépendamment de son importance quantitative, l’économie de plateforme s’avère donc être un cadre privilégié pour l’analyse et l’expérimentation des relations professionnelles à l’avenir. Nous appelons pour cela à un programme de recherche qui permette d’en contextualiser l’analyse au-delà de ses frontières.

 

Meike Brodersen et Esteban Martinez


Bibliographie

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Notes

1 Nous nous référons principalement à l’étude La modernisation de l’organisation du travail dans le secteur du nettoyage industriel en Europe, réalisée dans le cadre du dialogue social européen sous la coordination de la Fédération syndicale européenne des services UNI-Europa (2008) et à l’étude Temps de travail, charge de travail et conciliation vie privée vie professionnelle, effectuée à la demande du Fonds de formation du nettoyage belge (2009).

2 Projet PRESUB – Industrial relations in a context of development of subcontracting dans le cadre du programme « Industrial relations and social dialogue »dela Commission européenne (2013-2014), http://institucional.us.es/presub2013/projecten.php

3 Projet interuniversitaire SEAD – Sustainable employment in the age of digitalisation (2020-2024), https://sead.be

4 L’analyse statistique rend compte de l’ampleur de la transformation des structures de l’entreprise qui se marque dès la fin du siècle dernier : en France en particulier, le taux de recours à la sous-traitance est passé de 60 % en 1984 à 87 % en 2003 (Perraudin et al., 2013, 575).

5 Le statut « pair à pair » (ou P2P), institué par la « loi De Croo » est fortement utilisé par les plateformes comme Deliveroo en Belgique où 85 % des coursiers l’utilisent.

6 Cette stratégie comporte par ailleurs des limites inhérentes liées à la diversité des situations et des motivations des travailleurs notamment en fonction du type d’activité au sein de l’économie de plateforme.

7 La loi « Rider » adoptée par le gouvernement de Pedro Sanchez en 2021 (Real Decreto – Ley 9/2021) introduit dans le Code du travail une « présomption de salariat » pour tous les coursiers utilisant les applications de plateformes de livraison comme Uber Eats, Glovo ou Deliveroo. Si l’applicabilité de cette loi s’avère fragile, cette stratégie syndicale dans l’ensemble se trouve mise en tension par la grande hétérogénéité des situations parmi les travailleurs de plateforme.

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Pour citer cet article

Référence électronique

Meike Brodersen et Esteban Martinez« De l’entreprise-réseau à l’économie de plateforme, les impasses des négociations »La nouvelle revue du travail [En ligne], 21 | 2022, mis en ligne le 24 octobre 2022, consulté le 16 octobre 2024URL : http://journals.openedition.org/nrt/12858 ; DOI : https://doi.org/10.4000/nrt.12858

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Auteurs

Meike Brodersen

Université Libre de Bruxelles

Esteban Martinez

Université Libre de Bruxelles

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Droits d’auteur

CC-BY-NC-ND-4.0

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From networks to platforms, negotiations have reached a dead end
De la empresa red a la economía de plataforma, los impasses de las negociaciones
Meike Brodersen et Esteban Martinez
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A LIRE sur l’économie de plateforme, 2 textes du CEPAG FGTB et 1 texte du GRESEA.
●”Economie de plateforme, quelle résistance face aux fausses alternatives”, 2021, CEPAG, en accès libre.
●”L’économie de plateforme, phénomène retrograde pour le monde du travail”, 2021, CEPAG, en accès libre.
●”Travailleurs de plateforme, la lutte pour les droits dans,l’économie numérique”, 2021, Gresea, Anne Dufresne et Cédric Duterme, en accès libre.