Mon mai 68

Grand fut mon étonnement, pour ne pas dire mon scepticisme, de vouloir célébrer « Mai 68 à Bruxelles » (article du « Soir » sous le titre « Un demi-siècle de contestations » d’il y a quelques mois).

Pour résumer : en 1967, après des études aux Arts et Métiers où je suis devenu spécialiste en machines-outils et technicien en mécanique générale, j’ai été engagé comme ouvrier (salaire : 1,27 euro/heure) par AUXELGAZ qui, à l’époque, avait une usine à Forest et un vaste chantier mobile couvrant tout Bruxelles et le Brabant dans le cadre de la conversion de tous les appareils ménagers et industriels au gaz naturel.

Lorsque débutèrent, en France, les événements de Mai 68, plusieurs ouvriers – dont moi -, certains étant membres de la FGTB et/ou du PSB, avons interpellé ces syndicat et parti socialistes afin, entre autres, de pouvoir aussi mener un combat pour que soit prise en considération notre condition ouvrière assez semblable à celle de nos camarades de l’Hexagone.

Nous fûmes, tout simplement (?),  muselés et cadenassés, certains étant même menacés (cela reste du témoignage verbal, donc je n’ai aucune preuve tangible) de licenciement.

Certes, il y eut à Bruxelles un « Mai 68 », mais lequel ? Celui de l’intelligentsia qui discourait à l’ULB, une vague perturbation estudiantine à la RTBF et puis, quoi sur le front du monde du travail ? Rien, ou, alors, vraiment pas grand-chose. Je peux me tromper, bien entendu, c’est la raison pour laquelle je collationne différents témoignages de personnes ayant vécu cette période. Je vous en livre un, caractéristique, celui de Paul Couturiau, un écrivain belge oeuvrant (avec succès) en France : « Bruxelles et Mai 68 ne me semblent pas aller de pair. »

Sachez, encore, et pour finir, qu’après deux-trois ans à AUXELGAZ, en lieu et place du service militaire et dans le cadre de mon objection de conscience, je me suis engagé comme technicien pour le Gouvernement algérien (avec salaire des autochtones), dont le pays était en reconstruction après la guerre coloniale.

À mon retour en Belgique, j’ai retravaillé en usine, puis embrassé une carrière d’enseignant technique, et, enfin, mon rêve, devenir journaliste (études de promotion sociale ad hoc) et auteur.

Je boucle la boucle en témoignant avec « Mon Mai 68 », en somme, en espérant que «POUR» (où j’ai collaboré de 1974 à 1977) consacrera un numéro à cette période chargée de symboles et d’Histoire.

Amicalement.

Pierre Guelff