Gaza, la trêve anéantie

■ Ce 18 mars 2025, au bas de l’article “Gaza, le Hamas veut faire la preuve de l’échec de Netanayou“, nous indiquions, quant à la situation à Gaza, “Peu d’informations dans la presse occidentale, alors qu’Israël bloque tous les approvisionnements de l’enclave,  y compris l’électricité“, et nous concluions :
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Ne pas voir et ne pas entendre un peuple qu’on veut mettre à mort et qui résiste.
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■Alors qu’Israël mène des frappes (en principe interdites) régulières sur Gaza depuis l’entrée en vigueur de la première phase du cessez-le-feu, les frappes exécutées dans la nuit de lundi 17 mars à mardi 18 mars  à 2 heures du matin (les USA ayant déclaré “avoir été consultés préalablement”) sont passées à une ampleur supérieure, faisant plus de 400 morts, essentiellement des femmes et des enfants, tuant également 4 dirigeants du gouvernement de l’enclave de Gaza, membres du Hamas à Gaza, et faisant plusieurs centaines de blessés.

Selon le bilan du 19 mars 2025 du Ministère de la Santé de l’enclave, les bombardements israéliens constants déclenchés depuis la nuit du 17 mars au 18 mars auraient fait 970 morts en 2 jours. Israël (qui a envoyé samedi 15 mars une équipe de négociation au Caire pour discuter avec l’Egypte de la libération des derniers otages) déclare souhaiter la prolongation de la première phase du cessez-le-feu (en principe terminée) jusqu’à la mi-avril et, outre la libération immédiate des otages (prévue dans la seconde étape, 59 otages, tous des hommes, sont toujours détenus, dont 34 considérés comme morts par l’armée israélienne) exige la démilitarisation immédiate de l’enclave de Gaza, soit le désarmement des unités militaires du Hamas et autres mouvements Palestiniens présents mais également le désarmement de la police palestinienne de l’enclave de Gaza, qui a repris son service officiellement depuis le début de la trêve (notamment contre les pillards, les détournements et le marché noir), également le désarmement des unités des douanes de l’enclave de Gaza (une partie des douaniers gazaouis ayant été tués ou blessés lors de l’assaut ou de la destruction de leurs postes-frontières, seules parties accessibles de la frontière clôturée entre Israël et l’enclave de Gaza, lors de l’invasion israélienne de l’enclave  suite aux événements du 7 octobre 2023).
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Entre temps, le soutien militaire à Israël (déjà stratégique et important sous Joe Biden ) s’amplifie sous Donald Trump (ce bon copain de Netanayou, ensemble ils faisaient des virées mémorables à New York dans les années 1980, Donald  Trump, promoteur immobilier et fils du promoteur immobilier Fred Trump, lui-même soutien de la droite israélienne et peut être proche dans sa jeunesse du Klu Klux Klan, et Netanayou, fils d’un historien nationaliste et ambassadeur d’Israël aux Nations Unies).
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■Dans la nuit de mardi 18 mars à mercredi 19 mars, le gouvernement israélien a accepté à l’unanimité la réintégration d’Itamar Ben Gvir comme Ministre de la Sécurité Nationale, dirigeant du parti Force Juive (partisan de la colonisation de Gaza et de la Cisjordanie et de l’expulsion des Palestiniens, comme un autre parti israélien d’extrême droite, Mafdal, sionisme religieux  représenté par Bezazel Smotrich, Ministre des Finances, resté lui conditionnellement au sein du gouvernement Netanayou en janvier 2025) qui avait démissionné en janvier 2025 opposé au cessez-le-feu et à la trêve et à son contenu prévu.
