Avant de réserver vos vacances d’été, sachez que les grands opérateurs touristiques occidentaux financent et légitiment délibérément les colonies israéliennes illégales dans les territoires palestiniens occupés, contribuant ainsi activement aux violations des droits de l’homme et aux crimes de guerre.
Le 23 mai, le Centre européen de soutien juridique (ELSC), basé aux Pays-Bas, aurait déposé une plainte au pénal contre Booking.com en Hollande. La société, connue pour ses services de réservation de vacances à court et à long terme, est accusée de blanchiment d’argent lié aux crimes de guerre israéliens et de profiter des projets d’expansion illégale des colonies de l’État d’occupation. Booking.com aurait fait de la publicité pour des logements et des “activités” dans des territoires palestiniens illégalement occupés.
La plainte souligne la complicité présumée de Booking.com dans le génocide israélien, comme le détaille un rapport de Don’t Buy Into Occupation (DBIO), qui regroupe 25 ONG européennes et palestiniennes, dont l’ELSC.
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Le rapport expose l’implication des institutions financières européennes dans le financement d’entreprises qui soutiennent et légitiment les colonies illégales d’Israël et l’apartheid contre les Palestiniens.
Le rapport documente méticuleusement les différentes méthodes utilisées par les entreprises occidentales pour “jouer un rôle essentiel dans le fonctionnement, la durabilité et l’expansion des colonies illégales“.
Parmi les entreprises mentionnées figure Caterpillar, un fabricant de matériel industriel lourd dont les bulldozers blindés sont utilisés pour démolir les maisons palestiniennes et construire des colonies juives. L’entreprise est notoirement liée à la mort de la jeune militante pacifiste américaine Rachel Corrie en 2003. On peut également citer Elbit Systems, le plus grand fabricant d’armes israélien, qui produit des munitions, des drones, des véhicules de combat, des équipements de guerre électronique et des missiles utilisés dans le cadre du génocide en cours.
Un certain nombre d’entreprises surprenantes en contact avec les consommateurs sont également impliquées, notamment les principaux fournisseurs de produits touristiques et de loisirs.
L’impact sur la population palestinienne
Les résultats de l’étude montrent qu’une composante majeure de l’industrie du voyage occidentale moderne est intimement impliquée dans le maintien et la poursuite du projet d’occupation israélienne, contribuant activement aux crimes contre l’humanité perpétrés contre le peuple palestinien, en tirant profit et en s’en faisant le complice. Comme Daan de Grefte, de l’ELSC, l’explique à The Cradle :
Les colonies sont illégales au regard du droit international, entraînent des violations systématiques des droits de l’homme, constituent un crime de guerre et sont préjudiciables à toute perspective de justice et de paix en Israël/Palestine. Ces colonies font également partie intégrante d’un système de suprématie raciale qui s’apparente à l’apartheid. Plusieurs grandes entreprises de tourisme en ligne proposent des prestations dans les territoires occupés, contrevenant ainsi à leurs propres engagements en matière de droits de l’homme, tout en légitimant la politique manifestement illégale de colonisation de la Cisjordanie par Israël. En fonctionnant dans les colonies, elles amplifient les atteintes aux droits de l’homme subies par la population palestinienne locale.
Prenons l’exemple d’Airbnb, l’entreprise de “tourisme numérique” si controversée qui a cherché à déstabiliser et suppléer l’industrie hôtelière traditionnelle. Elle propose des locations à court et à long terme de logements privés dans le monde entier. Aujourd’hui, son site web répertorie “un grand nombre de colonies israéliennes“. Ces propriétés sont situées à Jérusalem-Est, en Cisjordanie et sur le plateau du Golan en Syrie.
” Dans la plupart des cas”, observe DBIO, “les descriptions des biens mentionnent l’emplacement de la colonie, mais ils sont listés comme étant situés en Israël et n’informent pas les visiteurs potentiels que le logement est situé dans les territoires occupés. En novembre 2018, Airbnb a annoncé qu’elle allait supprimer environ 200 annonces dans les colonies, “au cœur du conflit entre Israéliens et Palestiniens “.
