Pour Publifin!

La Wallonie, et spécialement sa représentation la plus légitime, le Parlement, s’est mise en valeur au plan international en permettant à son gouvernement, et spécialement son Ministre-président, de barrer la route au projet de traité CETA. Ce débat de haute volée a permis une réhabilitation de l’intérêt public, une remise en selle de l’acteur public.

Ancrée à gauche, la «petite» région d’Europe qu’est la Wallonie a toujours cultivé l’art de mettre en place des structures publiques. C’est loin d’être une honte, c’est même cohérent. Ne plonge-t-elle pas sa racine politique dans «l’initiative industrielle publique», revendication et affirmation constantes depuis des décennies?

Mais voilà, patatras, la Région n’a jamais été en mesure d’installer des opérateurs adéquats pour rendre son secteur public clair, opérationnel, stratégique, signifiant. On tombe maintenant sur la bosse de l’une ou l’autre personnalité politique, sur le paletot de l’un ou l’autre opérateur financier, industriel ou institutionnel. C’est dommage! Dommage parce que les turpitudes de petite facture masquent la question stratégique de fond: placer une initiative publique adéquate dans le délabrement économique et social.

En fait, les représentants politiques les plus importants de la Wallonie n’assument pas suffisamment leur option publique. Ils la jouent de biais, sans affichage lisible, en recourant à des sociétés variées, créées au gré des besoins et des opportunités et des nécessités.

La confusion vient de la question patrimoniale des divers pouvoirs publics wallons. On s’accroche aux portefeuilles des communes et des provinces, alors qu’il conviendrait de les transférer à la Région. Du moins pour tous les dossiers de portée extra-communale, c’est-à-dire régionale.

Stéphane Moreau, administrateur délégué de Nethys et bourgmestre d’Ans

La confusion vient aussi de la structuration erratique des projets et des métiers. Comme les intentions, si louables soient-elles, ne sont jamais explicites, on utilise des vecteurs de toutes nature pour réaliser des projets. Publifin, composé avec de l’argent issu de l’électricité, se trouve maintenant dans les médias, les assurances, les aéroports, l’éolien. On n’y sépare plus les services publics par nature (les câbles électriques de Resa), les services placés dans la concurrence (la télédistribution de VOO), les infrastructures et les dossiers… divers (du style L’Avenir et Moustique).

André Gilles, président du CA de Publifin et député provincial

Le rayon d’action de ces opérateurs n’est plus du tout en adéquation avec l’origine du capital des sociétés. Que peut connaître un conseiller communal d’une des 76 communes associées à Publifin quand celle-ci programme ses investissements financiers? Que sait l’abonné à VOO du circuit de l’argent vers un aéroport? Qui s’y retrouve dans cet écheveau?

Une équipe entreprenante — on ne peut lui nier cette appellation — profite de la dépossession des communes pour initier des projets et des structures. Elle utilise un homme politique un peut falot pour les «présidences». Elle promet des revenus aux communes, quitte à pratiquer des tarifs trop élevés, et s’associe les grâces des partis avec des organes de gestion médusés, ou inutiles, à participation «démocratique» (disons large et pluraliste).

La Région dispose d’outils plus centralisé pour agir en différents domaines, ça suffit.
• SRIW pour l’initiative économique
• Sowaer pour les aéroports
• SWDE pour l’eau
• TEC pour le transport
etc.
Les sous-régions ont leurs capacités économiques avec les Invests et les intercommunales de développement.

Il n’est pas normal que le ministre des Pouvoirs locaux ait à contrôler un secteur financier et industriel. En témoigne le débat minable au Parlement wallon, où il a dû promettre «plus de contrôle». Rien à voir avec l’enjeu, évidemment. Comme n’a rien à voir avec la «réparation» la ristourne de jetons de présence à une œuvre caritative.

Il faut passer à une vision stratégique non dissimulée de l’initiative publique wallonne. Grouper les affaires au niveau régional, exproprier les communes. Débarrasser les organes de gestion et de consultation de tous leurs occupants parasites, aux rémunérations aussi indues que mesquines. Ce serait donner une légitimité claire à un secteur public qui n’a de sens que si la population et les usagers lui accordent de la confiance.

Publifin est une entreprise parmi d’autres qui doit être aspirée par l’intérêt général, wallon et stratégique. Svp, ne ratons pas l’occasion de positionner enfin les acteurs économiques à la place qui leur revient.