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Ce 21 mars 2025, le directeur du Shin Beth (service de renseignement intérieur israélien), qui considérait que le Shin Beth est au service des israéliens et non de Netanayou, très critique sur la guerre à Gaza et ses conséquences, a été limogé,  contre l’avis de la Procureure Générale de l’Etat d’Israël, ce limogeage ayant été suspendu par la Cour Constitutionnelle israélienne le temps de l’intriduction de plusieurs recours. La Procureure Générale de l’Etat israélien, supervisant notamment sans fléchir les 4 instructions judiciaires en cours à l’égard de Netanayou, notamment pour corruption, (elle est surnommée par les médias israéliens “la dernière opposante à Netanayou”) devrait voir son mandat suspendu, via une motion de défiance,  ce 23 mars 2025, l’extrême-droite israélienne souhaitant selon ses termes “la renvoyer à la maison à la cuisine”. En éliminant les deux derniers hauts fonctionnaires légalistes et critiques des glissements illibéraux et d’extrême droite de Netanayou et de son gouvernement, ce dernier continue une transformation illibérale des institutions de l’Etat israélien et restaure un contrôle sur l’appareil d’état israélien, contrôle qui lui autorise, sans réelle critique de certains secteurs de cet appareil d’état, notamment une nouvelle phase de la guerre génocidaire contre le peuple palestinien et l’expansion de la colonisation.
Le 21 mars 2025, le Ministre de la Défense d’Israël a menacé d’annexer certaines parties de Gaza .
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■Israël annonce également ce mercredi 19 mars une vaste offensive militaire dans le nord de l’enclave de  Gaza, ayant enjoint à la population palestinienne, présente ou de retour, de faire mouvement vers le centre de l’enclave et vers la côte. L’intention affirmée de l’armée israélienne  est de reprendre le contrôle de la moitié du couloir de Netzarim (long de 6 kilomètres, en dessous de la ville de Gaza, séparant l’enclave de Gaza en deux, l’armée israélienne l’avait évacué au début de la trêve, des forces de sécurité privées americaines y ayant pris position depuis le début de la trêve,  qui l’ont évacué le 19 mars) tel qu’appelé par l’armée israélienne ou route des Martyrs telle qu’appelée par les Palestiniens et de créer au sein de Gaza une zone de blocage (“buffer”) des mouvements nord-sud (et sud-nord). En date du 19 mars, l’armée israélienne a bloqué l’avenue Salah-Al-Din, une des 2 routes importantes pour les mouvements du nord vers le sud (et du sud vers le nord) dans Gaza,  la circulation entre le nord et le sud n’etant plus possible que via la route côtière Al Rachid. L’armée israélienne a également déployé une brigade dans la partie sud de la frontière entre Israël et l’enclave de Gaza (en dessous du couloir de Netzarim) pour les futures opérations qu’elle envisage, enjoignant la population palestinienne présente au sud de refluer vers Khan Younes et vers la côte.
Ainsi, l’armée israélienne s’empare actuellement à l’intérieur de l’enclave de Gaza sur plusieurs kilometres de profondeur de toutes les zones frontalières avec la frontière israélienne.
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Comme le précise l’édition du Haaretz de ce 22 mars 2025, Israël se prépare à occuper Gaza, à rétablir le régime militaire et à mettre sous contrôle complet les Palestiniens.
En date du dimanche 23 mars, l’armée israélienne a demandé à la population palestinienne l’évacuation d’un quartier de Rafah, ville frontière avec l’Égypte, devenue zone de combat.
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■Comme le souligne l’Association France Palestine de Solidarité, le caractère mensonger des justifications du gouvernement israélien pour la reprise des hostilités doit être mis en évidence : refus par le Hamas des propositions de l’émissaire américain de Donald Trump,  alors que la proposition de reconstruction de Gaza de la Ligue Arabe, présentée par l’Egypte, soutenue par la Confédération des Etats Islamiques, que le Hamas a déclaré prendre en considération, prévoit sa mise à l’écart et la mise en place d’une gouvernement de technocrates pour diriger Gaza et sa reconstruction. Également, il y aura lieu d’observer, dans les semaines à venir, l’intensification des pressions sur certains Etats arabes, notamment la Jordanie et l’Egypte, pour accepter des populations palestiniennes “volontairement déplacées” de l’enclave de Gaza (Netanayou a décidé, suite à la “proposition Trump de (re)construction de la Riviera de Gaza”, de mettre en place une agence dédiée à l’accompagnement des départs “volontaires” de Palestiniens de l’enclave de Gaza).