La décision a été annulée à peine six mois plus tard en raison de nombreuses poursuites judiciaires aux États-Unis et en Israël. En 2020, lors de son entrée en bourse, la société a omis de mentionner ses intérêts commerciaux sur des territoires illégalement occupés dans les documents déposés auprès de la Securities and Exchange Commission (Commission des opérations de bourse) des États-Unis.
Dans un rapport publié deux ans plus tôt, Human Rights Watch a relevé le nombre de logements Airbnb “construits sur des terrains reconnus par les autorités israéliennes comme appartenant à des Palestiniens privés de droits d’accès“. Le rapport ajoute :
“[Airbnb] contribue à rendre les colonies de Cisjordanie plus rentables et donc durables, facilitant ainsi le transfert illégal par Israël de ses citoyens vers les colonies“.
Destination Occupation
Airbnb figure dans une base de données de l’ONU qui recense les entreprises “impliquées dans la fourniture de prestations et de services d’utilité publique favorisant le maintien et l’existence des colonies“. Il en va de même pour Booking Holdings, un autre géant américain du tourisme, qui prétend être le premier fournisseur mondial de voyages en ligne et de services connexes. Le rapport de DBIO note que la filiale de location de vacances Booking.com de l’entreprise fait de la publicité pour des hôtels, des maisons d’hôtes et des appartements de court séjour dans les colonies de peuplement des territoires occupés.
Alors que certaines annonces précisent que les propriétés sont situées dans les “Territoires palestiniens, dans les colonies israéliennes“, d’autres sont simplement étiquetées “Jérusalem“, etc. Selon la “Déclaration des droits de l’homme” de Booking.com datant de mai 2022, les clients devraient recevoir des renseignements transparents sur les propriétés situées dans les territoires occupés, mais cela n’a jamais été le cas.
Au contraire, les annonces comportent principalement des clauses de non-responsabilité, invitant les clients à consulter les conseils de voyage de leur gouvernement avant de réserver, car la région “peut être considérée comme touchée par un conflit“.
La société de voyage espagnole eDreams et le groupe américain Expedia, qui exploite des portails tels que Hotels.com et Trivago, sont également impliqués dans la publicité de propriétés situées dans des colonies juives illégales, sans informer les clients de leur statut illégal. Les clients ne connaissent pas le statut illégal des colonies au regard du droit international. Au lieu de cela, l’entreprise qualifie ces annonces de “conformes à la législation en vigueur“, tout en affirmant qu’elle retire manuellement les biens “illégaux” s’ils sont identifiés par son personnel ou signalés par les visiteurs du site web.
Tripadvisor et sa filiale Viator vont plus loin en promouvant des excursions et des activités dans ces colonies, y compris des visites de vignobles construits sur des terres palestiniennes illégalement appropriées, dont un situé à Tel Shiloh, construit sur des terres palestiniennes spoliées et géré par un conseil local de colons.
Le groupe allemand TUI, l’une des plus grandes sociétés de tourisme au monde, propose des visites guidées de ces colonies, qu’il présente comme faisant partie d’”Israël et de Jordanie” ou des “Points forts d’Israël“. Ces circuits impliquent souvent la visite de sites construits sur des terres pillées, qui ont déplacé des communautés bédouines palestiniennes indigènes, comme le Parc national de Qumran – des communautés toujours plus fréquemment déplacées de force de leurs terres ancestrales, et qui souffrent aujourd’hui de restrictions écrasantes en matière d’accès à l’eau, à l’électricité, et plus encore.
Ces circuits sont intitulés “Israël et Jordanie” et “Points forts d’Israël“. Un autre est intitulé “Retour aux sources – Israël“, qui inclut des visites de Bethléem occupée, des hauteurs du Golan occupées et des sites touristiques de Jérusalem-Est occupée.
La DBIO estime que les activités du groupe TUI sont particulièrement préoccupantes “car elles soutiennent l’existence de colonies illégales et contribuent à leur normalisation“. Daan de Grefte, de l’ELSC, explique à The Cradle que les agences de voyage en ligne, en proposant des propriétés sur des terres colonisées, confèrent aux colonies une apparence de normalité et encouragent les touristes inconscients à visiter les colonies et à y dépenser leur argent.
