Choisir son camp

Monsieur le Juge, je ne sais pas très bien pourquoi on m’a traîné ici, mais une chose est sûre : je suis innocent. Les accusations dont je suis l’objet sont calomnieuses. Lisez le dossier, écoutez mes témoins : il n’y a rien de sérieux là-dedans. Vous savez, les gens qui m’accablent parlent sans savoir. Ils prêtent l’oreille aux cancans et aux rumeurs, sans vérifier, sans rien savoir. Si vous voulez mon avis, ce sont des frustrés qui cherchent à se faire mousser. Sans doute sont-ils en mal de reconnaissance ? Quelle autre explication ? Ils ont envie de briller en société, et leur seule manière d’y parvenir – certes pathétique – c’est de m’accuser. À la belle heure !

Mais je n’ai pas le profil de l’emploi, Monsieur le Juge. Dois-je vous rappeler que je mène une vie normale ? Que je me lève tous les matins. Que je gagne ma vie à la sueur de mon front. Que je suis un citoyen qui paie ses impôts. Que je me soucie de mes enfants (même s’ils sont grands à présent). Bientôt, j’espère avoir des petits-enfants pour occuper mes vieux jours et leur raconter des histoires. Enfin, je ne suis pas très doué pour raconter des histoires. Contrairement à mes accusatrices, je n’ai jamais été adepte des fables et contes à dormir debout. Mes petits-enfants, je les emmènerai plutôt au cinéma. Ils mangeront des crèmes glacées, on regardera ensemble des dessins animés. Il y en a toujours de nouveaux qui sortent – merveilleux ! – même si j’ai un faible pour ceux de mon enfance : Bugs Bunny & Speedy Gonzalez, Tom & Jerry, Donald Duck & Oncle Balthazar…

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