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■Le Hamas, quant à lui, a appelé l’ONU à intervenir et au respect du cessez-le-feu et de la trêve, tels qu’acceptés par les 2 parties, et aux négociations pour concrétiser la seconde étape de la trêve, qui doit voir le retrait complet des troupes israéliennes de l’enclave et la libération des otages restant.
Les blocages des approvisionnements notamment en nourriture, médicaments, diesel, tentes et électricité, toujours en cours, doivent également être levés. Comme il l’a déclaré depuis plusieurs semaines, le Hamas s’en tient à l’accord conclu en 2024, à Pékin, sous l’égide de la Chine, entre toutes les organisations palestiniennes, accord qui prévoit que l’enclave de Gaza soit dirigée par un gouvernement civil de technocrates palestiniens.
Le représentant du Fatah à Gaza a demandé le 22 mars 2025  au Hamas de quitter le gouvernement de Gaza.
Pour Mr Abbas, président de l’Autorité Palestinienne en Cisjordanie, le gouvernement civil palestinien de Gaza devrait répondre de son autorité, ce que rejette le gouvernement de Netanayou, l’Autorité Palestinienne n’étant plus considérée comme un interlocuteur.
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■L’Union Européenne s’est déclarée le 20 mars 2025 prête à travailler à la reconstruction de Gaza sur base du plan de la Ligue Arabe présenté par l’Egypte.
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Victor Serge,
POUR Press,
Article clôturé le 23 mars 2025, sources, notamment AFP, Haaretz et Al Jazeera.
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A LIRE, en accès libre, sur Bruxelles 1, 20 mars 2025.
■”Stop au génocide à Gaza, Free, Free, Palestine, Manifestation à Bruxelles le 20 mars 2025 devant les Affaires Étrangères“, à l’appel de l’Association Belgo-Palestinienne, de l’Union des Progressistes Juifs de Belgique, du mouvement Intal et de l’ONG Vrede.
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Pour Press vous offre à lire la première partie, portant sur la situation des Palestiniens et Gaza, de l’interview, par Rabih Eid, d’Azmi Bichara (né en 1956, palestinien et arabe israélien, docteur en philosophie de l’Université Humboldt de Berlin et écrivain, fondateur en 1996 du Balad ou Rassemblement Démocratique National, parti arabe israélien de gauche, laïc et antisioniste, regroupant des militants israéliens, arabes et juifs, tous antisionistes, ancien membre de la Knesset, parlement israélien, de 1996 à 2007),  penseur arabe et directeur du Centre Arabe pour la Recherche et les Études Politiques (ACRPS), installé à Doha, et parue en arabe le 16 février 2025 sur le journal saoudien  Al-Araby-Al-Jadeed, publiée en français le 17 mars 2025 par le CAREP – Paris. Azmi Bichara y affirme qu’un tel plan constituerait la réponse concrète aux intentions de Donald Trump visant à expulser les Palestiniens de Gaza. Il souligne que Donald Trump ne respecte que les puissants qu’ils soient alliés ou adversaires, et qu’il a surtout vu la faiblesse des réactions du monde arabe face à la guerre d’extermination menée par Israël dans l’enclave. Il met en garde contre l’extrême-droite israélienne au pouvoir, qui ne considère plus l’Autorité Palestinienne comme un acteur nécessaire, et insiste sur l’urgence de reconstruire l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) et de réactiver ses institutions.
La seconde partie, portant sur la Syrie, sera publiée ultérieurement.
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A LIRE, en accès libre.
Azmi Bishara, Les arabes doivent rendre Gaza habitable avant d’attendre l’autorisation de ceux qui veulent chasser ses habitants“,  partie 1 de son interview, CAREP – Paris, 17 mars 2025.