(1/6) La Réduction Collective du Temps de Travail… Vers un nouveau contrat social

Le groupe de travail RCTT du Collectif Roosevelt-Namur a développé un argumentaire en faveur de la Réduction collective du temps de travail, intitulé: «La RCTT – Vers un nouveau contrat social»

Ce travail sera publié sur notre site en 6 parties:

1ère partie: Le constat – La répartition actuelle du travail est totalement inégale et injuste
2ème partie: La Réduction collective du temps de travail est bénéfique pour TOUS et TOUTES
3ème et 4ème partie: Deux salves d’objections à la RCTT et leurs réponses
5ème partie: L’expérience des 35 heures en France: un succès mitigé mais des critiques injustes
6ème partie: Dernières objections et orientations RCTT du Collectif Roosevelt-Namur

C’est la première partie que nous publions aujourd’hui.

Le débat étant aujourd’hui ouvert au sein des organisations syndicales et face au Gouvernement, nous ferons aussi écho aux prises de position et développements nouveaux.

Argumentaire en faveur de la Réduction collective du temps de travail – 1ère partie

Le constat: la répartition actuelle du travail est totalement inégale et injuste

Le chômage explose depuis les années 1970.

Ces chiffres de l’OCDE montrent une tendance de long terme d’accroissement du chômage partout dans le monde: grosso modo de 3 à 7 ou 8%.

1Cette tendance se confirme dans les années plus récentes, avec une légère amélioration depuis 2013, et en notant l’exception allemande depuis 2005:

2Entre 2000 et 2015, le chômage a augmenté de 12% en Belgique et, entre 2007 et 2015, de 26% dans l’UE à 28.

On peut observer que, durant la même période, la productivité (PIB produit par heure travaillée), augmente elle aussi de 12% en Belgique et de 15,7% dans l’UE à 28.

Ceci confirme que l’accroissement de la productivité produit parallèlement du chômage.

3Les gains de productivité sont liés aux progrès technologiques, aux méthodes et outils de production comme la robotisation, aux nouveaux logiciels, à la vitesse de production.

Ces gains de productivité ont réduit substantiellement l’emploi dans le secteur primaire (agriculture, mines) par la forte mécanisation introduite; puis dans le secteur secondaire (industries); ils réduisent à présent substantiellement l’emploi disponible dans les services. On pense ici aux suppressions massives d’emploi dans les secteurs de la banque, des assurances, de la distribution, etc.

Depuis les années 60, nous produisons 5 fois plus vite qu’auparavant mais les gains de productivité, fruits de l’effort de TOUS, débouchent:

  • d’une part, pour les travailleurs, sur un chômage massif, une stagnation des salaires, une augmentation du temps partiel subi, un stress croissant chez les temps plein qui croulent sous le travail;
  • d’autre part, sur une rémunération exorbitante des actionnaires et des grands patrons. Celle-ci est devenue la base de la dynamique de gestion des grands groupes financiers et des multinationales.

C’est donc bien la répartition de l’activité-travail, ET des fruits de celle-ci, qui pose problème.

Alors que la part des hauts revenus augmente de plus ou moins 15 % depuis 1970, celle des salaires dans le PIB chute de 9 à 10 % au cours de la même période.

La répartition actuelle du travail est donc un non-sens. La réduction du temps d’occupation au travail est bien là: nous produisons de plus en plus en travaillant « collectivement » moins.

Mais la répartition du travail est totalement inégale et injuste.

On peut cependant se demander pourquoi certains pays, proches de nous, s’en tirent apparemment mieux que la Belgique. On cite le plus souvent les Pays-Bas et l’Allemagne.
Les Pays-Bas présentent un taux de chômage de 5,5%; l’Allemagne de 4,5%. Leur taux d’emploi (pourcentage des personnes en âge de travail effectivement occupées, quel que soit leur taux d’occupation – à temps plein ou à taux partiel) est respectivement de 75 et 72%, contre 63% pour la Belgique.

Cette différence importante s’explique par le recours massif aux Pays-Bas et en Allemagne au travail à temps partiel et aux « petits boulots » qui, en augmentant le nombre de personnes « occupées », réduit mécaniquement le taux de chômage.

Ainsi, aux Pays-Bas, 50,5% des personnes au travail le sont à temps partiel (dont 63% de femmes); en Allemagne, 27,5% de travailleurs à temps partiel (dont 73% de femmes). La Belgique, quant à elle, compte 24% de temps partiels, dont 72% de femmes.

Ces chiffres sont extraits d’une Enquête sur les forces de travail menée en 2014. Le communiqué de presse est intitulé: « Près de 10 millions de travailleurs à temps partiel dans l’UE auraient préféré travailler plus – 2/3 d’entre eux sont des femmes ».

Comment la réduction structurelle et continue de la masse de travail disponible est-elle ajustée? Cet ajustement est réalisé, de façon prédominante, par le recours au temps partiel. Cela réduit la durée moyenne de travail par travailleur occupé. Cette durée moyenne se situe aujourd’hui autour des 30h/semaine. Mais plutôt que d’ajuster les compétences par la formation et le taux d’occupation par la réduction conventionnelle de la durée du travail, on ajuste par les « petits boulots » qui garantissent la flexibilité maximale et entraînent la désarticulation sociale et la multiplication des exclus du travail et du bien-être.

La durée légale ou conventionnelle du travail ne se réduit plus! Alors que c’est la seule variable d’ajustement qui permettrait de PARTAGER le travail disponible; de remettre en activité des milliers de chercheurs d’emploi en Belgique, des millions en Europe; de réduire les coûts d’indemnisation du chômage et de ramener des contributions d’actifs à la Sécurité sociale.