Officiellement, il s’agissait de la première Rencontre paneuropéenne des autorités locales et la nouvelle génération de traités de libre-échange. La dénomination recouvre en fait le rassemblement des élus et représentants des collectivités locales qui, en Europe, se sont déclarées hors TTIP & CETA.
Des représentants d’une quarantaine de villes de 9 pays différents (e.a. Birmingham, Cologne, Corfou, Grenoble, Madrid, Séville, Vienne et… Bruxelles ville avec Didier Wauters, conseiller communal à l’origine de la motion, ainsi que Watermael-Boitsfort avec son bourgmestre Olivier Deleuze) se sont retrouvés les 21 et 22 avril dans la capitale catalane. C’est assez naturellement que Barcelone a organisé cette rencontre. Ada Colau, «l’indignée» devenue maire de Barcelone fin mai 2015, avait fait voter dès l’automne une résolution faisant de sa ville une zone hors TTIP.
Le mouvement a pris de l’ampleur, comme le montre cette carte d’Europe, sur le site renouvelé de TTIP free-zones. Sans même reprendre les villes et comtés nord-américains, ce sont aujourd’hui plus de 1.600 collectivités locales qui se sont opposées aux traités transatlantiques. Parce qu’elles entendent jouer un rôle dans le développement futur de l’Europe et démontrer que des alternatives, à leur niveau par exemple, existent bel et bien.
Ces deux jours de discussion se sont conclus par la déclaration de Barcelone (traduction française ci-dessous). Laquelle exige la suspension des négociations du TTIP et du TiSA, la renégociation d’un nouveau mandat et le refus de ratification du CETA.
Une deuxième rencontre devrait avoir lieu d’ici début 2017. La ville de Grenoble se propose de l’accueillir.
Photos et revue twitter #BCNnoTTIP
La Déclaration de Barcelone
Nous, maires et élus locaux, participant à la première Rencontre paneuropéenne des autorités locales et la nouvelle génération de traités de libre-échange, déclarons que:
La Commission européenne, mandatée par les États membres, a entamé des négociations avec les États-Unis d’Amérique sur le TTIP (alias PTCI, Partenariat Transatlantique sur le Commerce et l’Investissement ), le CETA (alias AECG, Accord Economique et Commercial Global) et le TiSA (alias ACS, Accord sur le Commerce des Services). Ces traités sont négociés d’un façon non-transparente qui ne satisfait pas aux critères européens de démocratie et de participation.
Nous croyons que la transparence ne peut pas être sacrifiée au bénéfice du secret commercial. Les instances locales et régionales doivent jouer pleinement leur rôle dans la négociation des mandats.
Aujourd’hui, l’Europe se trouve à la croisée des chemins. Les crises que traverse l’Union Européenne appellent une solution politique. De ce fait, nous croyons que l’Europe doit placer au centre de sa stratégie certaines valeurs fondamentales comme la solidarité, le respect des libertés et la justice. Il est douteux que cette nouvelle génération d’accords commerciaux soit bénéfique à la société dans son ensemble. L’Europe doit soutenir son économie en renforçant les droits sociaux, économiques, environnementaux ainsi que le droit du travail et ne peut se contenter d’élargir purement et simplement le libre-échange.
Nous sommes profondément préoccupés par le fait que ces traités feront peser un risque sur notre capacité à légiférer et à utiliser les fonds publics (y compris les sommes consacrées aux marchés publics), ce qui sera gravement préjudiciable à notre mission d’assistance dans des domaines aussi élémentaires que le logement, la santé, l’environnement, les services sociaux, l’éducation, le développement économique local ou la sécurité alimentaire.
Nous sommes également inquiets du fait que ces accords mettront à mal les principes de la démocratie en réduisant considérablement la portée du politique et en imposant des choix dans la gestion des affaires publiques. La mise en place de toute une série de mesures aura des conséquences très lourdes sur la démocratie locale: l’ISDS (règlement des différends entre investisseurs et États) ou l’ICS (système juridictionnel des investissements), la coopération en matière de réglementation au niveau du TTIP et les changements dans la réglementation des dépenses gouvernementales et des services publics.
Nous reconnaissons l’importance du commerce de biens et de service pour le bien-être du citoyen mais nous soulignons le fait que la compétitivité et la croissance économique ne devraient pas être les seuls critères utilisés pour élaborer des traités commerciaux tels que notamment le TTIP, le CETA ou le TiSA.
Nous croyons que le commerce international ne doit pas être fondé sur des critères limités au pur libre-échange. Nous devons défendre un commerce équitable, durable et respectueux du droit du travail.
Nous considérons qu’il est de notre devoir, en tant que représentants élus, de défendre les communautés locales et les institutions démocratiques comme étant des espaces de débat et de prise de décision, de renforcer les politiques publiques menées pour le bien de nos citoyens, qui protègent l’environnement et soutiennent les PME et l’économie locale.
Nous saluons le mouvement social qui a rendu possible ce débat européen, nous voulons lui rendre hommage pour son rôle et nous l’encourageons à continuer son travail.
Pour toutes ces raisons, nous exigeons que les négociations actuelles sur le TTIP et le TiSA soient suspendues, qu’un nouveau mandat soit renégocié pour prendre en compte les exigences de ceux qui n’ont pas été consultés et nous demandons avec insistance au Parlement Européen, au Conseil de l’Europe et aux gouvernement nationaux de ne pas ratifier le CETA.
Cette Déclaration sera adoptée par toutes les villes présentes et signée par tous ceux qui y adhéreront à l’avenir. Elle sera présentée aux responsables de l’Union Européenne, aux gouvernements nationaux et aux institutions et organisations concernées.
Barcelone, le 21 avril 2016
Addenda
Engagé à travailler en partenariat avec la société civile et d’autres acteurs pour construire un programme relatif au commerce qui respecte les personnes, la planète et garantit le droit au développement local. De même, nous insistons sur la nécessité d’engager un vaste partenariat en Europe des municipalités semblables qui ont des préoccupations au sujet de l’impact des TTIP, CETA et TiSA sur leurs communautés.
Exprimant notre profonde gratitude aux autorités de Barcelone, à travers son maire, les responsables de la ville, sa population, pour l’initiative et l’accueil chaleureux accordé à tous les participants à la première Rencontre paneuropéenne des autorités locales et la nouvelle génération de traités de libre-échange.