La mobilisation a été importante pour l’ouverture du procès infamant que PricewaterhouseCoopers, 1ère société de consulting au monde, intente à son ex-employé Antoine Deltour ainsi qu’au journaliste Edouard Perrin et à Raphaël Halet, autre ancien collaborateur de PwC. Notons au sujet de ce dernier qu’il n’avait pas souhaité être soutenu dans cette affaire et qu’il aurait trouvé un accord avec son ex-employeur.
Médiatiquement, le succès était assuré avec une foule de journalistes internationaux présents. Les soutiens à Antoine Deltour et Édouard Perrin n’ont pas été en reste: le comité de soutien à Antoine, le comité de solidarité luxembourgeois, les organisations de la Plateforme contre les paradis fiscaux et des citoyens étaient là et bien là. Soit plus d’une centaine de personnes, avec chants, banderoles et pancartes. La salle de la 12ème chambre du tribunal correctionnel de Luxembourg s’est en définitive révélée trop petite pour accueillir tout le public. Une autre salle, disposant d’un écran, a été ouverte.
Le Petit Journal de Canal+ livre un bilan de la première journée en s’intéressant aux lanceurs d’alerte.
Il n’y a pas une personne plus légitime que Denis Robert pour s’exprimer au sujet du procès LuxLeaks et de la protection des lanceurs d’alerte. Soutien déclaré à Antoine Deltour, il était bien entendu présent à Luxembourg. Voilà ce qu’il écrit sur sa page facebook au terme de ce premier jour d’audience:
“Bilan de la journée… Me suis levé à six heures, ai commencé par RTL, ai enchaîné sur la RTBF, puis Canal, grand et petit journal, Radio bleue, I télé, BFM, Arte, TF1, Mirabelle, des luxembourgeois, des allemands, FR3, des alters, Basta mag, LCP, etc pour arriver au dernier, le stagiaire sympathique de Public Sénat qui oublie de mettre un disque dans son magnéto et qui veut qu’on recommence. Niet. Jet de l’éponge. Une vingtaine d’interviews où j’ai essayé de varier les formules. Au final, ce constat ancré qu’on est — avec ce procès Luxleaks — dans un délire total. Ce sont les voleurs — et donc la société d’audit PWC — qui sont du (bon) côté de la justice et les justes qui sont sur le banc des accusés. Au centre de ce jeu de dupes, des magistrats qui ressemblent à des personnages de Daumier et de Kafka, engoncés dans leur orgueil, utilisant un vocabulaire qui se veut judiciaire et éclairé, mais qui n’est qu’un jargon visant à accabler celui qui dit la vérité. On a passé la matinée à écouter religieusement la représentante de la société d’audit qui a organisé la fraude fiscale nous expliquer comment Antoine Deltour avait fait pour s’emparer du “data”. Tu parles… Peut-être suis-je le fou de l’histoire? Peut être suis je le seul à ressentir cela mais j’ai vraiment eu le sentiment d’être dans un hôpital psychiatrique grandeur nature. Les fous étaient ceux qui nous faisaient la leçon.”
Parmi les interviews que Denis Robert a données, retenons celle-ci.
Il est aussi intéressant de voir comment le procès est appréhendé depuis le Grand-Duché. Le Quotidien, journal indépendant, y accorde une large place. Avec évidemment un compte-rendu de cette journée initiale, un édito offensif qui qualifie le procès “d’ineptie toxique pour la démocratie” et une présentation du procès et de ses enjeux.
Enfin, en cours de journée, on apprenait par la voix de Michel Sapin, ministre des Finances, que la France se dit solidaire avec Antoine Deltour et propose son aide. Il était juste temps, voilà un an et demi que François Hollande et Manuel Valls se taisent dans toutes les langues de bois à ce propos. Le président français n’avait même pas eu un mot à l’adresse d’Antoine Deltour quand, début avril, il avait remercié les lanceurs d’alerte des Panama Papers.