Enquête de la Médiatrice européenne: Mario Draghi et la BCE trop proches des banquiers

Les scandales passés n’ont pas réussi à freiner le personnel de haut niveau de la Banque centrale européenne (BCE), qui se sont de plus en plus impliqués dans le «Groupe des Trente» (G30). A la suite d’une plainte de Corporate Europe Observatory, la Médiatrice européenne Emily O’Reilly a ouvert ce 19 janvier une nouvelle enquête sur la proximité entre la BCE et le G30 composé d’économistes, de banquiers centraux et de nombreux hauts représentants des plus grandes entreprises financières du monde.

La recherche menée par le CEO a mis en lumière un important manque de distance critique entre les organes décisionnels de la BCE et les grandes banques au sein du G30. La BCE ayant pour mission la régulation du secteur financier et la supervision des banques centrales de l’Eurozone, tout conflit d’intérêt, suspecté ou réel, est une menace importante sur l’intégrité de la BCE. Au cœur de la plainte se trouve Mario Draghi, le président de la BCE, qui est membre à part entière du G30, mais aussi d’autres membres des organes dirigeants qui ont contribué aux travaux du groupe, dont Julie Dickson, membre du Conseil de surveillance prudentielle de la BCE.

L’ouverture de l’enquête de la Médiatrice fait suite à des demandes répétées de réponse aux préoccupations de CEO, toujours éconduites, mais reconnaissant qu’aucune évaluation d’une implication croissante du personnel de la BCE dans le G30 n’avait été menée pour vérifier la compatibilité avec les règles éthiques de la banque.

Un responsable de la politique financière au sein de CEO, Kenneth Haar, s’est ainsi exprimé: «Si la BCE ne prend pas l’éthique au sérieux, comment peut-on s’attendre à ce qu’elle fasse appliquer correctement les règles de sa politique au sein de l’Eurozone? Nos recherches montrent que des membres du personnel de haut niveau de la BCE ont des relations beaucoup trop proches avec des représentants des banques qu’ils sont supposés contrôler et que l’information qu’ils communiquent aux rencontres du G30 est donnée sans contrôle ou supervision.

«Il est important que la Médiatrice investigue maintenant la proximité entre les banquiers de la BCE et les représentants de l’industrie bancaire au sein du groupe. Toutes les institutions de l’UE doivent assurer la transparence et éviter les conflits d’intérêts — cela vaut pour la BCE autant que pour la Commission européenne et le Parlement européen. La BCE est devenue récemment une institution beaucoup plus puissante, et il semble que les procédures relatives à l’éthique n’ont pas du tout suivi ce développement.»

Addendum
• Lire la lettre de notification d’une enquête adressée à Mario Draghi, président de la BCE.
• En 2015, la BCE a revu une première fois et renforcé ses règles d’éthique, à la suite du scandale Coeuré (membre du directoire de la BCE depuis 2012) et de la mise en lumière par le Financial Times des réunions discutables de responsables de la BCE avec des banquiers et gestionnaires de portefeuilles, organisées juste avant la prise de décisions cruciales. Voyez ici un résumé de cette affaire.


© Corporate Europe Observatory – janvier 2017
https://corporateeurope.org/pressreleases/2017/01/eu-central-bank

Traduction de l’anglais: Robert Polet