Rire sur le dos des pesticides

Les pesticides présentent des risques pour la santé et pour l’environnement. Le métier de Frédéric Jomaux, en journée, est d’aider les communes à s’en débarrasser. Et le soir,
il s’en va par monts et par vaux faire rire le public avec des blagues à propos de son expérience de conseiller en gestion environnementale.

Comment vous est venue l’idée d’un spectacle comique sur les pesticides?
Il fallait absolument intéresser les gens et les sensibiliser sur la dangerosité des produits phytosanitaires. Mais des conférences, ce n’est pas très marrant et le sujet est anxiogène pour beaucoup. Virginie Hess, qui travaillait alors à Inter Environnement Wallonie et moi, coordinateur au Pôle Wallon de Gestion Différenciée de Namur, nous avons pensé au théâtre comme moyen de communication. Virginie faisait déjà de la comédie, moi également, étant formé à l’improvisation théâtrale, au clown et au mime. C’est ainsi qu’on a lancé l’asbl Ecoscénique!

Ce projet se veut une plateforme qui favorise les échanges et les collaborations entre les sphères artistiques et environnementales. Ces deux secteurs gagnent à mieux se connaître l’un l’autre pour inspirer la transition nécessaire vers une société plus juste, plus libre, et plus verte. La scène est un bon outil pédagogique et humoristique pour communiquer sur le danger des pesticides et parler de tolérance à la végétation sauvage.

Votre spectacle c’est du vécu axé sur votre expérience professionnelle?
Je concilie travail et passion. Mon boulot, comme coordinateur d’une équipe de six personnes au Pôle de Gestion Différenciée, est d’aider les communes à gérer leur espace vert de façon écologique en passant à zéro pesticide. Certaines villes, comme Bruxelles, y sont arrivées, mais pour la plupart, on est toujours en phase de transition avec du conseil, de la formation, de l’information. Certains élus s’inquiètent de la pression des citoyens pour que «ça reste propre», c’est-à-dire pas de «mauvaise herbe». Or il y a moyen de gérer la végétation sauvage de façon réfléchie. On aide les communes à communiquer avec les citoyens.

D’ailleurs on progresse, puisqu’on est passé de deux communes à plus de cinquante (sur 262 au total) depuis l’arrêté de 2013 interdisant les pesticides. L’année 2019 sera zéro pesticide!

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Revenons à cette conférence-spectacle que vous donnez. Ma parole, vous êtes seul sur scène?
Pour ce premier spectacle «Graines de voyous», je suis seul car Virginie a été engagée au Festival International du film nature.

Geneviève Cabodi est ma metteur en scène. Elle est formée à la conférence gesticulée qui est un concept développé en France pour parler à partir de ses émotions et de ses expériences. Dans «Graines de voyous», nous avons voulu mettre de la légèreté pour parler de l’industrie des pesticides et ses dangers, et trouver des métaphores, faire rire; le tout dans un dosage d’humour maîtrise. La première fois que j’ai joué, j’avais invité mon réseau professionnel du Pôle de gestion différenciée. Bien accueilli, je me suis lancé. J’ai joué une dizaine de fois l’an dernier. Cette année ce sera un peu plus…

Qui sont vos spectateurs et vos commanditaires?
Nous sommes le plus souvent invités par les communes. Le public est très varié. Entre vingt et cent quarante personnes. Le souci, c’est que nous intéressons surtout les gens déjà avertis ou convaincus comme celui qui se mobilise durant les trois mois du Printemps Sans Pesticide organisé par l’asbl Adalia. On joue la plupart du temps dans les salles communales ou de mariage, dans les centres sportifs, mais on voudrait aller davantage dans les lieux et milieux culturels.

Comment voyez vous la suite de Graines de voyous?
Je voudrais que le spectacle soit encore plus interactif, même si, à partir d’une trame, je laisse assez bien de place à l’improvisation. J’aime bien voir les réactions des gens, je leur pose des questions à partir de l’histoire que je raconte et le tout dure environ une heure vingt. C’est à la fois beaucoup et peu pour amener les gens à refuser les pesticides et le glyphosate chez eux et dans leur commune. Notre avenir repose sur notre capacité collective à faire preuve de créativité et d’imagination.

Sinon, nous préparons à Ecoscénique une nouvelle création qui sera probablement du théâtre forum. Mais d’ici là, d’autres séances de «Graines de voyous» sont programmées, mais on peut aussi nous inviter à la présenter!