Introduction
Durant le confinement généralisé en mars et avril de cette année, l’équipe de la FUCID a dû annuler ses rencontres hebdomadaires que sont les Midis de la FUCID. Chaque jeudi midi, durant l’année académique, un·e ou plusieurs intervenant·e·s sont en effet invité·e·s à discuter avec le public de thématiques liées principalement à l’actualité, aux liens Nord-Sud et aux droits humains. L’un des intervenants attendus pour ce second quadrimestre était Damien Charles, co-réalisateur (avec Pauline Dutron) d’un documentaire portant les témoignages de membres de communautés indigènes et paysannes d’Amérique latine. Ce Midi, finalement diffusé sous forme de podcast[1] (distanciation sociale oblige), a permis d’interroger Damien Charles sur les luttes engagées par ces populations contre des projets menaçant leur territoire et de nous questionner sur les liens entre écologies du Nord et du Sud.
Point commun de ces menaces :
Il y a, à chaque fois, une volonté de convertir ces territoires qui sont habités par ces communautés en sources de profits, que ce soit raser une forêt pour y planter du soja et l’exporter en Europe pour nourrir des bovins ou repousser une communauté hors des plages qu’elle habite (…) pour les transformer en des espaces disponibles pour le tourisme de masse.
L’extractivisme, stratégie de développement basée sur l’exploitation des ressources naturelles (qu’elles soient minières, pétrolières, agricoles), s’est largement déployé en Amérique latine depuis les indépendances. Il suit la trajectoire économique imposée par les colonisateurs, qui cantonnaient les différents pays du continent dans un rôle d’exportateurs de matières premières. Et même si, dans les années 2000, de nombreux gouvernements progressistes de gauche arrivés au pouvoir ont essayé de réorienter la rente des matières premières vers des programmes sociaux et ont clamé l’importance de la protection de la nature
[2], les droits des communautés indigènes et paysannes furent, et sont toujours, bien souvent bafoués et de nombreux peuples menacés d’expropriation. Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui allient plaidoyer et désobéissance civile afin de pouvoir rester sur un territoire intimement lié à leur identité, leur culture, leur existence même.
Écologie du Sud, écologie du Nord
Alex Buron
Bibliographie
- ARIES Paul, 13 décembre 2018, L’écologie des milieux populaires, Bruxelles : Agir par la Culture, https://www.agirparlaculture.be/lecologie-des-milieux-populaires/, consulté le 16 juillet 2020.
- BERTHIER Aurélien, 9 décembre 2014 ; Entretien avec Christian Laval : Le commun à la confluence des contre-courants, Bruxelles : Agir par la Culture, https://www.agirparlaculture.be/christian-laval-le-commun-a-la-confluence-des-contre-courants/?sf_action=get_data&sf_data=all&_sf_s=indig%C3%A8ne, consulté le 13 juillet 2020
- Camille BORDENET, 13 décembre 2018,« Des ZAD, mais pour quoi faire ? », Le Monde, https://www.lemonde.fr/m-actu/article/2014/12/14/des-zad-mais-pour-quoi-faire_4540277_4497186.html.
- DUTERME Bernard, mai 2008, Mouvements indigènes en Amérique latine, Louvain-la-Neuve : CETRI, https://www.cetri.be/Mouvements-indigenes-en-Amerique, consulté le 13 juillet 2020.
- MAUDUIT Xavier, mai 2020, La nature et le capital, Paris : France Culture, « Le cours de l’histoire ».
- NALPAS Dominique, SCOHIER Claire, 15 octobre 2018, La transition écologique est-elle soluble dans le syndicalisme ?, Bruxelles : Inter-Environnement Bruxelles, https://www.ieb.be/La-transition-ecologique-est-elle-soluble-dans-le-syndicalisme, consulté le 16 juillet 2020.
- OUASSAK Fatima, 21 janvier 2020, lors de l’événement Les quartiers populaires, au cœur des enjeux écologiques et citoyens ?, Paris, https://www.youtube.com/watch?v=AJopU4RJ7eE&ab_channel=Labaseparis .
- ROYMadeleine, 11 janvier 2018, Extractivisme et militantisme écologique en Amérique latine, Paris : Classe Internationale, https://classe-internationale.com/2018/01/11/extractivisme-et-militantisme-ecologique-en-amerique-latine/ , consulté le 13 juillet 2020.
- PELENC Jérôme, 2017, Les ZAD – ou comment s’opposer tout en proposant, Liège : Barricade, 16 pages.
[1] « Amérique latine : voix de résistance », disponible à https://www.fucid.be/autres-publications/
[2] La Constitution équatorienne de 2008 reconnaît ainsi les « droits inaliénables de la nature » tout en ouvrant des territoires indigènes à l’extraction pétrolière, tandis qu’Evo Morales se proclame « défenseur de la Pachamama » (la Terre-mère) tout en relançant la politique extractiviste en Bolivie (Roy, 2018).
[3] Zone à Défendre : mouvement social de résistance contre de grands projets dits « inutiles et imposés », essentiellement face à l’urgence climatique. La première ZAD a été créée en France en 2009 à Notre-Dames-Des-Landes où des « zadistes » vont occuper le bocage afin de bloquer la construction d’un aéroport (Pelenc, 2017).
[4] En Europe, 3% des propriétaires terriens contrôlent la moitié des terres cultivables. En Belgique, par exemple, la coopérative Terre-en-vue a été créée afin d’aider les agriculteurs porteurs de projets agroécologiques à accéder à la terre.
[5] À Namur et Louvain-la-Neuve, par exemple.
[6] C’est ainsi que des populations indigènes sont parfois chassées de leur terre au nom du développement économique, mais également, dans d’autres cas, de la protection de la nature par la constitution de parcs nationaux, alors même que ces peuples vivent dans ces espaces, dont ils protègent la biodiversité depuis des centaines d’années.
[7] C’est la « tragédie des communs », théorie développée par Garret Hardin.
[8] Une lutte ne visant pas un territoire particulier (protéger une forêt, empêcher la construction d’un aéroport…), mais étant « globale » dans le but de « sauver le climat ».