” Les Palestiniens ne sont pas autorisés à se rendre dans les colonies, si bien que les logements répertoriés sur ces sites ne sont accessibles qu’aux étrangers et aux Israéliens. Ces entreprises opèrent donc dans un environnement fortement discriminatoire et permettent le fonctionnement d’économies illicites des colonies. Les OTAs, en opérant dans ces circuits économiques illicites créés sur des terres palestiniennes volées, font prendre le risque de tirer profit des crimes de guerre qui ont mené à l’établissement des colonies. Il est plus que temps de remettre en question le climat d’impunité régnant autour de ces activités, d’autant qu’Israël s’empare de superficies de terres palestiniennes sans précédent et que la répression de la population civile monte d’un cran.“
Impacts économiques pour Israël
Ainsi que The Cradle l’a déjà souligné, les préjudices causés à l’économie de l’État occupant par l’opération Al-Aqsa Flood de la résistance palestinienne ont été considérables. Depuis, ils n’ont fait que s’aggraver, avec de sérieuses pénuries de main-d’œuvre dans des secteurs clés, des budgets militaires colossaux qui grèvent des finances déjà chancelantes, et l’effondrement de la confiance des investisseurs étrangers.
En février, Moody’s a revu à la baisse la cote de crédit d’Israël, avertissant que les perspectives économiques du pays étaient “dans le rouge” et qu’elles allaient probablement encore se dégrader si la guerre se prolonge, perspective quasi-assurée.
Au cours des six derniers mois, l’industrie touristique israélienne a été particulièrement touchée. Peu de temps après les sombres prévisions de Moody’s, Yossi Fattal, directeur général de la Chamber of Inbound Tourism Organizers, un organisme commercial représentant les agences de voyage, les hôteliers et d’autres entreprises du secteur, a déploré que l’État occupant “soit devenu l’un des pays les plus coupés du monde, à l’instar de la Corée du Nord“.
Avant le 7 octobre, 250 compagnies aériennes assuraient des vols à destination et en provenance de Tel-Aviv : elles ne sont plus que 45 aujourd’hui. Comme le rapporte Fattal :
” Quatre-vingt pour cent des vols sont aujourd’hui assurés par des avions israéliens de la compagnie [israélienne] El Al… [Il s’agit] d’une triste victoire du Hamas sur Israël. La guerre nuit à l’image stratégique d’Israël. Il aurait fallu qu’Israël trouve un moyen de faciliter et d’encourager les touristes à venir ici malgré la guerre… Les polices d’assurance nécessaires pour se rendre en Israël sont énormes.“
Bien entendu, ce ne sont pas seulement ces “polices d’assurance” qui dissuadent les touristes. Outre les problèmes de sécurité, le génocide de Gaza a porté un coup fatal, probablement définitif, aux relations publiques internationales d’Israël.
La brutale et meurtrière réalité de l’occupation et de la colonisation israéliennes s’inscrit littéralement sur les écrans de télévision, d’ordinateur et de smartphone du monde entier, et les agissements de Tel-Aviv suscitent un rejet mondial et un boycott comme jamais auparavant.
De nombreuses entreprises et marques occidentales de premier plan, ayant initialement exprimé leur solidarité avec Israël, ont fait état d’une baisse considérable de leurs revenus en raison des critiques des consommateurs. De tels aveux démontrent amplement l’urgence ressentie par tous les peuples de demander des comptes aux entreprises qui soutiennent le processus d’éradication du peuple palestinien par Israël depuis 1948.
Cette constellation criminelle s’étend à toutes les industries et à tous les secteurs imaginables, et de nombreux coupables tentent de dissimuler leur complicité et leur soutien au vu et au su de tous. Mais à mesure que les initiatives de boycott et de désinvestissement se multiplient au niveau local et, de plus en plus, avec l’aval des gouvernements et des institutions, le retour à la “normale” pour Israël et ses bailleurs de fonds occidentaux risque de ne jamais se produire, à quelque niveau que ce soit.
Traduction : Spirit of Free Speech